J’ai rencontré des économistes fous !
J’ai rencontré des économistes fous !
Contrairement à la philosophie, l’économie est truffée de pataphysiciens. On les croirait sérieux, le discours paraît cohérent, c’est lorsqu’ils sont partis qu’on s’aperçoit que certains sont des fêlés de la cafetière. Mais les cas les plus graves ne se décèlent souvent que bien après leur mort, quand après avoir appliqué à la lettre des lois énoncées depuis une chaire de Berkeley ou de Cambridge, on s’aperçoit qu’elles étaient fausses !
C’est ainsi que nous vivons en Europe sous des lois économiques énoncées il y cent ou deux cents ans par des farceurs et qu’il faudra encore des décennies pour que l’on se rende compte que ce que nous imaginions était une erreur et que les exemples donnés de certains grands hommes, l’étaient dans un contexte qui n’existe plus, ou pire, qui n’a vraiment jamais existé.
La science économique est une des rares sciences où il vaut mieux avoir raison après qu’avant. Quand il est trop tard, on vérifie que la pratique a détruit de fond en comble la théorie.
Comme cette science ne prévoit jamais que du progrès et un bel avenir à condition de rester dans l’orthodoxie capitaliste, elle se trompe généralement neuf fois sur dix.
La loi de Say est une de ces âneries à laquelle, encore aujourd’hui, l’Europe croit dur comme fer.
Say était l’ami de Chamfort, ce qui ne le dédouane que du côté de la bonne littérature, quant à ses théories… « L’offre crée sa propre demande. » (à l’offre correspond la demande en harmonie), l’Europe en est encore entichée malgré les millions de chômeurs.
Redoutable de bon sens, cela voudrait dire, par exemple, je crée des voitures que la main-d’œuvre nécessaire à cette création achètera. Sans entrer dans le détail, Keynes (La Théorie générale de l’emploi) a rejeté comme absurde la logique apparente de la loi de Say. Au slogan « laissez faire, laissez passer, et tôt ou tard, vous verrez ce que vous verrez » Keynes répondit « Tôt ou tard, je serai mort ». Dans le long terme nous serons tous morts.
Eh bien ! c’est de cette Loi de Say dont le mouvement libéral et la Commission européenne se nourrissent encore.
Autre bêtise révérée :
Lipsey et Lancaster démontrent que les privatisations par l’effet d’un coup par ci et d’un coup par là, au lieu de créer une meilleure situation conduit au chômage et à la pagaille.
Des socialistes aux libéraux, tout le monde dénationalise par petits paquets, souvent pour faire l’appoint des quelques centaines de millions qui manquent au budget. On remet aux privés des gestions sensibles, sous prétexte que ce sera mieux géré et à meilleur coût..
C’est tirer à vue sur la politique économique de Bruxelles de prétendre le contraire. Le problème, c’est qu’on ne peut aller à l’efficacité par la concurrence ! Prenons la Poste, le résultat de la privatisation progressive est pitoyable. Plus de bureaux dans les petits villages. Retard généralisé du courrier. Pertes et vols de petits colis. Etc.
Dans les chemins de fer, outre qu’ils soient deux fois plus victimes d’erreurs d’aiguillage et d’accidents en raison du manque d’entretien, on supprime les trains de banlieues et on argumente pour que les TGV s’inscrivent en concurrence avec l’aviation régionale. Résultat, une moins bonne couverture géographique, désertification, augmentation de la délinquance, etc.
Le libéralisme est donc une source de gabegie.
Les services publics vendus au privé coûteront plus chers aux citoyens.
Son application étendue à la terre entière est impossible et avec la montée en puissance de la Chine et de l’Inde nous allons en sentir les effets immédiats.
Déjà, les ressources de la planète sont limitées : si tous ses habitants avaient notre niveau de vie, il faudrait les ressources de 5 Terres pour subvenir à leurs besoins.
L'économie libérale est par nature gaspilleuse de ressources. La situation de rareté des ressources et la compétition conduisent à une impasse. On ne peut rationaliser et économiser les ressources dans un pareil système. La charte sur la diminution des gaz à effet de serre est incompatible avec l’économie libérale.
La dérégulation et la concurrence qui encouragent la concentration des entreprises dissipent de fait de nombreux investissements et ressources lors d"une fusion-absorption : combien de milliards d"euros disparus (qui auraient pu être investis ailleurs) lors de la faillite d"Enron ? Combien de millions de tonnes d"acier, d"heures de travail, de tonnes de pétrole, de capitaux dépensés en pure perte quand certains sites d’Arcelor fermeront après un regroupement avec Mittal ?
Combien d"argent dépensés en pure perte quand un Etat forme des ingénieurs ou des ouvriers qualifiés que l'économie envoie directement au chômage ?
L'aménagement progressif de la concurrence ne fait que déséquilibrer les facteurs constitutifs de la concurrence et génère des destructions de richesses irremplaçables. L'exemple de la Russie est significatif à cet égard : l'introduction progressive de la concurrence a tout détruit des infrastructures qui avaient été construites pendant 70 ans - plus rien ne fonctionne hors des zones très restreintes où le capitalisme le plus primitif se goinfre sur le dos des populations.
Si l'économie est homogène à l'échelle de la planète, on ne saurait oublier que les acteurs n'y sont pas en situation concurrentielle optimale. De fait la dissymétrie règne partout : dans l'information, dans l'accès aux ressources, dans les conditions de production. Les uns ont les idées, les autres le pétrole, certains rien du tout. Le libéralisme consiste à laisser des individus piller certaines ressources pour optimiser leurs gains. Combien de destructions pour des gains unilatéraux ?
Demain, les Américains continueront de saloper la planète au nom de l’économie libérale, d'en piller une partie, de louer le seigneur dans leurs églises de les avoir épargnés des contraintes qu’ils imposent aux autres.
Et tous les Européens seront cocus, les Libéraux en tête.