La nouvelle vague.
Il y a dans lexploitation médiatique du malheur des autres le pire et le meilleur.
Le meilleur, cest lunanimité autour du concept « il faut faire quelque chose » et la conscience que lhumanité est une et indivisible. Mais, à cela manque une réflexion sur les impasses de lindividualisme libéral, ignorant le tiers monde dAsie avant le tsunami. Ne serait-il pas préférable de se soucier des gens avant le malheur, plutôt quaprès et seulement juste le temps de les oublier ?
Le messianisme occidental na jamais véritablement voulu sortir de la misère ceux sur lesquels nous nous apitoyons aujourdhui. Il y aurait fort à parier que si cette volonté avait existé, le sinistre naurait pas provoqué la mort de près de deux cent mille personnes.
Le pire, cest leffrayant constat que les médias peuvent dorénavant utiliser leur puissance pour des campagnes moins avouables.
On voit très bien comme la guerre dIrak a été suggérée à la middle class américaine après le 11 septembre noir en Amérique.
La répartition des subsides et des aides matérielles va certainement augmenter les inégalités des populations touchées. Le danger existe que largent et les produits soient détournés par des maffieux des zones meurtries, selon les mauvaises habitudes du capitalisme que nous avons propagées à tout lhémisphère Sud cumulées aux pratiques très anciennes du même genre sous ces climats.
La pression médiatique exercée depuis près de deux semaines ne faiblit pas, quoique le public se lasse de tout et particulièrement de la représentation du malheur.
On peut craindre que la déferlante de solidarité retombe quand elle ne sera plus sous la pression dune vision de lapocalypse. Quid des promesses de don, des élans de solidarité, des dévouements collectifs ?
On a vu dans le drame du génocide rwandais, qui fit, entre parenthèse, beaucoup plus de morts que le tsunami, ce que la prudence politique a pu étouffer de bonnes volontés et dactions humanitaires, puisquon y a même vu des soldats de lONU rester larme aux pieds tandis que des Tutsis étaient égorgés à cent mètres de leur camp !
Alors, ceux qui claironnent que la page est tournée et que lon va vers la grandmesse dune humanité réconciliée avec elle-même, peuvent garder leurs discours pour une autre fois.
Autant on assistait sans broncher à la boucherie au Rwanda – un pays qui nintéresse personne - autant lAsie suscite des convoitises. Les « débarquements » en force des Américains et des Européens ne sont pas toujours guidés par de nobles sentiments. Ce nest pas par hasard que larmée américaine a choisi ses terrains de sauvetage. Elle sest concentrée sur le plus grand pays musulman du monde, lIndonésie, dans lintention doffrir aux islamistes une autre image que celle quelle donne en Irak. Ses « humanitaires » sont truffés de membres de la CIA et il ne fait aucun doute quen se retirant, cette « délégation » laissera des relais pour le futur qui nauront rien à voir avec laltruisme.
Il viendra bien un jour où les news sessouffleront à force de repasser les images et les commentaires en boucle. On reparlera des nouvelles locales qui, pour la Belgique, sont dune gravité telle quon les qualifiait dinquiétantes avant la vogue de la vague asiatique.
Pour lheure le tsunami a procuré une trêve bienvenue à notre gouvernement.
Les médias ont oublié la crise larvée. Les responsables politiques se font photographier ahanant sous des sacs de riz. Les discours sentent bon les cœurs purs et lamour des autres. La « Dernière Heure » de ce samedi recense les femmes enceintes du gouvernement, cest dire lintérêt pour les « anciennes nouvelles » belges. Les occasionnels de laide humanitaire vident leurs fonds de grenier. Les gens du monde organisent des ventes de charité.
- Edouard, où avez-vous donc rangé le grand châle gris de ma tante que vous avez sauvé des mites ?
Les concours entre donateurs nous placent au premier rang devant le Japon, lAustralie et les USA. André Flahaut hante les états-majors, ses troupes et ses avions cargos, se laisse filmer avec une vedette de la chanson, bref, se défonce dans le nouveau rôle quil sest donné.
Le réveil sera brutal.
Le Vlaams Belang va-t-il entrer en irruption le premier, comme en 79, le Vésuve (Merci à M. pour la date). La pétition tendant à supprimer des subventions à ce parti aboutira-t-elle ?
On ne sait.
Les échéances se resserrent et si cette trêve, ajoutée à celle des confiseurs de chez nous, a permis aux responsables de surfer sur le tsunami, il faudra bien sécher ses larmes dans la perspective quil faudra en verser dautres prochainement sur le sort de notre malheureux pays.
Car enfin, les gens de la rue ne sont pas fous au point davoir oublié où nous en étions à la mi-décembre.
Il faudrait un croiseur de lespace fonçant sur la terre pour tirer cette fois Verhofstadt daffaire. Las ! les roches vagabondes, entre Mars et nous, sont détectées plusieurs années à lavance. Le gouvernement devrait trouver autre chose.
Par exemple, se recueillir dix jours daffilées Rond Point Schumann pour toutes les catastrophes passées dont nous nous sommes souciés comme dune guigne. Dix jours de silence, cest dix jours sans réponse aux questions que nous nous posons. Même au garde-à-vous, cest appréciable.