Cuite de prévictoire.
-On ne sait que penser. La vie, la mort, l’amour…
-C’est pas le moment tes états d’âme. Dans 3 jours on vote.
-J’en ai plus rien à foutre de ta commune…
-Comment, tes engagements ? Tu ne fais plus ma campagne ?
-La question est : m’aime-t-elle vraiment ? Quand une vedette te dédicace une photo, ce n’est pas parce qu’elle a des sentiments pour toi, mais parce qu’elle aime qu’on l’adule…
-Quoi ? Qu’est-ce qui t’arrive ? T’as une star dans ta vie, bonhomme ? Toi, t’as eu des misères avec une bonne femme ?
-Je ne te permets pas de parler de ce que tu ne connais pas… Quand je pense à tous tes fans que tu embrasses à longueur d’année…
-Mais, parole, tu as bu !
-Ça t’arrive jamais, toi, de boire ? Je sais, t’es en campagne. Tu t’en fous, voilà dix ans que tu es cocu. Tu t’en fous, madame a ses occupations, toi les tiennes. Quand t’as 10 minutes tu cours au parti. T’y logerais si tu pouvais… Tu lui fais l’amour, au parti… T’as plus que lui. Tu connais plus personne d’autre… Moi, malheureux, c’est autre chose. La femme que j’aime, c’est tellement autre chose… tu comprendrais pas. Tu comprendrais rien, du reste. Pourquoi elle est proche et lointaine… et moi à courir derrière. Tu comprendrais rien, parce que tu fais dans le communal, comme d’autres font des frites… t’es pas dans le sentimental. Veux-tu que je te dise ? Tu ne sais pas ce que c’est d’aimer…
-Et mes électeurs, Tu crois que je les aime pas mes électeurs ?
-Justement, tes électeurs, tu les aimes comme le fermier Gaspard aime son cheptel. Voilà comme tu les aimes… Combien ça va te rapporter de lait au pis. Combien tu vas tirer de filet et de faux filet…
-Va dormir une heure. Quand tu seras dessaoulé, nous irons avec la camionnette coller sur les panneaux…
-Ne me touche pas. L’amour, c’est pas une question de propagande, môssieur. T’as comme envie de changer Liège, toi ? A qui tu vas faire croire ça ?
-T’es ridicule. C’est Perdita qui te met dans cet état-là ?
-Je t’interdis de prononcer son nom, malheureux ! Si je te disais comme je l’aime, tu serais honteux du métier que tu fais, tu saurais ce que t’as perdu dans les bras de ta chaise de bureau. Tu sauras jamais ce que c’est de voir un sourire sur le visage de la femme qu’on aime…. De lui faire rien que la conversation, rien qu’un mot. Tu sais pas. Quand tu te ramènes chez toi, tu sais même pas si ta femme est là ou les jambes en l’air chez l’autre, que t’as mis d’ailleurs sur ta liste et qu’a pas pu dire non. T’es pas capable de sentir… t’es insensible… Avec ta commune à la con, où j’ai pas envie de coller à tes stratégies, tu t’y vois déjà... l’ambition te gonfle les veines du cou. D’abord, si tu aimes personnes, c’est parce que tu hais tout le monde. C’est pas l’amour de tes concitoyens qui te fait bicher, mais la haine…
-Je n’ai plus le temps de discuter avec toi. Je vais t’aider à enlever tes chaussures et tu vas t’étendre sur la moquette, derrière mon bureau. Le temps de reprendre tes esprits et dans une heure, c’est reparti…
-C’est pas la Commune que tu sens… à part la commune mesure, tu sens rien. Et tu sais ce que c’est la commune mesure ?
-Tu déconnes. Marre à la fin.
-La commune mesure, c’est les lieux, les communs qu’on disait avant. C’est ta hauteur, ta portée… Alfred, tu chies debout et tu t’en rends pas compte…
-Elle t’a mis dans un drôle d’état, celle-là. Qu’est-ce que t’as ? Fais voir sa photo ?…
-Touche pas, malheureux ! T’en es pas digne… Tu fais mes poches, ma parole. Je savais que t’étais pas net, mais à ce point là… Tu détroussais qu’au figuré avant… Ni vu ni connu… Tu vois, cette femme-là, elle me dit tout. Quand elle couche avec quelqu’un d’autre, elle me le dit. Et je l’aime. Capiche !
-T’es cocu comme tout le monde quoi !
-Voilà justement où tu comprendrais rien. Le jugement politicien. Tu marches qu’à l’intérêt, qu’au fric… Les médiocres imaginent qu’on est tous médiocres, qu’on peut que baisouiller en racolant sur le NET, ou pire, avec des bénévoles du parti, qui sont pas là pour ta gueule, mais pour le mari qui voudrait bien passer sous-chef de bureau quelque part dans une merde industrielle où t’as un mandat…
-Je te laisse.
-C’est ça retourne à tes affiches. Endors les gens de tes illusions. Dis leur comme tu serais beau le cul dans le grand fauteuil. Laisse-moi rêver d’elle, pendant que tu ramasses la mise… Pauvre commune qui se contente des mecs comme toi… Alfred, tu fais pitié…
-Ta gueule et dors un peu.
-T’aurais pas quelque chose à boire ?
-Tu trouves pas que t’en as pas assez dans le cornet ?
-Comme t’es sûr de ramasser la casquette dimanche, t’as bien douze caisses de bibines en trop ? Tu vas pas régaler la galerie des perdants ! Tu peux m’en filer une ?
-Et alors ?
-File m’en une, une seule…
-Tiens, c’est du mousseux.
-Pas étonnant que tu perdes, avec ton luxembourgeois, les gens ont pas envie que tu gagnes… T’as pas du raide ? Celle que tu gardes au frigo pour le petit comité ?