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"Le Monde" sur la corde raide.

On le sait, les gens ne lisent plus ou si mal que le NET leur suffit amplement. Ils ne s’intéressent plus au sort de leur collectivité. Ils n’ont plus l’esprit critique. A cause de tout cela, la presse écrite – l’ancienne, pas les papiers culs - se trouve en grand péril.
Ce n’est pas nouveau. Les journaux régionaux ont disparu, sauf quelques rescapés, depuis plus de vingt ans, soit rachetés, soit liquéfiés dans les remous financiers et les magouilles bancaires. Pourtant, les pauvres, il n’y avait pas plus serviles vis-à-vis des pouvoirs. Il faut croire que les forclos avaient encore trop d’esprit critique.
La polémique fout le camp. Les folliculaires qui restent ne débusquent plus des lièvres. Les cadavres dans les placards reposent désormais dans la paix éternelle. Les Rouletabille qui persistent sont dans le collimateur du pouvoir.
Subsistent quelques titres de référence, eux-mêmes bientôt piégés par la finance et les richissimes qui se paient un journal, comme d’autres élèvent des chevaux de course.
Il y a de-ci, de-là, parmi les brouillons et les paquets d’invendus, des titres qui gênent encore assez pour que des marioles de droite – ce sont eux qui ont l’oseille – se disent « Tiens, je vais me le farcir. Voilà longtemps que son esprit critique me fait chier. A l’ère du libéralisme avancé et avec les moyens dont nous disposons, ce serait bien que je puisse lui fermer la gueule. » (Oui, oui, c’est ainsi qu’on parle dans les salons !).
S’est-il lancé tout seul ou a-t-on téléguidé le furet ? Alain Minc est entré dans le terrier de garenne du journal Le Monde. L’esprit vif, l’œil en éveil tant il craint les pieds au cul, il s’est installé comme chez lui, avec le culot d’un tabellion de bons de caisse.
Alain Minc avec sa dégaine d’intello hasardeux annonce la couleur ; mais on s’y laisse prendre quand même. Comment expliquer que le charme dont il est dépourvu, parvient néanmoins à faire mouche ?
C’est que ce fantassin de la droite vient s’installer dans les conseil des grenades dans sa besace. Il ne les montre pas, mais on sait que d’un petit geste nerveux il pourrait en dégoupiller une.
Le Monde a une machinerie compliquée qui s’appelle la Société des rédacteurs. C’est ce qui lui a permis jusqu’à présent d’éviter les Lagardère, les Dassault et les Bolloré, magnats sans prétention littéraire mais que démange le démon de l’écriture en faveur de la politique de la France, entendez celle de l’ami Sarkozy.
Le furet a été installé par l’actionnaire externe au Conseil de surveillance. En gros, il a joué du violon et promis la rentabilité financière en diversifiant les publications du Monde par des rachats en province et des publications connexes.
Les journalistes n’ont pas été attentifs aux conditions d’achat. Si bien que les petites affaires font des bénéfices, tandis que Le Monde a un passif qui s’alourdit. Les Rédacteurs sont tout à fait incapables de procéder à une augmentation du capital.
Le furet a posé ses collets. Il a des amis prêts à investir, exit les rédacteurs. Un huissier pourrait faire l’inventaire des biens, un redressement judiciaire imposerait un administrateur nommé par le Tribunal de commerce, bref, Alain Minc est ravi, les lecteurs du Monde sont consternés et les rédacteurs associés se demandent quand ils vont être fichu à la porte.
Voilà en quelques mots, avec des erreurs sans doute dans les détails, mais c’est à peu près la situation actuelle.

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Cette situation conduit à l’opinion que si Lagardère augmentait sa participation dans le groupe Le Monde, celui-ci pourrait perdre son indépendance. Arnaud Lagardère est en effet un ami intime de Nicolas Sarkozy, comme il est écrit plus haut.
C'est en raison de cette tentative de prise de contrôle que le directeur du journal, Eric Fottorino, est revenu sur sa démission et s'est porté candidat à la présidence du groupe. L'indépendance du journal est en train de se jouer.
On s’est aperçu qu’Alain Minc est partout dans les milieux financiers et politiques, quand on ne le voit pas à la FNAC signer son dernier ouvrage du genre « comment se faire du blé sur le dos des imbéciles ». Le furet serait devenu le principal conseiller des grands patrons français. Il est multiformes, chasseur de têtes, évangéliste selon Wall Street, il a des relations, s’occupe même des parachutes dorés pour les amis en détresse.
Si bien que l’on peut parler du système Minc.
Bien entendu, du point de vue technique, le journal à des problèmes : les recettes de l’entreprise ne sont plus en rapport avec le nombre d’ouvriers et d’employés. Le syndicat du Livre est omniprésent et pourrait mettre par terre le journal s’il le voulait. Aussi, doit-on marcher sur du velours. Il est évident que si Lagardère devenait le patron, Alain Minc pourrait liquider la moitié du personnel et se ficherait de la réaction syndicale grâce au solide matelas du groupe qui pourrait tenir le coup, sans doute plus longtemps que le syndicat. Les salaires du secteur administratif sont parmi les plus élevés de la profession, le procédé de fabrication est coûteux et les imprimeries tournent à temps partiel faute de travail. Les rédacteurs étant eux-mêmes sous certaines conditions actionnaires du journal, il est très difficile de voter au sein du groupe une diminution du personnel !
La dette du Monde, aujourd’hui, est de 100 millions d’euros, avec 146 millions d’euros de perte en cinq ans, dont 14,3 millions en 2006.
Lagardère reprendrait le titre et remplacerait le personnel de l’écrit par ses écrivaillons de l’Etat libéral. Cela ne se ferait pas du jour au lendemain, mais la nouvelle équipe serait prête pour la réélection de Sarko.
Si ce journal est repris par la droite, c’est-à-dire les amis de Sarkozy, ce sera une voix critique qui disparaîtra. Ne restera plus que le souvenir d’un grand journal, fondé par un grand Monsieur, Hubert Beuve-Méry, dont les successeurs ont été parmi les meilleurs journalistes d’expression française.
Et moi je perdrai Raphaëlle Bacqué dont j’aime particulièrement l’écriture et le reste.

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