Une affaire entendue.
Nul doute que les événements séditieux en France vont devenir sporadiques, pour tout à fait disparaître dans les jours qui viennent et que les promesses qui ont suivi les désordres vont être partiellement, sinon complètement, oubliées.
Cela a toujours été ainsi. Les réformes sont des leurres destinées à faire accroire…
Et si lon considère lordre public rétabli et le côté paisible des choses, voilà qui ne contrariera personne.
Pourtant, tout le monde sait que les questions soulevées restent pendantes et si elles nont pas trouvé lombre dune solution à chaud, elles nen trouveront pas davantage à froid.
Cest la force des démocraties daspirer toute chose, den faire un brouet comestible et commerçable. Gageons que la destruction des milliers de véhicules de ces quinze jours ne sera pas une perte pour tout le monde ; car la perte dun bien, provoque dans une société de consommation, un regain dactivités compensatoires.
Et on en arrive à cette conclusion un peu infamante et qui déshumanise les intentions que « ce qui est bon pour le commerce, est bon pour le citoyen ». Drôle de raisonnement qui nous conduit directement à une « dictature libérale » qui nest pas franchement une dictature, mais qui nest plus une démocratie !
A défaut dun mot intermédiaire, attachons-nous encore au mot « démocratie » quand nous parlerons de « dictature libérale », par commodité et surtout pour laisser aux dictatures dures lexclusivité du mot.
Les démocraties brassent tout et dun mélange du pire et du meilleur en font leur fast-food. Cest-à-dire quelque chose de comestible, de pas très bon, mais mangeable.
Au contraire, les sociétés totalitaires, concentrées sur le chef et son noyau sépuisent dans une censure qui les stérilise. En dramatisant tout à lextrême et en punissant la pensée même des citoyens, elles font du quotidien un enfer où seuls les affidés, les complices du tyran, trouvent leur compte.
Qui parle de démocratie dit « commerce » aujourdhui. Le citoyen devient client. Les rapports entre lui et ses chefs de rayon parlementaires sont les mêmes, quentre une carte de crédit et son lecteur.
On voit bien la manière dont vont être récupérés les mouvements violents des banlieues en France pour le bénéfice des responsables actuellement en poste dans les autres démocraties dEurope.
La fragmentation sociale, la dilution des groupes et des pratiques apportent à la sécurité générale la garantie que « lennemi » (le pauvre et le marginal), se présentera devant les Polices en ordre dispersé, donc justiciable au cas par cas.
Evidemment avec ses 20.000 colocataires dun ghetto urbain, un quartier ne pourrait pas être jugé dune pièce. Si une telle insurrection survenait, elle serait éliminée par lordre bourgeois, de la même manière que Saddam Hussein fit gazer ses opposants kurdes. Bien entendu, les petites gens des barres qui pleurent la destruction des voitures et des bâtiments communautaires ne le savent pas.
Donc la politique de Villepin va être de faire soit disant du social et qui ne fera que réduire les liens entre les composantes sociales des quartiers « à risques ».
Rendre les gens solidaires dans une société égalitaire, il ne le peut, évidemment, la dissolution du système libéral dans laltruisme étant impossible, personne ne voulant se dessaisir de son acquis pour le bien-être général.
La rupture avec une solidarité totale entre les citoyens, la dispersion des minorités, la quête dinitiative personnelle dans tous les registres, fournissent autant de débouchés pour lactivité marchande des économies libérales.
En atomisant les projets, il sera fort difficile den dénoncer les nuisances et surtout, il sera facile de cacher ce qui nest pas heureux de faire voir, à savoir le terrible échec des économistes qui prévoyaient dans les années 60 que le formidable développement des productions de biens allaient satisfaire toutes les demandes. Ils en déduisaient même la nécessité daccroître les besoins par la publicité qui donne si facilement lidée de la richesse facile et à crédit.
Si on est loin de la satisfaction générale, par contre le désir de vivre bourgeoisement dans le confort est le résultat du triomphe de la publicité. Aussi curieux que cela paraisse, cette activité libérale par excellence est le ferment de la subversion populaire.
La différence entre lespérance que la publicité donne aux masses et la réalité, est à la base des révoltes du monde occidental.
Et elles ne sont pas prêtes de prendre fin.