Jacques Ségala, quas-tu fait de nous ?
On le voit bien chaque dimanche, dès que le plateau de la télévision rassemble des hommes et des femmes connus de la politique, une guerre sinstalle, les hommes couvrant les voix des femmes, avant de sengueuler entre eux.
Lautre dimanche, cétait Duquesne qui défendait Ducarme, suite à la révélation de la dette de lex ministre président de lentité bruxelloise aux Recettes des Contributions.
Dès quon touchait ce sujet sensible, Duquesne coupait de sa voix de choriste tout qui avait loutrecuidance de critiquer son compère.
Ramené à plus de fair-play par le présentateur, son silence passait alors pour la mauvaise conscience du beau parleur.
Cétait à la fois grotesque et pathétique.
Si la poésie, cest le temps durant lequel un homme oublie quil va mourir, la politique, cest le temps durant lequel un homme oublie quil na pas toujours raison.
Ce débat prenait soudain lallure dun affrontement électoral où chacun a en tête de ne pas perdre la face.
Si les Représentants du peuple reflètent leur électorat, bon sang ! comme lélectorat libéral est vulgaire, entaché de linstinct le plus bas et des motivations les plus sordides.
Ce nétait pas tant le visage cadré par la caméra qui était intéressant, mais les expressions tour à tour indignées ou goguenardes des autres.
Décidément, la représentation théâtrale qui est toujours de mise en politique na pas suivi lévolution dun jeu davantage centré sur la sincérité de nos acteurs modernes. Duquesne jouait comme Mounet Sully en 1900. Un bon point cependant pour les dames, lespoir viendra delles que lon débatte un jour autrement.
Le souvenir dune lettre de Flaubert à Louise Colet me vint à lesprit : « De toute la politique, il ny a quune chose que je comprenne, cest lémeute. Fataliste comme un Turc, je crois que tout ce que nous pouvons faire pour le progrès de lhumanité ou rien, cest la même chose. »
Et puis le débat méchappa.
Duquesne naurait pas dû défendre lindéfendable. Il était là, parce quil avait jugé quà quatre mois des élections, cest toujours bon de montrer sa binette.
Cest une erreur.
Si javais eu la moindre velléité de voter libéral avant lémission. Jaurais perdu au fil des minutes lenvie de pousser un bulletin MR dans la boîte à mirages.
La société ne vaut que par la qualité moyenne des médiocres qui la composent. Sen soustraire, devient une question essentielle.
Vraiment, comme la écrit Horkheimer il y a plus dun demi siècle, les idées sont devenues, des réclames… ce nest plus lesprit qui souffle, mais la publicité.
Jacques Ségala, quas-tu fait de nous ?