Un pour tous et tous pour moi.
La devise d’Alexandre Dumas, de lui à nous, n’a subi que peu de changements, mais ils sont essentiels.
Le marché mondial s’est chargé de nous rendre égoïstes jusqu’au fond des tripes. Et il y a bien réussi !
A moi la fortune, les vacances, les femmes, le plaisir, le bonheur d’être au-dessus des lois, de commander aux autres… L’ennui, c’est que tout le monde pense de la même manière, d’où le jeu de massacre de sorte que la plupart se retrouvent fauchés et cocus.
Il y a dans l’homme déçu de cette manière la vision d’une connerie militante de la hauteur d’une cathédrale.
Des centaines de milliers de capitalistes acharnés bossent dans les usines, quand ils ne sont pas chômeurs. Mais cela ne fait rien. Ils y croient dur comme fer et votent pour cet ineffable hyper égoïste de Didier Reynders qui sous des airs innocents doit bien rigoler sous cape.
Les super champions du marché jouent des coudes, font des crocs en jambe et sont toujours les premiers à plaquer le ballon derrière la ligne des buts. Les autres retournent au vestiaire avec un coquard et en boitant bas.
Evidemment c’est une image. On ne voit pas Paul Frère en short.
C’est dans certaines situations fleurant bon le fric que les groupes se déterminent. Les uns vont bosser pour le droit de bouffer, les autres les y poussent dans le triomphe du « tous pour moi ».
Comme on ne peut pas dire à un con qu’il l’est, on enveloppe sa connerie dans du papier cadeau. L’emballage parle de grandeur du travail, de la morale élevée et du bon laboureur qui envoie ses fils bosser au champ. Là-dessus, roulement de tambour, remise des médailles et pied au cul vers la sortie.
Nabuchodonosor n’avait que cent mille esclaves, Mittal en a bien plus. C’est fortiche, non ?
Ces paroxysmes excluent des millions d’individus des bénéfices du système. Et pour cause, n’est-ce pas eux qui sont la matière vivante d’où sont extraits les bénéfices ?
Si ces gens travaillaient pour eux-mêmes dans une autogestion chère à Maryse (1) que deviendrait le « tous pour moi « ? Quel serait le sens du marché, puisqu’il n’y faut au sommet que les quelques diamants rares nécessaires à entretenir l’illusion des masses qu’ils vont pouvoir en tailler de plus gros ?
Déjà du temps des manieurs d’épée, des bretteurs au clair de lune, des belles manières et des vices réservés, ce n’était tout de même pas parmi les laquais et les manouvriers qu’on recrutait pour la belle vie, mais parmi la noblesse.
Bien regroupés derrière l’honneur chatouilleux, les gloires des premiers sangs le sont restés. Sauf qu’après quelques têtes dans la sciure, on a confié le sceptre à la démocratie. Méchant sortilège, l’homme humble en le touchant, le sceptre est devenu marotte. Et voilà l’homme le brandissant sans savoir qu’il le désigne comme le bouffon du roi.
La particule désintégrée, sauf dans les derniers salons où les soies moisissaient faute de chauffage, c’est l’homme d’affaire qui endosse les anciens oripeaux. Le parvenu est devenu empereur et règne sur le monde.
Il a redressé les châteaux, coincés dans les encoignures la fille noble rien que par amour-propre de s’appeler du Schnock. Né Américain et sans baronne, il s’est payé de la star dans des châteaux à la Disney.
La moralité dans tout cela ?
Il n’y en a pas.
L’autre soir un monsieur très poli m’écrivit à peu près ceci : « C’est bien joli tout ça ; mais qu’est-ce que vous suggérez ? »
Je le rassure tout de suite. Je ne suggère rien. Je décris seulement une situation qu’on ne retrouve dans aucun livre de morale et qui est pourtant une réalité.
Toute recherche de changement doit commencer par là : dire ce que l’on pense, décrire ce que l’on ressent. Il n’y a pas de vérité, mais des vérités. L’honnêteté consisterait à dire aux enfants dans les écoles, voilà les vérités. Discutons-en. Je doute fort que vingt-cinq ans plus tard, les jeunes se saisiraient encore de la marotte des bouffons précédents.
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1. Que sont mes amis devenus ? Chère Maryse ton « Combat » était le mien.