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Liège, à la plonge gauloise.

Le village gaulois, d’accord. C’est l’occasion de boire un verre.
Le village de Noël, pourquoi pas ? C’est l’occasion d’acheter des bougies.
Et de village en village, de braderie en braderie, de foire en foire, les commerçants squattent les rues et les places.
La ville de Liège, qui manque d’animation après 20 heures, prend ainsi des allures de souk et accuse le syndrome de la casbah.
Car enfin à l’heure où se termine, place Saint-Lambert, le complexe du Grand Bazar, à quoi bon multiplier les petits ?
Le prétexte culturel est plus que mince, celui plus festif de la guindaille, évident.
On pourrait y voir aussi dans ces animations de quartier une façon détournée de concurrencer les « Night shop ».
C’est bien encore un trait d’hypocrisie que d’autoriser sur le pavé des ventes qui intra muros contreviendraient à la période de fermeture obligatoire et à la prestation réglementée du personnel des grands magasins.
Traditions gauloises est le thème de la Place Saint Paul, ces jours-ci.
De quoi parle-t-on ? Quelles sont les traditions gauloises ?
Avec des bières allemandes et des saucissons italiens, cela a plutôt l’air d’une plaisanterie.
Si c’est aussi délectable de se promener entre deux rangées de cabanes de jardin, pourquoi ne pas pousser la logique et faire des places et des rues ciblées une foire permanente ?
On fait confiance à l’inventivité de la Violette pour trouver les thèmes. Foires et marchés défileraient au pas cadencé.
Village de la rentrée des classes en septembre, avec Bernard Pivot invité d’honneur ;
Foire d’octobre, elle serait partout où peut se nicher un manège hors du boulevard d’Avroy, pourquoi pas un guignol dans le cour du Palais ? Il y a des connaisseurs à proximité ;
Village des morts à la Toussaint avec invitation de sociétés mexicaines honorant les défunts, têtes de mort en massepain et vers mangeables sur des viscères en nougatine ;
évidemment, le Village de Noël pour la soudure.
On commencerait la nouvelle année par la Foire de la Chandeleur, avec crêpes et traditions ardennaises ;
A la Saint-Jean, on mettrait le feu aux vieilles baraques avec démonstration du service incendie.

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Village du poisson d’avril serait consacré aux farces et attrapes ainsi qu’au matériel de pêche ; Foire du Travail en mai, avec le concours des syndicats, la place Saint-Paul va de soi, et embauche surprise de l’ONEM de qui réunirait le plus de capsules de Stella…
Les idées ne manquent pas.
Il suffirait d’un petit discours de-ci, de-là pour la connotation culturelle…
La Ville abonde d’échevins au laïus fleuri. Mme Maggy Yerna, échevine du développement économique et du commerce, que des gros jaloux n’ont pas invitée à l’inaugurations des baraquements gaulois, a plutôt de la planche…
Les discours d’ouverture, aux heures creuses pour ne pas gêner le commerce, réuniraient comme partout, les trois ou quatre habitués des forces-vives.
Les chroniqueurs se feraient aimables en guettant le retour de l’ascenseur. Eh oui ! Ce n’est pas qu’une litote. On connaît l’esprit d’entreprise des Liégeois. Des étages seraient construits, les ascenseurs seraient nécessaires pour les handicapés et les obèses…
Ainsi Liège vivrait toute l’année aux sons des fifres et des tambourins. La danse des canards et la Pêche aux moules alterneraient avec le Valeureux liégeois.
Le choc des boules de pétanque n’aurait d’égal que le bruit du pétillant jaillissant des bouteilles. Tout le monde se croirait de l’esprit. Les vols à la roulotte facilités permettraient aux marginaux de moins souffrir de frustration.
Les marchands dormiraient en logette afin de veiller sur leur fonds de commerce. Cela demanderait de la surveillance. Des inspecteurs de police seraient engagés.
Chose appréciable, les commerçants cossus de la périphérie, sédentarisés, adopteraient la citoyenneté liégeoise, ce qui ferait passer la ville au-dessus de la barre fatidique des 200.000. La Cité ardente, de petit bourg, redeviendrait la ville la plus peuplée de Wallonie, au grand dam des Carolorégiens.
Enfin, le destin précaire des malchanceux, prendrait un autre cours par l’exemple de la bourgeoisie de négoces, vivant à la dure, sous le roofing de la précarité.
Cette nouvelle ville au sein de l’ancienne accueillerait ce que nous avons en nous de dérisoire et d’inachevé. Notre imagination si souvent contingentée par les ukases de l’urbanisme retrouverait le chemin de l’inventivité moyenâgeuse.
Peu à peu avec les fontaines sauvages, les WC de fortune, les roulantes de campagne et les dégueulis d’ivrogne, Liège renouerait avec sa légende des petits métiers que nos bardes diplômés d’Histoire chantent encore d’une voix mouillée de nostalgie.
On retrouverait les traditions, les allumeurs de réverbère, nos marchandes de « cûte è peûre » et nos hardies péripatéticiennes qui volaient les couvre-chefs des passants pour qu’ils les pénétrassent. Les cabanes ont exactement le même espace que les réduits où de joyeux proxénètes confinent leurs marmites rue du Champion. Elles s’y trouveraient à l’aise.
L’harmonie générale serait complète comme au temps de la Paix de Fexhe.
Tchantchès reprendrait les couleurs qu’il a perdues depuis qu’on le voit trop souvent manger à la table des Grands.
Il ne resterait plus qu’à exhumer Léonard Defrance qui mit à bas la cathédrale Saint-Lambert afin de parachever son œuvre et retrouver les sols souillés par les bétonneurs à la Maurice Destenay, pour y investir, entre deux villages gaulois, notre archéoforum.
Qu’on y pense !

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