« Amours numériques. | Accueil | Constitutionalisme social »

Vivent les pauvres !

Nos admirables se conduisent comme le patron d’un troquet devant un bon client.
-Chérie, je parle ce soir devant les adhérents du parti. Mets ta robe bleue, celle qui a le grand décolleté…
-Quoi ! Tu veux que je montre mes nichons à tes supporters ?
-C’est pour la bonne cause, amour. Ce n’est pas de la provocation, c’est du civisme.
Le même, une minute plus tard.
-Tu sais, réflexion faite, ta robe noire à col montant, c’est sobre et élégant. Je préfère.
-C’est pas monseigneur Daneels que tu viens d’avoir au bout du fil ?
-Oui. Je le mets au premier rang. Bien entendu.
-C’est ton ami Michel qui t’a fait une blague, pauvre couillon !
-Ah ! le merdeux… Je suis victime d’un canular. Mets ta robe bleue, finalement.
Après nous avoir méprisé pendant quatre ans, les revoilà avec la gueule enfarinée à nous faire des propositions d’amour.
Ils vont nous étouffer sous les cadeaux. Les bonnes intentions vont pleuvoir. Ceux qui sont aux manettes sont bien placés pour ouvrir les vannes.
Qu’est-ce qu’on va être heureux !
Il faut en profiter, car la kermesse ne va durer que quelques mois.
Aujourd’hui, ils le reconnaissent, ils ont été trop durs avec nous. Du chômeur sanctionné au petit employé dernière catégorie, ils le jurent, nous sommes des gens biens, injustement condamnés à la médiocrité, alors que nous n’avons besoin que d‘une occasion pour exprimer tout notre talent.
Et cette occasion, ils nous l’offrent.
Une seule condition : qu’ils se retrouvent là où nous les avions placés, et ils nous le jurent, ils répareront leurs erreurs.
Le premier à monter d’un cran l’affection qu’il nous porte, le ministre des Finances, Didier Reynders.
Il nous invite à prendre le train avec lui, son nouveau train de mesures fiscales :
une augmentation du crédit d'impôt et des frais forfaitaires de ceux qui travaillent. Il n’a pas encore pensé aux pensionnés. Ils devraient. Ça fait quand même un gros paquet d’électeurs, dont les trois quarts ne gagnent pas à eux tous en un an, ce que Bill Gates gagne en une semaine. Pour Reynders, évidemment, ce sont des poids morts. Le fait d’avoir travaillé 30 ou 40 ans ne compte pas. Cependant, comme ils votent, il attend d’être réélu pour voir ce qu’il pourra économiser sur leur dos. Et peut-être, si l’électeur de 30 ans rechigne à poursuivre avec lui le chemin du libéralisme avancé, fera-t-il un petit quelque chose pour les vieux. A moins qu’il ne laisse – en gentleman – ce soin à son ami Di Rupo, avec les chômeurs et les hors pistes, les gens sans statut et sans grand espoir pour l’avenir. A chacun ses merdes et sa spécialité.

poorandco.JPG

Les deux baroudeurs du suffrage se seraient alors partagé la tâche, la plus ingrate étant évidemment celle de Di Rupo qui va devoir ramer pour faire croire qu’il est sensible à la misère d’un quart de la population belge.
Ce discours-là, il faudra s’attendre à le voir duplicaté en autant d’exemplaires qu’il y a de personnages en quête de mandats. Certains auraient pu faire quelque chose avant, mais ils n’ont rien fait, afin de lâcher leurs paquets de bonbons au bon moment, les autres qui n’ont aucun pouvoir, vont nous solliciter en prétendant qu’ils feraient mieux s’ils étaient en pool position.
C’est de la tactique cousue de fil blanc.
Nous sommes bon pour les chemises à 4 euros made in China et pour le reste nous n’avons qu’à la fermer. Evidemment, nous ne saurons cela que plus tard. L’élu à préavis court n’existe pas.
Ce qui est plaisant dans les tours de piste d’échauffement avant le départ de la propagande électorale, c’est de les voir se dépêtrer de leur politique farouchement libérale (la Belgique est le pays de l’Europe où les revenus du capital sont les plus élevés comparés aux revenus du travail) et où la situation est une des plus catastrophique au niveau de l’emploi et de l’accroissement de la précarité. Revêtir le costume de superman des débiles légers de la droite et celui de Robin des Bois des débiles profonds de la gauche, ne sera pas une mince affaire.
Ah ! nous n’avons pas fini pendant six mois d’être les plus beaux, les plus forts de ce petit pays, si doué, si magnifique… reste à savoir ce que les Flamands en pensent, eux qui se persuadent que leur bonheur, c’est de nous larguer, nous et la dynastie ?

Poster un commentaire