Un sujet qui fâche.
Il y a des sujets que l’on n’ose plus aborder tant ils sont sensibles.
Tel celui du racisme, par exemple.
C’est devenu monnaie courante, dès lors que l’on est européen blanc de peau, il faut être circonspect dans ses propos quand ils s’adressent à un immigré de couleur, voire à un Belge d’origine étrangère.
C’était déjà le cas depuis fort longtemps quand il s’agissait d’un ressortissant Israélien ou d’un Belge de confession juive.
Ça l’est maintenant pour tout qui tombe dans le délit de « sale gueule » selon les critères d’une certaine police.
C’est une évidence, la gauche radicale rejoint dans ses outrances l’extrême droite dans son évidente mauvaise foi. Le Vlaams belang, par exemple, même si la menace de perdre des subsides accordés aux partis politiques atténue la virulence des officiels, exclut les émigrés de toute participation citoyenne et les accuse de toutes sortes de péchés : désordre, drogue, délinquance, intégrisme ; de même, certains éléments d’extrême gauche affichent leurs tendances post-coloniales par l’exclusion contraire de tous citoyens blancs, en leur dénigrant la volonté élémentaire d’accueil et de compréhension des différences.
C’est malheureusement ce dernier discours qui fait le plus de tort aux rapports normaux entre les communautés, en dressant systématiquement « l’étranger » résidant, contre tout ce qui pourrait être belge d’origine, comme si cela avait encore un sens quand on songe au « métissage » à proprement parler des populations autochtones qui remonte à l’occupation espagnole sous Philippe II !...
Cette gauche-là sous prétexte d’anti-racisme par son radicalisme en arriverait à cautionner l’intégrisme musulman, comme une réaction à l’oppression occidentale !
C’est un défi permanent que cette partie de la gauche projette à l’encontre d’une gauche progressiste qui veut prendre ses distances du socialisme de collaboration avec la droite libérale.
Les syndicats se sont jusqu’à présent tenus à l’écart de « l’ethnisation » du mouvement social.
Mais pourront-ils résister longtemps à la division qui menace ?
En-dehors d’eux, il faut convenir que les discours des hommes politiques transpirent l’angélisme tant ils souhaitent ne pas prendre parti pour l’une ou l’autre communauté, même quand ceux qui accusent tout le monde de raciste le sont au premier chef.
Ils auront cependant beau se placer en dehors des querelles, dépeindre les guerres comme les pires horreurs, militer pour les droits des étrangers, réclamer la régularisation des sans-papiers, ils seront toujours regarder de travers comme fils et petit fils de colonisateurs !
Alors qu’un peu de courage serait nécessaire afin de mettre certaines choses au point et notamment celle d’oser pouvoir dire que le racisme n’est pas unilatéral, qu’il n’est pas du seul ressort du « Belge blanc », mais que souvent des citoyens de couleur le sont davantage, par le seul fait qu’ils paraissent plus crédibles dans le rôle de victimes que dans celui de coupables.
On peut regretter que les lois contre le racisme et l’anti-sémitisme aient enfermé les communautés dans le manichéisme d’un camp retranché. Ces lois sont surtout des lois du silence où chacun n’en pense pas moins, mais s’interdit de le dire.
Alors se font face des gens dont la haine monte en fonction de l’inexprimé.
Où sont ces rapports bon enfant entre les citoyens de quelque origine que ce soit ?
Et ces blagues souvent de mauvais goût mais qui à défaut de détendre l’atmosphère permettaient de connaître sous des dehors plaisants le fond de la pensée de celui qui les assumait : qui ose encore les proférer ?
En s’insérant entre les gens, dans le louable prétexte de les exorciser de l’injure, ces lois n’ont rien fait qu’exacerber davantage les griefs et les rancoeurs, alors qu’un déballage public ferait triompher la bonne foi et rognerait les ailes aux discours boiteux.
Enfin, cette partie de la gauche extrême si sûre d’elle, de son bon droit, de ses justes récriminations pour plus de justice et de liberté, de ses discours antimondialistes… qui ne devine à ses propos qu’elle s’impatiente de quadriller ses zones d’influence en plaçant ses commissaires du peuple et en promulguant ses interdits ?
Nous avons toujours évité les débordements de l’extrême droite par la retenue des mouvements de gauche ; mais si une certaine partie de l’extrême-gauche s’en mêle aussi, il faudra bien que l’on mette les choses au point en 2006.