Une Belgique à la hauteur
A quoi les Belges réfléchissent-ils ?
Cest simple : à des débats du plus haut intérêt. Ceux dont les Hommes senorgueillissent.
Dépassé lenjeu de la Constitution européenne, si on ne vote pas, cest que nous sommes tous bien certains du politiquement correct de nos sorciers. Ils ont versé du sang de poulet et vu lavenir heureux du texte de Giscard. Les palabres et les urnes, ce sera pour demain et rien que du sérieux.
Par exemple : réglementer le commerce des mères porteuses… voilà qui fait débat. Dautant quavec la circulaire Bolkestein nous allons voir déferler les mères porteuses polonaises, vu que déjà on a leurs maris plombiers. Doit-on légaliser les mères porteuses ? Pourquoi pas un Congrès du PS pour trancher ? Après le flop de celui de Liège, unanime pour lEurope libérale, ce serait loccasion de se ressaisir. Di Rupo sen inquiète. Ses mères porteuses, en règle de cotisation à la FMSS, ne veulent pas limiter le portage comme le CDH le souhaite pour lovaire contrarié ou leunuchisme rédhibitoire. Joëlle Milquet veut bien porter, mais pas sans décharge ! Le MR parle des cas de grossesse nerveuse. Louis Michel, Commissaire de la Commission, se défend de vouloir faire à Reynders un enfant dans le dos.
La Dernière Heure a mené une enquête sur Internet. Le spectacle est jusque dans les résultats puisquon nous prévient quils seront spectaculaires.
Un autre débat majeur et qui retient lattention des foules belges : BHV et la dernière enquête de Johan Vande Lanotte sur la qualité des frigos francophones. Faudra-t-il un référendum sur la surgélation comme facteur politique ? Verhofstadt étudie un texte sur le zéro absolu.
Avec cette élévation de pensée, notre pays ne peut plus décevoir.
Afin de compenser leugénisme naturel que le tsunami de décembre a provoqué dans certaines régions du monde, la Libre Belgique publie les résultats dune enquête sur lactivité sexuelle des plus de 50 ans. Des septuagénaires de chez nous volent à la rescousse de la dépopulation côtière, en faisant don de leur sperme aux populations décimées, puisquils font encore lamour deux fois par mois en pure perte à leurs partenaires ménopausées.
La princesse Astrid, présidente de la Croix Rouge, veillera elle-même au recueillement de la précieuse semence et à sa cryogénisation, avant le transport par nos Hercules. Un Jet aurait été plus adéquat, mais le ministre de la défense manque dhumour ! Le sperme de nos glorieux septuagénaires sous microscope ressemblait à notre armée : beaucoup de cadres et peu deffectifs.
Répondant à cet effort intellectuel de sa consœur, La Dernière Heure publiait les résultats dune enquête réalisée en Hollande sur la durée de pénétration du mâle hollandais pendant lacte sexuel : 5 minutes 24 secondes, de moyenne.
Cette durée chez nos voisins inquiète nos parlementaires, toujours pressés. Une enquête est ouverte. Interrogées sur la question, les femmes hollandaises contestent ces chiffres trop élevés, selon elles. La durée réelle serait de 2 minutes 08 secondes ! Furtifs et fanfarons, ces Hollandais ?
Comme dhabitude cette bouleversante actualité a été ponctuée de la remarquable rhétorique de nos gens de linformation : « lémotion est toujours à son comble », merci. Quant aux nouvelles internationales, ils nous ont fait part « de leur grande tristesse » en relevant quen Irak les voitures étaient toujours piégées.
Certains chroniqueurs nont pas hésité de nous adresser un solennel appel au calme, ne reculant pas devant le néologisme dune « responsabilisation ». Abordant Roland Garos, les défaites nont pas changé depuis lannée dernière. Elles sont toujours « aussi cuisantes ». Quant aux victoires, « elles donnent des ailes ». Pour nos deux joueuses, « la prudence est de mise », surtout le genou de Kim Clijsters, au sujet duquel « le devoir de réserve » simpose.
Javoue, devant ces étonnantes nouvelles, que je ne dors plus « depuis un bout de temps ».
Je minquiète pourtant, autant de chroniques lues et digérées, autant de journaux entendus et compris, je nai toujours pas saisi pourquoi lexpression « bastion de la gauche » navait jamais comme corollaire « bastion de la droite » ? Serait-ce possible que le « bastion de la gauche » soit à ce point réformiste dans la Belgique nouvelle, quil servirait pour les deux ?
Cest avec joie que chacun peut constater avec ce qui précède que la Belgique est pionnière dans le contrôle permanent de lesprit critique. En effet, les bonnes intentions ne sont pas suffisantes. On pouvait compter sur lintelligence des Belges pour élever le débat.
Nous sommes les premiers en Europe à avoir dépassé lâge bête. Maintenant, nous sommes arrivés à lâge con.
Voilà la juste récompense de nos efforts.
Nous sommes donc en mesure dans les semaines qui suivent de recevoir dignement sur nos antennes Patrick Sébastien en personne.
Cest dire, comme dirait Florence Reuter, « tout le chemin parcouru ».