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Les beaux emplois du Forem
Aujourd’hui Harceleur moral.
-Monsieur Nauséa Bond, vous êtes harceleur moral à la Société Khan-Niveau & Fils. En quoi cette profession consiste-t-elle ?
-D’abord un bref rappel des faits, la Société Khan-Niveau & Fils est le produit d’une fusion merchant wholesaler avec Immon Dice issu lui-même du group banking, la société holding étant noncompeting dans le domaine qui nous préoccupe.
-Pour nos étudiants sortis du cycle inférieur professionnel, voulez-vous parler plus simplement ? Et d’abord, monsieur Bond, vous êtes parents avec l’agent 007 ?
-James ? Oui, c’est mon oncle.
-Alors, la profession de harceleur moral ?
-Globalement la nouvelle entreprise comptait 870 personnes dont 815 en trop. Son nouveau système discount house…
-Discount house ?
-Oui, vendant des marchandises à bas prix… supprimait des emplois en masse, ce qui est toujours une bonne chose pour la relance. Or, nous n’avons pas les moyens de licencier avec indemnités 815 personnes, c’est alors que Ioan Shark, Chief of economic planning, sur recommandation de mon oncle, a fait appel à moi, diplômé de Berkeley, promotion La faillite pour…
-La faillite ?
-J’ai dit La faillite ? Je voulais dire La Fayette, pour régler au mieux le problème des lourdes indemnités qui aurait fait perdre en tax loophole au Conseil d’administration un bon ½ % de royalties !
-En quoi consiste donc votre métier ? C’est cela qui intéresse nos cycles inférieurs professionnels, monsieur Nauséa Bond ?
-Il consiste à harceler moralement des personnes que nous ne voulons pas indemniser.
-Je ne comprends pas ?
-C’est bien simple. Ou la personne écoeurée quitte d’elle-même la société et part sans indemnité, ou elle tombe malade et c’est la mutuelle qui paie.
-C’est immoral !
-Citez-moi quelque chose de moral dans la société anonyme et mon oncle vous fera engager dans le cabinet du ministre des finances.
-Donc c’est légal ?
-Notre bureau Survey Research admet que nous pouvons être condamnés à 10 % des affaires traitées et encore largement bénéficiaires.
-Donc mon cycle – 2 peut trouver un débouché dans votre profession en toute légalité ?
-Madame Meyer-Alemploy, nous avons bien étudié la question avant de…
-Alors, le métier ?
- Il est possible de détruire quelqu’un juste avec des mots, des regards, des sous-entendus, des pièges aussi. J’ai fait part d’un projet à I. S.
-I. S. ?
-Ioan Shark, d’un faux fumoir. J’y ai pensé dès l’interdiction de fumer dorénavant dans les bureaux. Vous entrez dans un couloir sur la foi d’un écriteau « fumoir » vous suivez la flèche qui vous conduit devant une porte, vous y entrez et vous fumez. C’est l’antichambre du chef du personnel. Vous devinez la suite ? Provocation de la direction, entorse au règlement… renvoi sans préavis.
-Et le fumoir ?
-C’était la porte à côté.
-Je pense à une variante. Vous entrez directement dans le local de propagande de la Ligue contre le cancer du fumeur. Mais, il n’y a encore que la technique des mots qui tuent qui soit la plus radicale et qui ne nécessite aucun accessoire.
-Les mots qui tuent ?
-Enfin, madame Meyer-Alemploy… comment avez-vous obtenu votre place ? Un mot peut tuer, déstabiliser, détruire. Les armes de la malveillance et de la manipulation sont innombrables. La plupart de ceux qui ont réussi, croyez-vous vraiment que c’est parce qu’ils le méritaient ? Pourquoi y a-t-il tant de divorces, si ce n’est à cause de la perversité d’un conjoint, d’un parent ! Nous-mêmes à l’entreprise, nous pouvons briser un couple, quand les deux conjoints sont employés par nous et que nous leur disons que nous devons nous séparer de l'un d'eux. Si vous pouvez défaire une vie, alors pourquoi pas une carrière professionnelle ? Je mène patiemment ma partie suivant des études poussées de Berkeley, d’après l’œuvre de Konrad Lorenz « L’Agression ». Paralysée, la victime se laisse peu à peu enfermée dans le piège. Elle signe sa lettre de démission et hop…
-Hop ?
-Oui. Une fois dehors, elle ne nous intéresse plus. Ion Shark avait voulu la poursuivre après son départ pour rupture de contrat injustifié, mais je n’ai pas voulu ; Il faut se montrer humain, quelques fois, n’est-ce pas ?
-Je vous remercie monsieur Nauséa-Bond. Je pense que nos élèves du cycle inférieur professionnel auront apprécié comme moi. Il me serait agréable que vous montiez au quatrième étage, dans mon bureau pour le verre de l’amitié… (parlant bas) : j’ai un dossier sur le directeur, comment puis-je faire pour prendre sa place ?