Thomson et Le Pen.
Jean-Marie Le Pen ne manque pas de suite dans les idées. 17 ans après sa condamnation pour sa déclaration que les chambres à gaz, « sont un point de détail de l’histoire », voilà qu’il remet ça dans une interview à un journal breton.
Aujourd’hui, les choses ont bien changé et cet homme de 80 ans à l’air plus pitoyable que dangereux. Il espère encore attiré l’attention par une poursuite en justice qui le remettrait en selle. Car on en est là. Cette loi, dont le but est d’empêcher à dire tout haut ce que les cons et les malhonnêtes pensent tout bas, se réduit ainsi à l’aune commune de la connerie militante.
La Justice se donne parfois des airs aussi fascistes que ceux qu’elle poursuit.
A moins que, faisant preuve d’intelligence, les magistrats chargés de l’appliquer laissent dans la confidentialité d’un journal breton, les élucubrations de ce vieux récidiviste !
Car, le Front national est politiquement mort et ce serait bien de n’en point trop parler.
Flaubert lors de son voyage en Egypte se rendit à la colonne de Pompée près d’Alexandrie. Quelle ne fut pas sa stupéfaction de voir gravée en lettres énormes au bas du monument la signature d’un touriste du nom de « Thomson » !
Dans sa correspondance à Louise Colet, il évoque la présence têtue de ce graffiti. « Que pouvait-il y avoir de plus énorme que la bêtise sublime consistant à graver son nom en lettres immenses sur la colonne de Pompée », écrit Avita Ronel (1) ?
Flaubert saisi par cette horreur, confond le monument et l’acte imbécile, au point d’envisager d’écourter son voyage. Il pense trop à ce Thomson qui le hante de sa bêtise, comme on serait hanté de la sotte présence d’un tagger aujourd’hui. Le plaisir de la découverte des ruines antiques est rompu. Et c’est ainsi par le truchement de ce grand écrivain que Thomson, triste maniaque du surmoi, entra dans nos esprits par la petite porte d’un autre monument : celui de la Correspondance de l’écrivain.
Ne faisons pas de Jean-marie Le Pen un nouveau Thomson.
Dans l’interview au journal breton, revenant sur sa condamnation de mars 1991, Le Pen persiste avec le seul argument qui l’écarte du fond « Est-ce un pays de liberté où une phrase, si contestable soit-elle, et prononcée par un homme public, mérite 150 millions d’amende, et la mise à l’index de l’individu, et de son parti ?. » Force est de reconnaître qu’il a raison et que cette Loi aussi stupide que les propos négationnistes sur la question des camps du 3me Reich, ne grandit pas la démocratie et jette le trouble dans les consciences et brouille le sens de la liberté d’expression, sinon qu’apparaît le doute qu’elle n’est pas la même pour tous.
Il est dangereux pour les tenants de la liberté d’en énoncer les principes en même temps d’en limiter les effets, même si cette limitation clôt le bec à des malfaisants et à des esprits peu éclairés.
Qui peut se déclarer propriétaire de la vérité et d’en établir les règles, dont la principale serait de rogner les ailes des canards suspects ?
Les graffitis qui souillent les façades dans la cité peuvent disparaître par des moyens mécaniques. Seule la conscience collective efface ceux de la mémoire.
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1. Avita Ronel, Stupidity, in Edit.Stock, Collection Essais Points, traduit de l’anglais par Céline Surprenant, avril 2008.