Quand esculape nous laisse baba.
On peut dire que depuis le guichet où il faut montrer patte blanche, jusquà la fin des examens, quelque chose ne va plus dans les services des soins de santé.
Et ce depuis longtemps.
Jen veux pour preuve une aventure qui mest arrivée à lhôpital de la citadelle, voilà quelques temps.
Chez moi, je me reçois mal en descendant dune petite escabelle. Impossible de mettre le pied par terre : fracture, foulure, va savoir ?
Je téléphone à une compagnie de taxi qui me dépose aux Urgences à lhôpital de la Citadelle.
Jarrive à cloche-pied devant le comptoir semi-circulaire où trois dames en blanc ont tellement lair occupées quaucune ne lève la tête à mon arrivée : deux écrivent, une téléphone, devant la dame au téléphone une petite pancarte « accueil ». Jy vais clopin-clopant. Comme le téléphone est à dix centimètres de mes oreilles, jentends ce qui se dit. La donzelle a réservé des places sur le Thalys et elle voudrait changer les dates !
Vous le croirez si vous voulez, jai attendu près dun quart dheure que cet échange de date trouve enfin sa solution. Entre-temps, les deux collègues en avaient terminé avec leurs paperasses. Elles échangeaient des propos du genre : « Mel Gibson ma déçue dans la Passion du Christ ».
Jinterviens « Je men fous de Mel Gibson. Je suis là pour mon pied ! ». « Chut » me fait celle qui téléphone, tandis que les deux autres échangent des regards furieux.
Cest tout juste si elles nont pas téléphoné au service psychiatrique.
Quand enfin lhoraire est changé, elle lève un lourd regard sur moi ponctué dun sec « Quest-ce que cest ? ». Je sens que ça ne va pas se passer comme ça. Elle le sent aussi et pour madoucir, elle me dit dun ton beaucoup plus neutre « Excusez-moi, cela ne pouvait pas attendre ». Je ne suis pas un mouchard, elle fait son boulot, mal apparemment, mais elle le fait. Ma colère retombe et après un nouveau bon quart dheure au cours duquel, je me suis accroché au comptoir, un infirmier que je vois de loin parler à tout le monde avant de sadresser à moi, vient me chercher sans chaise roulante, sans rien dutile que le soutien de son bras. Ce qui est déjà quelque chose.
Ce jour-là tout a marché de travers. Des attentes à la radiographie, des confusions dans les radios, un interne qui est pressé et qui me fait un mal de chien pour retirer ma chaussure que javais eu limprudence de mettre au départ de mon domicile avant que ça nenfle, impossible de savoir ce que jai au juste, fracture de lastragale, déchirure des ligaments ? Enfin, jai une chaise et on me trimballe de service en service, la chaussure à la main.
Cest tout à la fin dun circuit de plus de deux heures quon me dit que cest sans gravité et que cest une affaire de deux ou rois jours.
Encore aujourdhui, jignore toujours ce que jai eu.
Certes, ce nétait pas bien grave ce dont je souffrais. Mais quand savaient-ils en me laissant poireauter dans les couloirs avant de poser un diagnostic ?
Je pense à toutes celles et ceux pour qui la rapidité de lintervention est capitale. Jaurais dû me laisser tomber par terre et simuler une crise cardiaque !
Je pense à toutes ces femmes admirables qui se battent, mais surtout qui se débattent dans des situations extrêmes de cancer et qui réunissent leurs expériences dans un site « essentielle.net ». Une brève visite nous renseigne sur la valeur de certains accueils dans les hôpitaux, pas tous, certes, mais il ny en aurait quun seul que ce serait encore un scandale.
Lhôpital est en crise : crise de personnel, crise financière, crise dorganisation et même crise didentité. Il ne se passe pas un jour sans que Rudy Demotte trouve le moyen de ne pas rembourser certains médicaments, les frais augmentent sans que la qualité des soins saméliore. Et pas que dans les hôpitaux. Dans les maisons de retraite, ce nest pas triste non plus.
La nourriture y est souvent exécrable, les patrons détablissements jonglent avec le personnel stagiaire. On a même vu certaines maisons de retraite faire payer à leurs pensionnaires des médicaments au-dessus du prix légal ! Et quon ne memmerde pas là-dessus, jai des preuves. Pas quà la Carolorégienne quon se moque des gens.
Malgré la sophistication des équipements, les services de santé restent avant tout une entreprise découte et daccueil. Le plus souvent, cest le fonctionnement humain qui grippe les rouages : absentéisme, démotivation, manque de coopération dans le travail... Cest au regard de ces symptômes quil est devenu urgent de poser, enfin, les bonnes questions sur cette grande "machine" quest lhôpital. Mais pour remettre lhôpital en question, au sens propre, sur le travail et les relations de travail, il faut : - interroger les intéressés dabord, par voie denquête, afin déclairer le fonctionnement réel des services; - poser un diagnostic, en raisonnant en système et par comparaison, à laide de la méthode du diagnostic sociologique, différente de laudit; - enfin, trouver les modalités du changement conduisant à de véritables améliorations.
Les « grands patrons », les « sommités médicales, ont tendance à prendre le patient pour un imbécile, un peu comme les avocats qui foisonnent dans les partis politiques, les électeurs.
Nous sommes dans une situation incontrôlable. Cest quand même le malade qui court le plus de risque, non ? Sauf pour les maladies nosocomiales. Et même dans ce cas, à qui la faute, si ce nest au manque dhygiène des Services dans la plupart des cas !
Commentaires
Tu as encore eu de la chance dans le cas de ton pied.
Jai eu un jour des ligaments arrachés au genou et là, si!!! si!!!! linfirmier des urgences ma bien installée sur une chaise roulante mais .... ma tapé la jambe dans la porte. Tous comptes faits, je peux marcher, Msieur? Cest moins dangereux.
Merci pour la mention de "femmes admirables", je confirme, les Essentielles sont super!
Bon, ben, après la kiné, je men vais passer la PM à lhosto, radiothérapie, choix de suite de traitement et psychologue. Patient, vous avez dit patient, comme cest bizarre ;-)
Postée par Suzzzz | 05 octobre 2005 - 00:01