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La reine avait une pierre fine à la main !

Des siècles qu’on se lamente… pourtant des périodes bien différentes… pleines de traverses et pas que de chemin de fer.
Depuis l’Antiquité, les péplums ne manquaient pas d’étoffe… pire que Victor Mature à souffrir de la Métro Goldwyn Mayer… de ces crucifixions d’esclaves paresseux, de ces barbares sacrifiés à des jeux cruels… Il est vrai, peu de sadiques dans les rues… suffisait d’aller au Colysée…
Le baron médiéval, au relais, s’est emparé du témoin. Ça s’est gâté beaucoup plus tard… quand le noble a laissé ses hardes en gage et Marie-Antoinette sur le carreau.

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Beau début des temps modernes, des Girondins rédigent les Droits de l’homme ce qui permet aux domestiques d’être appointés et à madame Roland d’être désappointée des mauvaises grâces du docteur Guillotin.
Depuis, les riches se sont repris… Ils ont gambergé, après qu’il s’en soit fallu d’une arche d’un des 300 ponts de Saint-Pétersbourg qu’ils ne gambergeassent en enfer. Les successeurs de Marx s’étaient mis à vouloir leur ressembler !
Voyez l’horreur des salaires fous… l’arrogance de Madame Sans-Gêne et le culot de Stavisky... quand les besogneux pouvaient compter sur Staline !
Heureusement après les Rouges, les riches se sont refait une santé. Le malheur, c’est qu’ils ont promis la semaine anglaise et l’électroménager, dans l’angoisse de ramasser la pâtée... Dame, on n’était plus tellement chauds pour coopérer… C’est la poule au pot et pas le panache blanc qui séduit les foules.
Ce n’était qu’une question de vocabulaire. Les esclaves sont devenus des salariés. Le bon plaisir est allé aux chiottes, remplacé par des lois de protection des minorités très solvables (ce qui est la même chose)… et Marinette qui ne s’appelle plus Nana a le cul désormais négociable.
Pourtant le bon peuple grognait toujours.
Oh ! pas comme en 50 où la monarchie eut chaud aux fesses, pas comme en 60 où la belgitude était une insulte, pas comme en 68 quand des âmes fransquillonnes nous exhortèrent à raser la cathédrale Saint-Lambert, heureusement que cela avait été fait… mais comme dans la décennie 90 où par mimétisme les pauvres se sont mis – modestement – à vouloir ressembler aux riches.
Là, il y eut un flottement. A quoi servirait la richesse si tout le monde l’avait ?
- Ecoute Fernand dit Nadine, tu sais bien qu’Hermès peut pas faire des sacs pour toutes les femmes… à la limite, des godes made in Hongkong… mais Cartier qui solde la quincaille et Fauchon au Caviar démarqué, ce n’est pas sérieux.
- Oui, répliqua le vieux dab, mais si les pauvres s’en aperçoivent, peut-être bien que certains ambitieux voudront prendre notre place !
Ils consultèrent polytechnique !
Redoutable polytechnique… Eux qui ne pensent jamais, sauf quand une idée passe, quand Ségala phosphore, quand Tapie évoque, quand Zizou marque… alors, c’est le flash.
Fernand se plaisait trop à rechercher les sources du bonheur. Il mourut sous une cloche qui avait quitté sa poutre.
Après les discours aux funérailles nationales, les polytechniciens s’adressèrent à Edmond. Nadine les avait précédés dans le lit à colonnes du ci-devant.
- Livrons aux foules la recette du bonheur, vrombit l’affolante créature ! L’art d’être heureux avec la téloche en vade-mecum, poursuivit la vierge des secondes mains, ça calme… ça peut même rapporter…
- Pourquoi pas, dit Edmond. Jouons la carte du bonheur !
Antoine cherchait le bonheur dans l’amour, Brutus, dans la gloire, César, dans le pouvoir. Le premier trouva l’ignominie, le second, le dégoût, le dernier, l’ingratitude…
Le peuple cherche de nouvelles idoles : les Star Ac, les lofts, les loteries, les « qui veut gagner des millions », les grands chapiteaux seront nos terrains d’aventure… les informations ne seront plus que du rêve… Pavarotti, papa à 68 ans… la Clotilde Courau, duchesse de Savoie… Demie Moore qui agace un minet de 25 ans… Bebel à 70 ans qui insémine Natty, seul et sans seringue en triomphant de son hémiplégie… Elodie qui devient star avec une garde-robe du X… Sharon qui à 45 ans surmonte son hémorragie cérébrale en tête bêche avec un romantique dans la trentaine vigoureuse… sans compter les nuits dans le lit des Beckam… pour qui répondra à la question subsidiaire : « Le plaisir solitaire ne l’est plus, dès que je tourne le bouton du poste, pourquoi ? » Téléphone à 50 cents la minute. Réponse : parce que j’ai l’esprit Tintin !
Arthur cherchait le bonheur dans l’amour, Brutus Lagaf, dans la gloire, Jean-Pierre Pernaut, dans le pouvoir et le peuple dans le travail. Le premier trouva du fric, le second du fric, le troisième, pareil… Y a que le peuple qui n’aurait trouvé que le travail sous le travail, sans Tintin, mais avec Vande Putte au palonnier…
C’est ainsi que cette décennie de fichue allait nous mener aux années de bonheur !... Aux années Tintin…
Edmond se réserva la partie comptable.
Il donna des gages. Les riches partagent avec les politiques les promesses libérales…En contrepartie, il fut convenu de ne pas changer l’ordre des choses. Edmond pour toujours…
Le programme est en bonne voie. Les syndicats n’existent plus. Les partis se ressemblent comme deux liasses de cent euros. Les chômeurs s’opposent aux temps partiels et les temps partiels aux titulaires. Les vieux privés de retraite sortent leurs bas de laine de sous leurs albums de Tintin. Les malades et les handicapés proposent qu’on les élimine.
Ailleurs, ils n’ont pas notre bonheur. Des gaillards se font sauter les tripes à la tronçonneuse. Les murs des lamentations se multiplient. Enfin le sosie d’Adolf Hitler a demandé à Madonna de tourner un « hommage » à Eva Braun aux noms des Ligues féminines pour la réhabilitation de la femme allemande !
Nadine a demandé et obtenu le rayon beauté.
Désormais au-dessus de 50 kilos une femme n’est qu’un tas de graisse. Son statut est certes identique à celui de l’homme, dans la mesure où elle va bosser à moitié prix sur des emplois que les hommes ne veulent pas. On reconnaît le viol comme une infamie, mais coucher utile est une nécessité. Enfin, relookée par la 2, elle ne pourra pas se plaindre si son mec préfère les blondes.
Le polytechnicien a été chargé de la formule : Ayons l’esprit Tintin !
Soyons de Moulinsart, hadockien, castafiorien. Vive Hergé, nom de dieu !
On est heureux.
Voilà vingt ans de commémos en perspective, de ces discours bien sentis… de la force vive en boîte de douze !
Une pétition circule pour que les hommes politiques se succèdent à eux-mêmes. Chez eux, vu l’état de Jean-Paul, leur leader, l’âge de la retraite a été supprimé. Seuls seront remplacés ceux qui auront disparu. Et encore. C’est le propre des grands hommes d’être irremplaçables, malgré les cimetières dont on dit qu’ils en sont pleins..
Edmond et Nadine se portent bien. Elle a déjà enterré trois générations de pékinois… Faites le compte, ces petites bêtes là vivent jusqu’à vingt ans !
Le couple veut tout abandonner… plus tard… à leur mort. Tout reviendra à la collectivité.
C’est une question de temps, de patience… Mais le bonheur d’aujourd’hui ne sera complet qu’à leur trépas. Ils le savent. Ils s’en excusent. Ils y travaillent au don Perignon, ils se finissent aux truffes et foie gras…
A 70 ans Nadine s’est fait refaire les seins. Edmond a de la merde au fond du caleçon… C’est en cela qu’il se sent proche des gens…
Nadine mettra aux enchères ses poils du pubis, Edmond ses bouts de Havane. La somme sera versée à leur fondation « La bite à Fernand », une association qui soigne des marins manchots dont un cal dans l’unique main les rend impropres à la masturbation à l’hôpital où Nadine les visite déguisée en infirmière
Le bonheur… quoi ! Le bonheur.

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