La justice en question.
Il est bien révolu le temps où les magistrats condamnaient ou, plus rarement, absolvaient de manière souveraine et sans contestation possible.
Jadis se retrouvaient en cage innocents et coupables, les premiers, même absolument innocentés, restaient leur vie durant suspects par une justice qui ne reconnaissait pas ses erreurs et par le public qui pensait quil ny a pas de fumée sans feu.
Le malheureux mourait dans lopprobre générale sans que son innocence fût autre chose dans leffort des Magistrats en sa faveur quune remise de peine ou une levée décrou à la sauvette.
Aujourdhui encore, la Justice ne répare jamais, ou très mal, les dégâts accomplis par des mauvais jugements.
Le pourrait-elle, quand elle a détruit une vie ?
On prend conscience que la vérité judiciaire est, loin sen faut, dêtre la vérité tout court.
La justice prompte à condamner, ne lest pas autant à réparer les préjudices quelle crée par ses erreurs. Si parfois elle en a lapparence, la justice nest le plus souvent quune caricature dans laquelle la confusion, le hasard et la mauvaise foi jouent les grands rôles.
On nous dit que les prisons sont pleines de gens qui sont en attente de leur procès.
Des recommandations du monde politique et des ministres de la Justice soulignent que la prison préventive doit être lexception, quelle ne se justifie quen cas de dangerosité du prévenu, de sa possible disparition ou de la nécessité pour les besoins de lenquête de le mettre à lécart dautres prévenus libres, de complices ou de témoins éventuels.
Il suffit de jeter un rapide coup dœil sur les statistiques pour voir comme les magistrats instructeurs se moquent des recommandations sous le prétexte de lindépendance de leur fonction. De sorte que de libre arbitre, on en arrive à larbitraire.
Cest cet arbitraire qui fait penser à la justice à deux vitesses, lune pour les riches et les politiques, rarement en tôle et pour les autres, toujours en tôle.
Laffaire de mœurs dOutreau, en France, où la mère violeuse de ses enfants a accusé de nombreuses personnes de la Commune de complicité de viols et de réseau pédophile, sest avérée un sac dembrouilles. Procureur et magistrats instructeurs sont tombés dans le panneau et ont accusés à tort des innocents.
Cela remet en question la fragilité des témoignages et le manichéisme de lopinion publique
auxquels le juge dinstruction sait difficilement résister. Il y a pourtant des règles comme instruire à charge et à décharge. Ce sont les enquêteurs, entraînés eux-mêmes par leur conviction profonde qui par leurs rapports et les aveux quils arrachent – souvent de manière tout à fait illégale et arbitraire – influencent et orientent le juge dinstruction.
On a vu en Belgique avec le procès Dutroux ressortir la grande faiblesse de la justice au niveau de la qualité des hommes quelle emploie.
La Commission parlementaire qua provoqué cette affaire, a souligné ce que le public savait déjà : incompétence quasiment générale des services de police et de gendarmerie à lépoque rivaux, incompétence à force de secrets et dentêtements imbéciles et incompétence au niveau des hommes. On pourrait presque en dire autant des magistrats, sauf quà leur décharge, les procédures en Belgique sont telles quils sont accablés de travail et quil conviendrait den augmenter le nombre, en même temps qualléger les procédures.
Le public nest pas là pour faire le boulot des politiques. Hélas ! le public nest là que pour fournir le gibier de potence. Ce quil prend de plus en plus mal.
Aujourdhui, à tous les niveaux, la machine judiciaire est débordée. La religion de laveu est battue en brèche. La magistrature redescendue de son piédestal quon lui construisait jadis dans des palais imités de lantique, est vue telle quelle est : des fonctionnaires comme les autres avec le pouvoir de nuire ou de bien juger, des fonctionnaires avec leur plan de carrière, les intrigues et les convictions politiques.
Le public en a assez de gravir les marches interminables des hauts repères, non pas comme on gravit les marches à Cannes pour le festival, plein despoir et de séduction, mais accablé à lavance, coupable ou innocent, happé par la machine.
Au lieu doffrir des promotions aux magistrats et aux policiers qui ont commis de lourdes fautes, on devrait instaurer une Cour spéciale comme il y a une police des polices, afin déliminer les incapables et de faire voir ce quest la tôle aux corrompus.
LAncien Régime est mort en 1789. Pas pour tout le monde.
Il serait temps de faire le ménage.
Là où lAutorité nest pas digne, juste et honnête, conduite par des gens intègres. Elle nest plus quun simulacre.