Faut être trois pour la double
Interdite pendant longtemps par la religion qui faisait la pluie et le beau temps en ce domaine, il y a à peine un demi siècle, la pornographie est devenue un produit de consommation au même titre que les frites et le GSM. Encore que repoussée sous le boisseau par les utilisateurs eux-mêmes comme étant leur côté honteux, elle est couramment utilisée pour satisfaire nos besoins sexuels ou en guise de zakouski aux préludes d’un après-midi du faune. La pornographie a intégré notre quotidien au moment où nos quotidiens en sortent. C’est qu’on ne la découvre pas dans nos journaux. Tout au plus nous donnent-ils quelques bonnes adresses sous prétexte de réclames ou d’emplois vacants dans les bars périphériques où l’on peut la trouver.
Elle existe à présent, sous tellement de formes qu’on pourrait presque dire que les 300.000 sites de cul sur INTERNET n’en donnent qu’une petite image. Les vidéocassettes, les films pour adultes, les peep-shows, les lignes érotiques et le cybersexe, complètent les « lieux » jadis infréquentables mais que beaucoup fréquentaient. Variée et facilement accessible, la pornographie pourrait se présenter sous la forme libératrice d’une sexualité en déroute en dévoilant les fantasmes et en foulant aux pieds les tabous de notre époque.
C’est surtout une marchandise qui se vend bien et cher, donc qui rapporte gros aux macs reconvertis et aux commerçants du genre qui pensent que l’argent n’a pas d’odeur.
On s’en fout un peu de qui se fait du blé et avec quoi, l’essentiel n’est-il pas de se faire reluire à une époque dominée par la grisaille ?
C’est que la pornographie a toujours existé, mais qu’elle était le privilège des riches et absolument interdite aux pauvres qui risquaient d’y laisser le talent et l’énergie nécessaire au travail.
Elle est devenue populaire. Et, quand on n’y regarde pas d’un peu près, qui s’en plaindrait ?
Les féministes dénoncent cette conception de la sexualité. Pour nombre d'entre elles, la pornographie ne fait que reproduire les attitudes sexistes et violentes de notre société à l'endroit du sexe faible, la pédophilie étant autre chose, que l’on a raison de traquer et de proscrire. Elles oublient que le plus humilié est encore ce que les pornographes américains appellent « shemale », c’est-à-dire un homme avec ses attributs exploitant son côté féminin et qui s’exhibe et se prostitue sous des habits de femme.
D’autres arguments dénoncent la violence sexuelle que la pornographie suppose, en contribuant à diviser les sexes et à entretenir une image fausse et mythique de la sexualité et des rapports humains.
Cependant, les féministes, en dénonçant toute forme de nudité ou d'expression sexuelle, en arriveraient presque à trouver tout acte sexuel répugnant, alors que les parties fines de jambes en l’air sont aussi vieilles et même de tradition chrétienne, qu’il serait aisé de tirer de la bible un sacré film porno.
D’abord, qu’est-ce que la pornographie ? C’est quoi l'obscénité et la sexualité explicites par rapport à l'érotisme ? C’est à peu près aussi difficile de tracer les frontières entre la pornographie et l’érotisme qu’entre le bon goût et la vulgarité.
Pour la fine définition, il y a toujours un Comité quelque part, une coterie collégiale, un bureau de réflexion, une sexologue de télévision qui y vont de leur autorité en la matière. Ici, c’est un bidule canadien qui se lance :
« La pornographie signifie la représentation ou la description de comportement violent ou dégradant ou de comportement causant ou pouvant causer le décès d'autrui, lequel comportement, infligé par une personne à une autre ou par cette personne à elle-même, est représenté ou décrit dans le but manifeste de stimuler ou de gratifier sexuellement le spectateur, le lecteur ou l'auditeur; comportement, en outre, qui donne l'impression d'être prôné ou approuvé. »
Avec ces Canadiens-là, même le style devient obscène.
On voit que les julots ne sont pas d’accord, la clientèle non plus.
S’en suivent des descriptions d’actes manifestement pornographiques qui font que, sans le vouloir, les auteurs tombent eux-mêmes dans le vice qu’ils dénoncent.
Ce blog extrêmement pudique et réservé ne livrera donc pas les élucubrations masturbatoires des dames patronnesses du Québec.
Quant à savoir si la branlette est un acte dégradant puisqu’elle produit des conséquences négatives chez l'individu selon les toqués de la feuille d’érable, on est prié d’essayer pour voir avant de conclure
Comme il n'existe pas de consensus sur ce qu'est la pornographie, on en conclut que la pornographie, c’est comme la philosophie. Quand on l’aborde, on pose beaucoup de questions dont aucune n’a de réponse.
Comme dirait Mermet : « Nous vivons une époque formidable ».