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Gare d’Anvers

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Etrange gare d’Anvers. L’intérieur a des allures de cathédrale, et, s’il n’était question d’une architecture « néo renaissance », on se croirait dans le hall d’un airbus.
Conçue pour les locomotives à vapeur, la hauteur de plafond impressionne. Elle permettait au soufre et à la braise de diluer leurs fumées dans son immensité.
Sous ce pont de navire amiral : Pelikanstraat. Lorsque la gare vit le jour, les fastes ferroviaires contrastaient avec la modestie des étalages qu’elle couvait comme des poussins...
Des artisans joailliers dans des bijouteries miniatures font de la ville avec leurs coreligionnaires tailleurs, un centre diamantaire unique au monde.
Gare terminus, les trains y meurent sur les butoirs pour repartir d’où ils sont venus, dans un va-et-vient animés des conducteurs et des contrôleurs qui s’interpellent dans ce patois anversois aux voyelles traînantes.
Les yeux s’habituent au demi-jour. On ne sait après quelques quarts d’heure d’attente si dehors le soleil persiste ou si c’est déjà la nuit.
Cet éclairage rend les femmes mystérieuses. On les entend parler entre elles sans que les syllabes se détachent, dans un bruit de ruche bourdonnante. On se croit envahi par des millions d’insectes, couverts à intervalles par la troupe claironnante de quelques dizaines de scouts. La musique devient d’une familière monotonie, celle qu’un apiculteur entend devant ses ruches.

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Le mouvement sans cesse renouvelé des dizaines de nouveaux passagers, crée la sensation d’un bord de mer battu par le flux puis dénudé par le reflux.
On pense au Cid de Corneille : Le flux les apporta, le reflux les emporte.
Des haut-parleurs descend une voix surmultipliée qui ressemble aux voix anonymes de toutes les gares. Il faut tendre l’oreille et être au fait de la langue pour saisir entre deux borborygmes l’information qui vous fera monter dans une des trois premières voitures du convoi, les autres allant ailleurs au gré de la fantaisie de curieux horaires, dont Jean Carmet aurait fait ses délices.
Parallèles aux voies court une banquette unique sur laquelle plus de cent voyageurs sont à l’aise. Ma voisine mange un en-cas, les yeux dans le vague. Une mastication lente, seule l’occupe. Elle n’est pas pressée. Sans doute devra-t-elle attendre longtemps son omnibus.

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Une demie heure auparavant, je l’avais photographiée sur le boulevard assise au bord d’une fontaine s’arrangeant les cheveux qu’un aigle faisait mine de picorer… Je trouvais belle l’allégorie.
C’est bête. On reste à ne se rien dire. Peut-être aurait-elle aimé comme moi échanger quelques mots ? Cette intimité-là, toute relative, ne s’acquiert que dans le wagon qui peut se comparer à un salon.
On s’étonne malgré cette pudeur qu’ont les gens d’ignorer les autres, de la formation des couples. Cela reste un mystère.
Mais voilà que son regard inquiet s’arrête au tableau électronique qui annonce les départs. En un instant, les reliefs de son repas disparaissent dans les profondeurs de son sac. Elle se lève et passe devant moi. Juste le temps de saisir au passage l’élégance d’un pantalon fort ajusté, ma foi, et elle se perd dans la foule.
C’est dommage, cette proximité devenait familière. Et sans qu’elle en eût dit le moindre mot, l’homogénéité apparente de notre « couple » rassurait des autres. Un peu comme les timides qui doivent affronter le regard des gens installés aux terrasses des cafés, avant de faire nombre avec les attablés, tant coûte le premier pas.
Nous luttions ensemble sans l’exprimer contre l’anonymat écrasant d’une gare. Nous étions deux partants qui ressentions seulement une angoisse intérieure masquée par l’apparence d’un visage sans expression.

Commentaires

je soui un jeun homme je rechrche une femme pour marey

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