Sexe, littérature et complexe de la chaisière...
Les pisse-vinaigre seffacent parfois devant le talent dun auteur parce quil est connu ailleurs que dans lérotisme.
Si lœuvre « indigne » est dune facture insignifiante, de crainte de passer pour un imbécile, le contempteur des mœurs sécrase encore.
«Les Onze mille verges ou les Amours dun Hospodar » de Guillaume Apollinaire, paru en 1907, est un insupportable rabâchage fort en dessous de la qualité de lart poétique de Guillaume. Mais, cest Apollinaire et le censeur ignare se tait.
« Les 120 journées de Sodome » de Donatien Alphonse François de Sade est peut-être dans sa diffusion une œuvre qui aura été le plus longtemps sous le boisseau, en tous cas, remisée sur la dernière planche du dessus des bibliothèques, jusquà sa parution en 10/18. A la différence du précédent, le lecteur ne voit plus loutrance et le boursouflé, reste lémotion érotique que lœuvre dégage. Et cela, les milieux conservateurs chrétiens ne lont jamais supporté. Gilbert Lély, mort en 85, a remis les fâcheux dans leur coin à propos de Sade.
Lédition « Mort à Crédit » de Louis-Ferdinand Céline jusquaux rééditions des années 60 comportait de larges extraits « omis » par léditeur sur Conseil de la Préfecture, notamment lapprentissage chez le bijoutier Gorloge. Lédition actuelle en Folio a eu raison de cette pudibonderie.
Céline est incontestablement un des auteurs majeurs du siècle dernier. Son « érotisme » nest en rien la base de son œuvre, évidemment. Je le cite à propos des coupures stupides.
La porte parmi nos contemporains semblerait ouverte à une approche moins contractée des œuvres érotiques, sil ny avait tant de mauvais goût. Paradoxalement, cest dans la diffusion dimages que les détracteurs puisent des arguments pour conforter leur mépris des textes !
Heureusement, la liberté du choix est laissée aux lecteurs. La déferlante de la vulgarité et de lobscénité répond sans doute à des appétits de lecture que chacun appréciera selon sa propre nature et sa propre culture.
Sous prétexte que les quotidiens sont distribués à tous les publics, ils paraissent bien collets montés ! Quant aux photos, les magazines ciné ont contribué – parfois avec excès et souvent mauvais goût – à vulgariser des images de sexe plus que les publications X.
Les aigris de la prostate et des Fabriques déglise ont renoncé à expurger les fonds de librairie de toute « souillure ».
Quelques textes étonnants ne sont pas connus et mériteraient de lêtre chez certains auteurs du passé dont on a oublié la verdeur.
Cest ainsi que dans les XIX volumes du Journal Littéraire de Paul Léautaud, il y a des passages savoureux qui résultent de sa liaison avec madame de Cayssac, quil appelle le Fléau ou la Panthère. Aucun étudiant en Littérature contemporaine ne saurait se passer de cette lecture.
A côté de grands morceaux comme lenterrement dApollinaire ou la fin de Rémy de Gourmont, le lecteur entre dans la liaison de lécrivain avec « la panthère » quil a connue dans la rue à nourrir les chats errants. Il lui fit lamour pour la première fois au Mercure de France, dans son bureau à côté de celui de Valette, directeur.
Marie Dormoy, directrice de la Bibliothèque Doucet, a travaillé jusquà sa mort à la mise en ordre des papiers de Léautaud. Ainsi, il y a eu des addendum à ce Journal et notamment les quelques lignes qui vont suivre qui sont dune bonne observation, lors même quils ont été plus dicté par limaginaire, que par le vécu..
Je les donne de crainte davoir été pédant et emmerdant. Et ceux qui auront tenu le coup jusquau bout se rendront compte de ce quest un genre littéraire si particulier quon ose à peine aujourdhui en dresser linventaire.
Paul Léautaud, Journal particulier 1933, in Mercure de France, 1986.
Sans date (dossier 1932)
« Le fléau est si jolie et a le visage si plein de plaisir quand elle suce une queue ou quelle se fait enfiler que jai voulu jouir du tableau en spectateur. (1)
Dautant plus que je nai jamais été de ces hommes qui doublent ou même triplent dans les parties et je voulais moffrir ce régal par un autre.
Un joli garçon, dix-huit ans, ni trop ingénu ni trop dégourdi que je lui ai amené « Tu vas voir, il a une jolie pine. Pas à lenvers comme la mienne, trop grosse de bout. Non. Un bon morceau, bien effilé et dun bon calibre après. » Elle na pas été longue à la sortir du pantalon du jeune homme et à la lui manier comme elle sait, tantôt à rebrousse-poil, tantôt le décalottant en plein, tantôt lui pétrissant le gland entre ses doigts, lautre main lui pelotant les couilles.
« Le manège était si agréable quau bout de cinq minutes le petit jeune homme ne pouvant plus se contenir, lui lâche son foutre dans la main. « Ah ! non, dit-elle. Ce nest pas de jeu. Pas si vite. Cest donc si bon que ça ? Et moi, alors, quest-ce que jaurai ?
Allez, venez-là, petit salaud. Couchez-vous là. Mettez votre paquet à lair. Vous nêtes pas si à plaindre. On vous a branlé et on va vous sucer. Et vous tirerez encore un coup après, si vous voulez. Quest-ce quil vous faut de plus ? » Elle le fait sétendre sur le lit, tout le paquet bien à lair, et à genoux à côté de lui, se met à se régaler d‘un suçage en règle, la bouche allant et venant, sa salive dégoulinant tout le long du membre.
« Heureux jeune homme ! Le voilà qui se met à décharger une deuxième fois en plein dans la bouche du Fléau, tout heureuse du résultat et le visage pétillant de vice. « Ça a marché ? lui demande-t-elle. Cétait bon ? Je le crois, hein ? Petit cochon, il en a un foutre ! Vous vous souviendrez de la salope. Je crois que cest à mon tour maintenant. Ça coule joliment, vous savez. Il y a de quoi lécher. Allez ! vous allez vous offrir ça. » Elle sétend à son tour sur le lit, tout le cul à lair, le con tout juteux, le foutre lui dégoulinant le long des cuisses.
« Quest-ce qui va nettoyer ça ? dit-elle. Et vivement. Je ne peux plus attendre. Qui me bouffe le con ? »
« Je métais réservé cela et je me mis à lui faire une minette complète, qui la fit bientôt décharger, un foutre épais comme celui dun homme. Il fallut alors la laisser un moment à sa langueur. Au bout de quelques minutes, sadressant au petit jeune homme : « Eh bien ! vous navez pas envie dentrer là-dedans. Vous ne bandez plus ! Allez ! arrivez. Je vais vous faire bander, moi ! »- et elle se met en pose, bien calée sur le lit, les cuisses larges écartées, tout son con prêt dont elle écartait les lèvres avec les doigts.
« Il monte sur le lit, sétend sur elle, elle lui manie un peu la queue, et quand il est à point : « Allez ! Oh ! le salaud, je vais encore décharger. Vas, vas. Oh ! cest tout de même rudement bon une pine. Et pour toi ? Cest pas bon ? Tenez ! Le voilà déjà qui pisse son foutre. Frotte encore, encore. Là, là… oh ! oh ! Ça y est, ça y est, salaud ; tu sens si ça coule. Oh !... Oh !... »
Bien malin qui saurait dire où est la frontière entre érotisme et pornographie. La plupart des bégueules diront que Léautaud, qui admirait tant Stendhal, est un pornographe à la seule lecture de ce texte.
Jai une définition qui ne vaut que pour moi. Un texte pornographique est un texte qui est tout simplement mal écrit.
Quant à savoir si « Des histoires de lœil » de Georges Bataille est la limite à ne pas franchir pour rester dans lérotisme ou traduits de lItalien certains contes de Gabriel dAnnunzio, tel « Bestialité »… cest affaire de spécialiste.
Autant Henry Miller est flamboyant et plein de vie lorsquil parle de NY, du Village et de June, cette merveilleuse créature que tout homme censé aurait voulu connaître… autant Anaïs Nin napporte rien à la littérature érotique (avis personnel). LHistoire dO fut longtemps considéré comme le meilleur roman érotique du milieu du siècle passé. Le mystère qui entourait son auteur (Pauline Réage, alias Dominique Aury) nen est plus un. Quant aux trio Rochefort, Desforges, Breyat, je mets 5 ½ dans la marge.
Ceci na rien dune anthologie.
Ces auteurs me viennent à lesprit. Il est évident quil y en a des centaines dautres et parfois de bien meilleurs.
1. Le voyeur est rémanent dans lœuvre érotique. Cest la série des « Nicolas » de Restif de la Bretonne, des « Liaisons dangereuse » de Choderlos de Laclos où le voyeurisme est épistolaire, etc.