Berlusconi, ardent septuagénaire !
Au-delà de la victoire du « cavaliere » bavard, prétentieux et richissime, on peut tirer un constat à la mesure de l’Europe sur les valeurs politiques nouvelles, de ces dimanche et lundi en Italie.
Il faudra bien que les stratèges de la gauche européenne finissent par comprendre.
Il n’y a plus à proprement parler de gauche en Europe capable de battre la droite.
Veltroni, le leader malheureux de la gauche, a pourtant réussi la performance de rassembler les petits partis, de tuer la gauche verte et même d’absorber les communistes, pour arriver à faire 37 % des voix, avec le slogan « Votez utile ! ». C’est-à-dire l’ancien score du PC italien, sur un programme socialiste centriste, vidé des derniers espoirs de modifier le système capitaliste en profondeur.
Faire risette au centre depuis la gauche est une politique à risque.
C’est à quoi se résolvent cependant tous les partis socialistes aujourd’hui. Ils espèrent un ralliement des centristes pour une politique mollement de gauche !
Jusqu’à présent, la France, la Belgique et l’Allemagne, à l’exception de l’Espagne, ont vu cette stratégie échouer et c’est dans la logique des choses. La droite commence au centre-gauche pour squatter ou annexer l’extrême droite. Ce n‘est pas en imitant la politique libérale des partis de droite, que les partis socialistes convaincront le centre de voter pour eux.
Un centre qui regarde vers la gauche, malgré le ton adopté des dirigeants socialistes, ce n’est pas pour demain. Il faudrait que cette gauche « moderne » le rêve de Di Rupo, de Hollande et de Veltroni vainque la répulsion qu’elle inspire aux petites et moyennes entreprises et au petit monde fascisant qui gravite autour. Et surtout, il faudra qu’elle leur donne plus de gages !
Dorénavant, la gauche se verra toujours battue par ce seul mauvais choix. Et même si elle parvient à convaincre le centre « qui regarde sur sa gauche » ce sera après avoir lâché tellement de lest qu’elle se fera court-circuiter par sa partie de militants restée profondément rouge et qui rendra des couleurs à une extrême gauche, mal en point en Italie, comme en Belgique.
Si la gauche veut gagner sans l’extrême gauche, il lui manquera toujours des voix. Par contre, la droite a bien en main son extrême-droite.
Mais enfin, les hommes sont ce qu’ils sont. Ils croient que les militants de toujours ne les abandonneront pas dans leur stratégie, on a vu en France aux présidentielles et en Italie, aux législatives, que ce n’est pas si simple.
L’exception des municipales françaises confirme la règle. Les particularités des Villes et des Communes jouent plus souvent pour la gauche de terrain, proche des gens et moins marquée par la politique centriste des Bureaux politiques, qui depuis Paris ou de Bruxelles n’influencent pas trop les communaux.
Reste que l’aventure de Berlusconi, même si elle consacre le triomphe d’une droite qui semble fasciner les Italiens, est à peu de chose près à l’identique du parti flamand CD&V allié aux nationalistes du NV-A.
En Italie, c’est l’Alliance du Nord qui joue le rôle de trublion.
A entendre ces nationalistes du Nord, on se croirait moins en Lombardie qu’en Flandre. Pour eux l’Italie s’arrête à Rome. Après, c’est l’étranger. « Des gens qu’on ne veut pas chez nous » disent les slogans. L’énumération des défauts des Italiens du Sud correspond à peu près aux défaut que les nationalistes flamands supposent aux Wallons : un goût pour le chômage, de la paresse à revendre, une paupérisation due au caractère wallon et enfin, l’un et l’autre, ne veulent plus que le bel argent de leur réussite serve à payer des fainéants.
Comme Leterme s’en est déjà aperçu, Berlusconi va devoir calmer ses alliés pour avoir une chance d’accéder à son ambition suprême : devenir après cette législative Président de la république italienne ! Mais pour cela, il faudra qu’il ne sombre pas dans de nouveaux scandales financiers dans les prochaines années.
Le premier test sera la manière dont Berlusconi va régler – s’il le peut – le problème des dépôts clandestins d’ordures en Italie et particulièrement dans la campagne napolitaine.
Il va se heurter à la Camorra et aux autres bandes maffieuses dont on soupçonne le cavaliere d’avoir avec elles des relations de « bon voisinage », comme un de ses lieutenants qui s’est vu condamné pour son silence sur l’origine des fonds qui servirent aux anciennes campagnes politiques de Berlusconi.
Et à propos de justice, voilà Sylvio tranquille pour un bon bout de temps. Sa qualité de chef du gouvernement le mettra hors de portée des juges et des tribunaux… et si en plus, le fringant septuagénaire se met en posture de devenir président de la République, il pourra savourer une vieillesse tranquille.