Une RTBf qui en a…
…pour combien de temps ?
On a pissé du poivre moulu, hier soir, dans les chaumières bien pensantes, rapport à un petit montage de la RTBF qui a rappelé des bons souvenirs, ceux d’Orson Welles qui avant la guerre de 40 avait eu l’idée d’une émission radio sur l’invasion de la Terre par les Martiens.
Ici, il s’agissait de mettre en scène la fin de la Belgique, les purs Flamingants déclarant leur indépendance et comme Louis XVI à Varennes, le roi s’enfuyant vers des exils plus cléments, des endroits dorés sur tranche.
Voilà longtemps que je ne regarde plus la télévision nationale. Hier soir, je l’ai regretté. J’espère qu’on repassera ce morceau de roi, quoique les engueulades de l’Haut-lieu vont pleuvoir sur les malheureux qui ont osé toucher la main du Commandeur !
Si en Flandre les six millions de francophones honteux que sont les flamands se sont bien marrés au visionnement de nos « hardiesses », par contre, en Wallonie, avec les gueules d’empeigne qui vouent un culte à la grande prêtresse des rois, Anne Quevrin de RTL, il s’est produit un traumatisme collectif dont certains ne sont pas prêts de s’en remettre.
Entendons-nous bien, la RTBf n’est pas devenue soudain le berceau de la liberté d’expression, il s’agit là d’une mauvaise appréciation de la réaction des Belges, surtout qu’ils n’avaient pas assez été prévenus par un petit panneau annonçant la fiction au début de l’émission et qui, apparemment, est passé inaperçu.
Les responsables ont bredouillé, Philippot le premier, qu’il s’agissait de faire réagir les citoyens, tous fervents royalistes et patriotes en diable. Devant l’émotion, la ministre de l’audio-visuel, Fadila Laanan (PS) a convoqué le patron de la chaîne, le malheureux Philippot, qui répercutera le savon à ceux qui ont fait d’une fiction, une bavure.
N’empêche, si on doit l’émission à une connerie des services, alors vive la connerie à la RTBF.
Pourquoi le quarteron de responsables et les millions de béni-oui-oui ont-ils senti passer le vent du boulet ? Parce que ce scénar catastrophe est en 2007 du domaine du possible. Comme chacun sait, les législatives qui viennent sont constituantes. Nos pointures qui iront en négociation avec les Flamands entendent à nouveau tricoter par-ci et détricoter par-là, la frontière linguistique – cette honte raciste en pleine Europe. Avec quelques reprises de nos chaussettes nationales, ils espèrent tenir jusqu’à leur pension. La belgitude, c’est leur fonds de commerce.
Cependant, il n’y a plus le Clochemerle fouronnais, ni le Pinocchio-Happart pour alimenter les gazettes pour pas cher. Reste l’épineux problème de la périphérie bruxelloise, la régionalisation de la sécu, de la défense nationale et quelques babioles. Autrement dit, si nos trembleurs tremblent trop et lâchent du lest afin de maintenir la fiction belge, Laeken, la Loi à la flamande et la Liberté de fermer nos gueules, nous serons virtuellement dans la pensée négative de la RTBF et en réelle scission avec nos écorchés vifs de Bruges à Gand.
C’est de cette perspective et en partant du programme de la RTBF que les téléspectateurs ont pris conscience que, quoi qu’il puisse arriver, nous ne serons plus en Belgique fédérale, mais en Belgique confédérale, ou même pire...
Alors, qu’au centre ville, il y ait encore un palais avec un seul roi relève de l’anecdote. Et si les Flamands hésitent à nous larguer, c’est qu’ils devront justifier aux yeux de l’Europe leur coup de sang nationaliste et que leurs politiciens ne se voient pas en Milosevic annexant Bruxelles et matant la périphérie à coups de grenades lacrymogènes.
Voilà pourquoi on n’entendra pas encore la phrase qui fait trembler le centriste bourgeois et catholique : « La Belgique a cessé d'exister ». Ce dont rêvent Jean-Marie Dedecker et Jean-Marie Happart pour des raisons contradictoires et beaucoup de monde en Wallonie excédés par les rodomontades nationalistes, la pleutrerie des chefs francophones, sans compter les nostalgiques de la France, mère patrie.
Pour le reste, nous verrons sans doute le personnel de la RTBF contrit, montant les trois couleurs au mât du boulevard Reyers en chantant la Brabançonne, avant de présenter à Anne Quevrin, au roi et à Yves Leterme leur profond regret et en même temps exprimer à la Nation des excuses pour une émission si mal adaptée à l’âme francophone.
Par contre, les Régies du téléphone, les médias pris d’assaut, Internet saturé, remercient du fond du cœur tous les jobastres qui auront cru à la pantalonnade.
En fin de compte, la seule fiction était celle d’un Philippot soutenant son personnel et oubliant le salaire de sa peur de perdre un emploi lucratif.
Par contre, Philippe Dutilleul habitué de reportages dans les magazines "Strip-Tease" et "Tout ça", le réalisateur de cette catastrophe télévisuelle, risque de faire les frais de la trouille philippottienne.
Et ça, ce n’est pas du reportage fiction.