Un vrai confédéral…
Quand on parcourt les programmes des partis francophones pour 2007, année où les Flamands reviendront sur la polémique au sujet de Bruxeles-Hal-Vilvorde, les régionalisations, l’emploi, la sécu, etc., force est de constater qu’en fait de contre-feux, le front Wallonie-Bruxelles donne l’impression d’une armée mexicaine désunie où les chefs s’entendent sur le minimum qui se résume à la défense des glacis que l’on occupe, quitte lorsque la position devient intenable à se replier sur des positions préparées à l’avance, comme on dit dans les Etats-majors déconfits.
Les Flamands se disputent et se font des crocs en jambe en lorgnant la progression du Vlaams Belang, sauf quand il s’agit de porter au fédéral leurs divergences profondes d’une Wallonie qui n’a adopté du fédéralisme que la multiplication des emplois de ministres et qui, pour le reste, est d’un attachement aveugle à une Belgique qui n’existe plus depuis 30 ans !
Les discours de Reynders et Di Rupo sont très éclairants. C’est entendu, ce sont de bons Belges attachés à la dynastie, le Royaume d’Ostende à Arlon, et qui veulent que les Wallons s’ouvrent davantage aux Flamands et apprennent leur langue, ce qui ne serait pas une mauvaise chose, s’il y avait le même sentiment d’amour d’outre la frontière linguistique. Ce dont on s’aperçoit très vite à partir de Tongres et de Hasselt, c’est que, en-dehors des zones de la côte et des grands centres commerciaux, la plupart des Flamands répugnent à parler le français. Souvent ils se réfugient dans une incompréhension volontaire pour ne pas répondre à une simple demande de renseignement.
Oui, apprendre le flamand est une bonne chose. Mais je comprends que cela blesse une grande partie des francophones de la périphérie bruxelloise devant les brimades et les mauvaises volontés dont ils sont victimes tous les jours des autorités flamandes responsables.
Notre bonne volonté ne suffira pas. Il est clair qu’il faudra trouver autre chose pour freiner l’appétit flamand sur Bruxelles et arrêter sa fringale d’autonomie à notre détriment.
Or, de par leurs discours lénifiants Reynders et Di Rupo se sont disqualifiés vis-à-vis de l’opinion francophone et vis-à-vis des responsables flamands. Quand on est méprisé de ses adversaires, il y a de grandes chances pour que ceux-ci passent outre des décisions arrêtées et qu’ils en veuillent toujours plus.
Nous voilà à parler de solidarité francophone et d’un axe Wallonie-Bruxelles, sans que rien ne se concrétise. De qui se moque-t-on ?
Encore que, si ce rien cachait une volonté d’en découdre avec l’appétit flamingant et que nos responsables s’étaient entendus au moins sur le refus de toutes nouvelles concessions, quitte à aller jusqu’à la rupture ! Mais, tout le monde sait qu’il n’en sera rien, et que nos deux compères n’ont pas besoin de se consulter pour savoir qu’ils lâcheront encore du lest. Encore et toujours… alors, on peut se demander qui tire les ficelles de leur mollesse : la Cour, les industriels ? Certainement par leurs affiliés, c’est sûr.
L’ennui avec nos leaders, c’est qu’ils se sont entourés de gens qui pensent comme eux, mieux, qui pensent par eux. C’est particulièrement vrai au parti socialiste où des esprits indépendants, comme le Liégeois Jean-Maurice Dehousse, sont placés dans des retraites dorées, mais qui les éloignent et les empêchent de rallier l’opinion contradictoire qui manque tellement à la gauche.
Il vaut mieux d’en rire, mais la Belgique fédérale n’est plus qu’un fantôme dont Verhofstadt agite le linceul les jours de grande inquiétude en ajournant toute décision, comme pour BHV et le sort des minorités confrontées aux Droits de l’Homme.
Le fédéralisme est à réinventer, si l’on veut poursuivre. Sinon, il faudra que les grandes communautés s’arrangent pour Bruxelles et tout sera dit.
Mais avant le séparatisme pur et simple, il y a l’étape intermédiaire qui serait le confédéralisme. Soit l’union de deux Etats souverains qui acceptent qu’une Autorité centrale gère leur image au niveau international et qui ont une grande autonomie interne. Tels sont en l’occurrence les Etats-Unis d’Amérique.
Cette déconfiture de l’Etat belge selon la conception de 1830 serait peut-être la solution si nous avions des dirigeants francophones convaincus et qui abandonneraient leur vision monarchiste traditionnelle et surtout qui feraient l’impasse sur leur façon de gérer la vie politique, avec le clientélisme, le diktat des présidents et la pensée unique, sans oublier la chasse aux mandats fructueux.
Ce n’est pas le cas.
Ce ne l’est d’autant moins que le libéralisme se veut social à l’heure qu’il est, autrement dit, il concurrence le PS sur son terrain. Heureusement que l’un et l’autre se bagarrent pour la conquête du centre, ce qui est normal pour le MR et insensé pour le PS. On voit que la discorde flamande n’a pas le même caractère que la discorde francophone et c’est peut-être par là que nous montrons notre faiblesse dont profitent les Flamands.