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Daerden et Sarko, têtes de gondoles.

Les récentes festivités du Standard ont montré que le Belge n’a pas eu la même réaction que le Français devant la pipolarisation des personnages de l’Etat.
Sarkozy plonge dans les sondages. Michel Daerden voit au contraire sa cote de popularité progresser.
L’idée que l’on se fait de la fonction publique n’est pas la même en Belgique qu’à Paris.
Aurions-nous plus d’indulgence pour les politiciens exhibitionnistes que l’électeur français ?
A vrai dire, Sarko a mis en scène sa vie amoureuse, Daerden son imprégnation alcoolique. Serions-nous pudibonds et gaiement intempérants ? Un peu comme les Chtis dans le film de Dany Boon ?
Si Daerden nous eût parlé de ses relations féminines, aurait-il plu autant ?
Sensible au drame humain, la dramaturgie obsessionnelle du bien public ne souffre pas d’exception. La pipolarisation des hommes d’Etat attente au sérieux et à la grandeur de la politique. L’électeur attend que l’élu mette entre parenthèse sa vie intime pendant l’exercice de son mandat.
Les hommes publics avaient résisté jusque là à la tentation de se donner en spectacle, comme des vedettes de la télévision. Il en cuisait à celui qui, parfois à son corps défendant, voyait les projecteurs braqués sur sa vie privée. Ce ne sont pas les erreurs politiques qui ont terni le parcours de Wilfried Martens, mais le fait-divers de son divorce. L’ego transcendantal se camouflait tant bien que mal sous le zèle du bien général.
Aujourd’hui, alors que Sarkozy se répand dans un parc d’attraction avec une chanteuse, afin d’officialiser sa liaison, c’est dans les tribunes du Standard qu’un ministre régional bégaie sa joie et embrasse tout qui est à sa portée, hagard, titubant et complètement beurré, pour quelques jours plus tard, expliquer devant les caméras de Canal + que les gens l’aiment, parce qu’il est comme ça, nature. Comme si être ivre était un ajout à des qualités !
Sa popularité aurait été plus grande encore, s’il avait eu la bonne idée – ou l’irrépressible besoin - de vomir sous l’œil des caméras !
Un citoyen lambda d’esprit critique trouverait étrange qu’un ministre régional choisisse les tribunes du Standard pour s’exprimer. Car toute manifestation verbale d’un ministre est politique.
Ce n’est plus si étrange depuis l’ouverture des pouvoirs publics aux affaires privées. La confusion est telle, que les élus les conglomèrent. Rudy Demotte ne fait-il pas de la représentation commerciale auprès des entrepreneurs, comme on a pu le voir récemment devant des industriels flamands ?

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Cette nouvelle exhibition du moi n’est peut-être pas si innocente qu’on le croit. Si la France ne pardonne pas, la Wallonie n’en est pas là, parce qu’elle n’a pas encore compris que l’usage des tribunes du Standard pouvait être une adroite manière de se faire voir de l’opinion.
A la suite de l’abaissement général de nos pays décadents, les hommes d’Etat s’adaptent, sinon ils disparaissent.
Daerden fait mieux que s’adapter, il anticipe sur ce que la politique sera demain : un show, dont il vaut mieux être le pitre que l’accessoiriste.
Nous aimons plus les vantardises, les démonstrations intempestives, bref l’état d’ébriété que l’état intelligent.
C’est que l’état intelligent voisine avec la cuistrerie. Quand on voit un certain sérieux, il y a des appels d’air qui s’imposent. On en arrive à souhaiter que Francis Delpérée fasse un pet au milieu de ses démonstrations.
Est-ce pour autant souhaiter les clowns aux professeurs ? Les jongleurs aux comptables ?
Quant aux tribulations sentimentales plus en actualité en France qu’en Belgique, Sarkozy et Royal n’ont pas coupé à la pipolarisation, plutôt voulue par l’un et acceptée par l’autre avec un certain fatalisme.
Je crois qu’en Belgique, les réactions du public pour un ministre d’un sentimentalisme exubérant eussent été les mêmes, en vertu d’un fond de romantisme qui nous est resté. Nous distinguons toujours le sentiment amoureux comme plus intime que l’exposition de certains défauts qui passent pour « aimables » et consensuels. L’amour en politique des hommes et des femmes ne s’exportent pas encore du côté des paillettes et des strass.
Mais il n’est pas trop tard pour voir un jour des hommes ou des femmes montrer leur cul au public ravi, en vertu du principe que parfois le dépouillement précède le vote.
Que les voyeurs patientent. On n’en est pas loin.

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