« Le peigne. | Accueil | Chiraquisme et Villepinade »

Cour ou préau ?

Ils sont unanimes : la Justice en Belgique est indépendante.
Elle-même auto garanti son indépendance par des jugements tirés exclusivement du Droit…
Ah ! ce couplet de l’Etat de Droit chanté en Bossa-nova, tango, valse lente, musette de toute la classe politique remontée contre tout ce qui pourrait contredire le sacro saint principe !
C’est l’émerveillement pour l’Haut-lieu : enfin quelque chose de fort, d’intangible, d’immuable ! Quel réconfort pour une société vacillante, en proie aux doutes profonds…
Dame, forcément, c’est la seule institution qui se pose en championne de l’équité absolue entre les citoyens en dehors de l’aspect économique qui ronge toutes les autres institutions, taraude les esprits les plus indépendants et dont le suc corrosif se dilue dans les estomacs les plus délicats. Pour une fois que l’on peut exposer à l’admiration de tous, un Corps presque parfait…
Certes, on pourrait épiloguer, la Justice à deux vitesses, selon que vous serez puissant ou misérable, la sévérité et la taule pour les uns, le sursis et le pardon pour les autres… mais bon, en théorie…
Mais en gros, sur le principe, ils savent ce qu’ils disent, les bougres, puisque la moitié ou presque de nos représentants sont avocats ou proches des milieux juridico affairistes, à croire que nous sommes une Nation d’avocats…
Au procès Dutroux, la Commission chargée d’éclaircir le rapport Justice Police avait commencé de soulever certains doutes quant à la compétence et à l’indépendance des dits.
Enfin, cela s’était résolu par quelques nominations, heureux avancements, baumes suprêmes sur les blessures d’amour propre de ces écorchés vifs de la reconnaissance citoyenne qu’ils appelaient de tous leurs vœux.
Puis, tout avait repris les plis des robes noires et pourpres bien repassées, cols blancs amidonnés, médailles sidolisées et rubans tricolores rafraîchis. Les mal aimés ne l’étaient plus !
La ministre, elle-même de la Maison, ancienne avocate, adepte du principe de précaution, épouse d’un ardent du Barreau, à coup de langue de bois et de sourires faïencé par les meilleurs dentistes, avait réussi à ramener le calme du préau de la deuxième cour intérieure du Palais des princes Evêques à l’ensemble des prétoires du Royaume.
La chienlit avait failli submerger l’Ordre !
Les plus outrés avaient été les gens de robe ennoblis par le devoir d’appartenance à une famille politique – ô en toute indépendance.
Que l’on permette aux vulgaires d’ouvrir des dossiers, de fureter dans les greffes, d’explorer les caves et les greniers des maisons de justice, que l’on pût mettre en doute la rigueur et l’honnêteté légendaires de tout ce petit monde, avait été une épreuve qui avait été ressentie jusqu’au commis débutant de dame Thémis.
On croyait la chose réglée, et voilà que ces intrépides galopins remettent ça !
Voilà qu’à nouveau, ils se font peur et avec eux, nous, avec le sacro saint principe d’indépendance !...

justiceetdroit.JPG

En quelques mots le béant de la nouvelle plaie, selon les journaux :
« Faut-il concentrer ou disperser les vols depuis l'aéroport de Bruxelles-National? La cour d'appel de Bruxelles opte pour la dispersion pour respecter le principe de proportionnalité. Il y a peu, son aile francophone disait le contraire. La Flandre se réjouit, les riverains s'inquiètent. Le ministre y perd son latin. »
Et le doute s’installe à nouveau.
L’Etat de Droit ne le serait-il plus ?
Messieurs Francis Delpérée et Marc Uyttendaele au sommet des étagères époussettent les tomes respectables des barbus qui les ont précédés dans la Connaissance. Un tel jugement est-il constitutionnellement possible ?
Car enfin, une décision de justice argumentée et basée sur les principes des Lois serait différente selon qu’elle serait prononcée en français ou en néerlandais ?
Mais alors, si c’est le cas, il n’y a plus de saine justice ?
Saint-louis sous le chêne n’était qu’un gland…
Et si ce constat fait jurisprudence, il ne reste plus qu’à annuler tous les arrêts de ces 25 dernières années et libérer tous les détenus du Royaume pour vice de forme.
Cela paraît logique.
C’est à ce seul titre que la Justice pourrait se réhabiliter et affirmer avec force qu’elle est à nouveau indépendante.
Dans ce contexte de justice, la définition même du mot devrait être revue. Quelqu'un l'a défini ainsi : "La "Justice" est un outil politique utilisé par ceux qui sont au pouvoir pour contrôler la masse et conserver le pouvoir".
Il y a de l’idée là-dedans.

Poster un commentaire