T’as 5 minutes, qu’on cause…
Bien sûr la défense et l’illustration de la langue française...
On en est à l’anglais, après... le chinois, sans doute.
On a la langue qu’on mérite. L’anglais qui était une langue d’affaires et d’affairistes est devenue également celle des colloques et des scientifiques. Nos beaux esprits cliniciens parlent anglais entre francophones tant les publications qu’ils feuillettent ignorent le français. Les jeunes tiges de l’intelligentsia de demain font des séjours au bord de la Tamise. Elles acquièrent ainsi la langue porteuse, mondiale comme dirait Jean-Claude Van Damme, notre anglophile national. Snobisme ? Nécessité ?... constat bourgeois, pratique surtout pour une belle carrière, sous-entendu par là avec statut et pognon. Cela va de soi.
Alors dernier cocorico avant la fermeture, c’est bien dommage, parce que le français, quand même, c’est la précision, c’est le détail, l’art de dire le contraire de ce que l’on écrit quand on a de la finesse, comme de dire rondement et sans fioriture les vérités ou les pseudo vérités. Le français sonne comme du cristal, l’anglais comme une cornemuse.
Mais qu’importe puisque jadis, c’était le peuple qui « inventait » la langue, alors qu’aujourd’hui, il la défait.
Dépassé par les mots techniques, élaborant hâtivement des mots d’académie afin de suppléer au désert qui s’installe, alors qu’il devrait sortir spontanément de la foule comme jadis, le français s’avilit à cause de tous ceux qui le pratique de la même manière que l’anglais, y incorporant sans les assimiler des mots étrangers, amalgamant les cultures de façon hâtive et sans précaution. Ce n’est plus le français qui lie et ennoblit les apports, mais les apports qui diluent l’esprit français dans une sorte de brouet adaptable au temps, certes, mais sans l’élégance de jadis…
Seuls les Canadiens du Québec se défendent bien devant l’ogre qui est passé de l’anglais à l’américain pour mieux les étourdir avant de les anéantir, en innovant des répliques contre les afflux malséants qui les cernent. C’est à tel point que les Hexagonaux et j’y joins les Belges se moquent des Canadiens par l’effet de la bêtise de l’ignorant qui se moque de son maître. Nous ne comprenons plus nos frères exilés, non pas à cause de leur « terrible » accent, mais en raison de leur invention constante, de souche et de race françaises, ce que nous, les nouveaux bâtards ne savons plus faire.
La dernière et seule victoire est à la Pyrrhus et elle est belge.
Les Flamands qui du point de vue de la langue sont encore plus mal lotis que nous, s’évertuent depuis la frontière et les Lois linguistiques à sauver leur idiome. C’est un combat que nous n’avons pas su mener contre l’Anglais. En Flandre, nous faisons figure d’envahisseur et nous nous comportons vis-à-vis d’eux avec arrogance, comme l’Amerloque sur le pont de l’Alma, vis-à-vis du franchouillard avec béret basque et baguette de pain sous le bras. Malgré toutes les Lois, rien n’y fait. Au point que les Flamands ont fait pression pour arrêter les recensements linguistiques qui montreraient chiffres à l’appui l’inanité de leurs efforts.
Mais, ils ne désespèrent pas qu’un jour s’arrêtât l’hémorragie. Au moins eux, ils espèrent.
Nous n’espérons même plus, trop avachis sans doute, trop américanisés, trop anglo-saxonnisés par cinquante années de dévotion musicalo-technico-gadgeto-sportivo-manie.
Les classes à pognon l’ont compris depuis longtemps qui finiront par abandonner la langue maternelle pour prendre celle de leur compte en banque avec l’accent texan pour faire sérieux.
Alors, avant de monter à l’échafaud, juste un moment messieurs les Anglais. Please, before la norme Cambridge school n’attend pas… It only takes one minute to decide, mais pas avant une dernière entrée en piste... cocorico ultime de justesse avant la grippe aviaire du pigeon niché sur Big-Ben qui va emporter Fontenelle, Grevisse, Littré et même ce fou de La Châtre avec Saint-Simon et Flaubert dans les abysses de l’oubli… Ce dernier discours de l’universalité de la Langue française.
« Un des plus grands problèmes que l’on puisse proposer aux hommes est cette constance dans l’ordre régulier de notre langue. Serait-il vrai que par son caractère la nation française ait souverainement besoin de clarté ? La prose française se développe en marchant et se déroule avec grâce et noblesse. Sûre, sociable, raisonnable, ce n’est plus la langue française, c’est la langue humaine… Et c’est pourquoi les puissances l’ont appelées dans leurs traités ; elle y règne depuis les traités de Nimègue. La philosophie lasse de voir les hommes toujours divisés par les intérêts de la politique, se réjouit maintenant de les voir d’un bout à l’autre de la terre se former en république sous la domination d’une même langue ». Antoine Rivarol.
Voilà. C’est la fin. Rivarol, classé radotant de droite, s’est planté. Anatole France aussi, tous… Sartre aurait dû écrire son essai d’ontologie phénoménologique en anglais et Gide, dans les sables chaud du désert eût davantage excité les folliculaires s’il se fût décidé à conter comment il se fit enfiler par un chamelier, en langue berbère. On n’y peut rien. Les derniers lecteurs d’un français déjà approximatif qui est le mien, je l’avoue, le savent, les pommes sont cuites et, encore chaudes sur la langue. Elles aident à trouver l’accent d’Oxford, à moins qu’il ne soit préférable d’adopter celui du Juif new-yorkais, rapport au commerce …
Que Louis XV ait abandonné quelques arpents de neige à l’Anglais ou que Napoléon ait bradé la Louisiane pour des canons, ne nous fera pas plus chaud au cœur qu’entendre « nos espoirs » poètes avec quatre mots français et le reste en verlan arabe ou les nouveaux rappeurs dont les onomatopées couvrent mal les limites de l’art répétitif aussi assommant que les anglophones parisiens nous étourdissent de leur rock montmartrois.
Après tout l’anglais, c’est facile. On n’a qu’à penser le contraire du français pour se faire comprendre. Exemple : bit en anglais, c’est bien le sexe de la femme, non ?