Quand la réalité dépasse la friction.
Ce qui m’intéresse dans l’affaire Lizin, ce n’est pas Anne-Marie elle-même. Il y a une sorte d’unanimité contre elle. Je n’aime pas la chasse à courre, surtout au moment où la bête est cernée par les chiens, et que le piqueur « sert » l’animal de sa belle dague, alors que le sonneur de cor joue l’hallali. C’est con, c’est médiéval et les snobs aiment ça.
C’est exactement ce qui se passe au PS. L’audit, les socialistes mondains adorent.
D’autant que la patronne hutoise a bien servi son parti. Si bien que sans son ego dramatiquement surdéveloppé, elle n’en serait pas là. Ce n’est pas la première fois qu’un membre éminent de la junte est fauché par un plomb comme dans une baraque de tir, pour se redresser la seconde après, s'offrant au tireur suivant.
Anne-Marie Lizin ne dépare pas ce lot de « surdoués » dont Di Rupo raffole. Cela va très bien, jusqu’au jour où on s’aperçoit que ces bêtes de concours font autant de conneries que le populo qu’ils sont censés représenter et qui, à cause d’eux, n’a plus accès à la sacristie du boulevard de l’Empereur.
Ce qui est édifiant, ce sont les personnages que Di Rupo a mandaté pour un petit tribunal entre amis, devant lequel le Docteur Jean Bury avait été envoyé en kamikaze plaider la cause de la sémillante hutoise.
Le Comité d’audit est composé de Jean-François Cats, président honoraire de l’Institut des réviseurs d’entreprises, de Philippe Lallemand, conseiller spécial du comité de direction d’Ethias, ancien directeur de l’IEV, et d’Anne Massart, avocate, bref, les thuriféraires de la pensée du Maître ont donc été choisi, afin de trancher et prendre une décision.
L’Institut des Réviseurs d’Entreprise est un bidule qui tourne autour des sociétés qui ont du mal à y voir clair dans leurs comptes, comme les banques, par exemple. Vous avez déjà vu cet organisme dénoncé quoi que ce soit en matière de fraude bancaire, ou de mauvaise gestion ? En matière d’éthique, on pourrait trouver mieux, au vu de la situation actuelle.
C’est bien la première fois qu’un membre du PS se fait « réviser » de la sorte, anticipant ainsi sur un jugement éventuel d’un Tribunal correctionnel. Et si Anne-Marie est « sanctionnée », n’est-ce pas anticiper sur une décision des juges pour leur dire « Allez-y, celle-là, on vous la laisse ! ».
Monsieur Cats est licencié en sciences économiques.
Voilà son confrère Philippe Lallemand, professeur de droit à l’ULB. On peut dire que c’est du lourd pour juger l’opportunité de l’indéfrisable et surtout la véracité des faits de la mairesse sur le compte de l’hôpital de la Ville. On dira qu’un garçon coiffeur affilié au parti aurait largement suffi afin de détailler ce qui de la mise en pli ou du coup de peigne était superflu.
Mais, sait-on jamais, entre gens influents et universitaires donc avertis des chicanes et autres beautés juridico-administratives, il faut être prudent.
A cet illustrissime Comité, il fallait une avocate maison. Anne Massart fait certainement bien l’affaire.
Et voilà le Tribunal révolutionnaire formé, sous la houlette de Georgette Perigny, ou la solution Enablon, l’active démiurge du bureau « spécial » du PS.
Mais quelle horreur ! a sangloté le chœur des pleureuses de ce théâtre grec !
On ne sait pas trop si cette mise sur la touche sera suffisante pour retrouver un peu de sang-froid avant les élections de juin.
Si l’affaire hutoise se compare à celle d’Amay, la proche commune naguère le fief de la famille Collignon, et terre natale de Freddy Terwagne, c’est plutôt mal parti pour la pêche à l’électeur.
L’éditorialiste du Soir ironise sur super Zinzin « Malade à mi-temps, faudra-t-il que les auditeurs du PS se portent au chevet guilleret du Dr Anne-Marie pour que Miss Lizin, mourante, reconnaisse l’évidence : elle a dépassé toutes les bornes. Confondu gestion privée et publique de la Cité. Ancré une politique féodale. » L’éditorialiste du Soir aurait pu ajouter afin d’égayer ses lecteurs : « A Huy, il y avait le Pontia, à présent, il y a le pontage ». C’était rester dans le mauvais goût. Il eût été parfait !
C’est difficile à dire, mais avec les affaires de Charleroi et maintenant celles de Huy, il me semble que les mandataires socialistes sont bien mieux et plus souvent étrillés que leurs collègues du MR et du CDH en position délicate et dont on parle avec mesure et distanciation.
Est-ce que le PS prête plus à rire que les autres ?
Ses représentants sont-ils plus pittoresques et originaux que les Fournaux et les Trémeries ?
Ou bien dans la conjoncture présente représentent-ils quand même un certain danger pour le système, au cas où Di Rupo, afin d’éviter une nouvelle casquette électorale se déciderait à représenter vraiment ses électeurs ?
Quant à parler d’éthique au sujet du cas Lizin, c’est singulièrement raccourcir l’historique du panel au pouvoir, à cette malheureuse histrionne d’un gros bourg.