Du respect pour le ”non“ !
Messieurs de la gauche, vous qui votez ”oui“, un peu de respect sil vous plaît, pour ceux qui voteraient ”non“ en Belgique, si on leur avait laissé le choix.
A dix jours du référendum français sur le projet de Constitution de lEurope, le yoyo du “oui” avec le ”non“ nous donne à réfléchir sur ce quaurait été le débat en Belgique, sil navait été escamoté par les avocats bourgeois de la direction du PS, le montois en tête. Ce référendum, dont nous sommes privés, aurait révélé à la gauche la vraie nature de ses dirigeants, malgré le gauchissement du discours dElio dans le but de se concilier les syndicalistes. Et cela, la direction du PS belge ne le voulait à aucun prix. On la comprend.
En effet, quel va être en France le bilan des dégâts pour le PS de François Hollande, quand on entend les propos alarmistes des grands leaders de Fabius à Strauss-Kahn sur le danger dun éclatement du parti ? Au vu des sondages, le “non” est majoritaire à la base du PS à dix jours des élections, tandis que les directions sont à leur grande majorité pour le “oui”.
Autrement dit, les dirigeants français ne sont pas suivis par une majorité de militants, malgré la propagande active du “oui”, insidieuse et constante, qui vient en relais du déferlement des moyens particuliers, radios et télévisions, et de la droite en général.
Cest bien la première fois que ce divorce dopinion montre le manque de démocratie qui règne au PS français. Si ce dernier avait fait campagne pour le ”non“, après lecture et en toute connaissance de cause et pas à la sauvette comme pour le “oui”, il ne fait pas lombre dun doute que le “non” aurait recueilli 80 % des voix.
Sous les déclarations de foi pour lEurope, les partis socialistes dissimulent mal leur conviction profonde et qui a beaucoup changé depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.
Les thèses selon lesquelles le capitalisme était inamendable ont été progressivement modifiées jusquau revirement total. Les socialistes considèrent à présent que le capitalisme est un fait incontournable et quil faut faire avec, tandis quils nont jamais franchement rompu dans leurs discours avec la vulgate marxiste.
Quant à amender un système qui prône légoïsme et le « help your self », alors que les dirigeants ont goûté à la gamelle libérale, ce nest pas demain la veille. Seulement, les militants de base ne le savent pas encore. Ils sen doutent, sans plus. Un référendum en Belgique risquait de faire tomber la marmite dans laquelle on touille depuis vingt ans. Ainsi, nos nouveaux bourgeois ont encore un peu de temps avant denlever le masque, et dire enfin quavec les bleus, ils roulent sous la même casquette.
Pour la gauche, le ”non“ est plus logique que le “oui”. Cette Constitution consacre sans ambiguïté le libéralisme, avec ce que cela recouvre dinégalités et de futur détricotage du produit des luttes ouvrières.
Une fois empaquetée, la Constitution Giscard met le social à la poubelle pour au moins cinquante ans ! Voilà la vérité.
Il ny aura plus jamais dans la grande illusion dune Internationale du travail, cette petite lueur despoir en un monde meilleur qui faisait accepter les souffrances des conditions injustes.
Contrairement à ce que croit Di Rupo, les gens ne sont pas bêtes. Ils voient bien quils sont en train de perdre ce que leurs anciens ont accumulé par leurs luttes. Et ils se disent quil nest pas vrai que le progrès social soit automatiquement constant, en rapport avec le PNB qui saccroît dannée en année. Alors, où vont les fruits du travail ? Ils sont inquiets les gens, à juste titre, du peu de protection que leur procure cette Europe quils souhaitaient et qui les prend de vitesse, pour devenir un train fou avec des lois qui ne sont plus faites pour eux.
Lexemple américain les effraie. Ils voient bien, contrairement à ce quon leur dit, que cest vers ce modèle-là que nous entraîne lEurope de Dehaen et de Giscard. Il nest pas vrai que nous garderons à lavenir notre spécificité européenne, tant la mondialisation de léconomie va vers une uniformisation générale.
Le pragmatisme socialiste est clair, vous partez dans la logique du profit : vous faites la richesse dune minorité ; vous résistez : vous tombez dans la misère endémique du tiers monde où vous travaillerez pour moins cher et crèverez de faim. Il ny a pas de no mans land entre ces deux mondes.
Cest à prendre ou à laisser.
Les gens pensent a contrario des dirigeants socialistes. Ils pensent que le monde a besoin dune utopie sociale afin davoir raison despérer. Le monde libéral, contrairement à ce que susurre Didier Reynders et Elio Di Rupo est un monde noir, sans avenir. Ses objectifs ne sont pas humains. Cest un monde qui naime pas, un monde misanthrope, malgré les grands airs et les « aides au développement » des pays quon égorge en sous-main.
Cest ce modèle-là que les gens craignent pour lEurope.
Et comme elle va, lEurope, elle sy précipite.
Dès lors, que les médias, les pouvoirs et les sponsors la mettent en veilleuse.
Le ”non“ vu sous cet angle est au moins aussi respectable que le “oui”.