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Un chômeur exemplaire...

- Tu fous ?
- J’suis au chômedu.
- Depuis ?
- Depuis qu’Imprim’tout a mis la clé sous le paillasson… le dirlot s’aère en Suisse… les autres sont devenus clodos.
- T’y foutais quoi ?
- J’étais sur un bazar qu’est devenu songerie au musée… linotype… brontosaure façon poète d’aujourd’hui dans le registre épithète laborieuse…
- C’est-y-quoi ?
- On sait plus de nos jours. Un machin de maréchal-ferrant de l’alphabet.
- Donc, ça pourrait revenir !
- T’as déjà vu qu’on revenait au lance-pierre, quand on a un flingue dans la pogne ?
- T’es peinard à la pointeuse ?
- Tu penses. Voilà-t-y pas qu’i’ faut que je fournisse des preuves de ma recherche constante et fiévreuse d’un travail !
- Des preuves ? T’as buté l’employée de la FGTB ? T’as envoyé Bodson se faire parachuter ailleurs ?
- Non. C’est une nouvelle manière de nous emmerder… On touche trop. On gène la bonne statistique… La FGTB n’est pas dans le coup… d’ailleurs, elle est plus dans le coup pour rien !
- Tu cherches pas ?
- Voilà vingt piges que je cherche.
- T’as des traces ? Un courrier ? Si c’est le cas, t’es bonard !
- Pas dit, ma couille, pas dit…
- Comment, t’as fait que de l’oral ?
- Non. Mais faut me comprendre. J’ai plus de spécialisation, vu que la linotype, c’est une sorte de zombie mécanique du grenier de la poésie d’Amay… Alors, j’ai voulu me diversifier… me répandre dans le business, faire comme à la FEB…
- Alors ?
- Ma première idée ça a été le lobbying. T’as lu dans le journal qu’on publie les noms aujourd’hui de ceux qu’ont touché de Saddam pour promouvoir l’idée du pétrole contre de la nourriture du temps où l’ONU sortait le dictateur fou de l’embargo amerloque.
- Oui…
- Pas que des loquedus qu’ont touché en Belgique. D’ici à ce qu’on publie des noms… Enfin, à l’époque, je me suis dit que je pourrais gagner vite fait des pèpettes aussi. Voilà un job dans mes cordes ! J’ai écrit à Saddam pour me mettre sur les rangs…
- Mais tu vends pas du pétrole, t’en achètes pas… T’as plus de bagnole !...
- Et ma lampe tempête, quand i’ m’ont coupé le jus et que j’avais même plus une 60 watt pour aller aux WC ? J’ai eu besoin de pétrole, moi, tu peux le dire…
- Qu’est-ce qu’i’ t’a répondu ?
- Rien. Pas de réponse… C’est grossier ça…
- T’as pas fait que ça ?

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- Non. Quand j’ai appris que Nihoul avait touché de la gendarmerie 10.000 pilules d’Ectasie pour les rancarder sur Dutroux et Lelièvre, je me suis dit que le métier de balance – quoique déshonorant – pouvait empêcher un homme de crever de faim. J’ai écrit au général du chose quand gendarme voulait encore dire police. Je me serais contenté de 1000 pilules.
- Je parie qu’i’ t’ont pas répondu non plus.
- Non. Mais depuis et jusqu’à la réforme des polices, i’n’ont fait que m’emmerder.
- Faut croire qu’avaient que ça à foutre ?
-Faut croire.
- Puis j’ai écrit à Laurette qu’a vu tous les ministères, pour savoir lequel était le plus pèpère. Je voulais postuler. Quand tu vois les pieds-plats que c’est… Le blé qu’ils se font ! Qu’en plus, i’ paient pas leurs impôts…
- T’es sérieux ?
- Comme je te dis.
- Elle, elle répond toujours.
- Pas un pet, qu’elle m’a fait, rien. J’ai eu droit qu’à la circulaire… que j’allais souffrir si je trouvais pas une combine pour glisser hors de la statistique chômage. Je me suis rancardé. Paraît que ministre, c’est comme qui dirait une affaire de famille. Ils appellent ça la démocratie héréditaire. T’es le fils machin, la belle-doche d’un président, le neveu d’un pilier, t’as droit à des égards. Si tu sais signer sans faire une faute dans ton nom, t’as des chances d’émarger… Les autres peuvent aller se branler…

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- T’as quand même fait des efforts…
- Pas les bons. Ça les branche pas mes combines.
- Tu vas faire quoi quand tu seras sans un ?
- Délinquant. Faudra bien…
- Quelle délinquance ?
- Tu sais, je suis un modeste. Les vols, les crimes… pas bons pour moi.
- A quoi t’as pensé ?
- J’ai pensé m’inscrire patron-failli. J’avais pas de références, pas de casier, rien ! A la FEB ils ne prennent que la crème… Faut au moins 50 ouvriers sur le carreau pour prétendre au « Patron de choc de l’année ». Me v’la mancheux-artiste. Tu vois sans jouer d’instrument, je passe à la grosse caisse, Krishna à l’occasion, j’ai une petite qui me refile les tablettes de chocolat avarié qu’elle ramasse dans les poubelles des supers, une autre qui me file un peu de blé quand un généreux lui laisse un pourliche pour une pipe qui va lui faire des souvenirs…
- T’es mac ?
- Qu’est-ce que tu vas chercher là ! Je les fais rire. C’est pas tous les jours à Liège…
- C’est pas des solutions, ça… Faut aller au turbin honnête…sinon, tu vas finir crapule.
- Si tous les gars qu’ont pas des turbins honnêtes tombaient dans la crapule, t’aurais plus que des délinquants côté Rond-point Schumann et rue de la Loi….

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