Démocratie ou dictature libérale ?
La loi permettant de priver de financement public les partis qui porteraient atteinte à la Déclaration des droits de lHomme est entrée en vigueur ce lundi. Il aura fallu six ans de palabres.
Après la compétence universelle et le ridicule international, voilà nos grands hommes dEtat en quête dun autre terrain. Ils lont trouvé avec cette suppression possible des dotations aux partis politiques.
En vertu de cette loi, un tiers des parlementaires qui siègent dans la Commission de contrôle des dépenses électorales peut demander au Conseil dEtat la suppression, pour une période allant de 3 mois à un an, de la dotation publique des partis.
Voici la liste des parlementaires compétents :
Vanlerberghe Myriam (SP.A-SPIRIT), Hermans Margriet (VLD), Wille Paul (VLD),
Istasse Jean-François (PS), Mahoux Philippe (PS), Defraigne Christine (MR), Beke Wouters (CD&V), Schouppe Etienne (CD&V), Van Hauthem Joris (Vl. Belang), Delpérée Francis (CDH).
Soit 10 personnes. Le tiers se situerait donc à 3,33. Autrement dit il faudrait au moins 4 membres soit 40 % des contrôleurs pour agir.
Les coalitions sont donc obligatoires pour déposer plainte, ce qui tempérerait les ardeurs dexclusion dun seul parti.
Mais ce qui sidère cest lirrationnel dune plainte fondée sur « La déclaration des Droits de lhomme ».
Quand on lit attentivement ce texte pétri de bonnes intentions, mais qui échappe par sa haute tenue morale à léthique plutôt grossière des Etats, on saperçoit que la Belgique, par exemple a déjà été plus dune fois dans la ligne de mire des observateurs veillant au respect de cette déclaration et que pratiquement tous les partis politiques en Belgique sen sont écartés au moins une fois. Que dire des parlementaires, quand on suit leurs discours politiques et leurs interventions à chaud dans des interviews de terrain !
Personne nest dupe. Cette loi est une machine de guerre contre le parti d‘extrême droite le Vlaams belang et comme la règle linguistique est dapplication dans tout, pour faire bonne mesure on y a adjoint les comiques troupiers francophones, nos nazillons par bêtise et cupidité dont la dangerosité est égale aux rollmops prédateurs… dans le vinaigre.
Maintenant faut-il cesser de verser des fonds au Vlaams belang parce que son discours dextrême droite ne plaît pas à nos partis politiques, tous plus ou moins centristes ? Cest un autre débat qui, dans un pays hypocrite comme le nôtre, ne pourrait avoir lieu.
Je me considère de gauche, pas socialiste réformateur certes, mais de gauche et souvent en contradiction avec les positions dElio Di Rupo. Jestime scandaleux que lon réduise le droit à lexpression qui est aussi inscrit dans la Déclaration des droits de lHomme à quel que parti que ce soit, dans un pays qui ignore les 250.000 francophones de la périphérie bruxelloise privés du droit élémentaire davoir des écoles et de sexprimer dans leur langue.
Cest contradictoire direz-vous dêtre pour la poursuite des dotations à un parti qui applaudit des deux mains à cette situation des francophones de la périphérie. Je trouve que le débat sur légalité de tous les citoyens belges ne doit pas déborder sur une nouvelle inégalité.
Pourquoi les Flamands dans leur ensemble auraient-ils le droit du sol qui est contraire à lesprit de la Déclaration, à lexception du Vlaams belang qui ne laurait pas ?
Enfin, du point de vue de lintelligence interprétative cette loi est on ne peut plus mauvaise. Elle va permettre au Vlaams belang de jouer les martyrs, ce quil fait déjà, et comme il bénéficie du flamingantisme des autres partis, sans débourser un centime, cette loi, cest du pain béni pour lui. En outre, vont se développer sous le boisseau une politique pire encore que si elle devait être débattue au grand jour devant lopinion publique.
Cest enfin prendre le citoyen pour un niais que le priver de la connaissance des débordements verbaux de lextrême droite.
Cest un très mauvais jour pour les libertés que cette nouvelle loi. Elle va, avec les mesures antiterroristes donner des moyens accrus aux Autorités. Si cest en sortant des règles démocratiques que lon croit pouvoir lutter contre les ennemis de la démocratie, on se trompe lourdement.
La soi-disant faiblesse de la démocratie ne tient pas la route. A-t-elle oui, ou non, fait toucher le tapis des épaules à sa concurrente marxiste ? Elle gère dans le calme ses millions de chômeurs. Complice du libéralisme économique elle est en train de dépouiller les travailleurs des bénéfices sociaux des luttes syndicales du passé.
Cest donc un régime fort que nous avons, et qui a toutes les caractéristiques dune dictature, puisquil tire prétexte dune menace extérieure pour sarmer de lois davantage répressives.
Contre lextrême droite ? Contre les intégristes ?
Non. Contre nous tout simplement.
Parce que comme tous les régimes forts, ce quil craint le plus, cest son ennemi intérieur : quand viendra le jour où nos écailles tomberont des yeux.