Eutychiens, Pélagiens, Antitactes et…
...ta soeur ?
Dulcinée peut vivre désormais tranquille à l’ombre des moulins. Quichotte est devenu sage et fou de Dieu, Cervantès l’avait plutôt vu fou et poursuivi par les archers de l’Inquisition. En 2009, politiquement correct, il embrasse toutes les religions du monde. D’athée à agnostique, il découvre la philosophie d’André Comte-Sponville en livre de poche…
C’est le grand geste d’apaisement nécessaire à son entrée dans la civilisation du Centre. Désormais, il croit à la diversité universelle établie en harmonieux accords des multiples églises ouvertes à la transcendance et au bourrage de crâne.
Les intégristes sont à l’aise dans l’œil du cyclone. C’est en-dehors que ça se gâte.
D’intolérant laïc (ils sont si peu nombreux !), le voilà intolérant religieux, entre-temps, il s’est multiplié ! Il fait désormais partie de la grande famille des mutilés de la raison : il a la foi !
Comme Adolphe, Malraux avait la mèche de côté lorsqu’il lança que le XXIme siècle serait religieux. Il avait l’air heureux de son effet. Il le serait moins aujourd’hui !
Depuis, les frétillants de l’extase se sont taillés des costards dans le droit divin.
Quichotte est désormais le dépositaire d’une quête : celle du respect, sommé d’admirer les croyances jusques dans le tragique dénouement d’un ciel commandant aux assassins.
Les quelques rares résistants à la supercherie, poursuivront sans lui leur logorrhée blasphématoire à la condition de la faire en silence ! Ainsi les religieux croiront qu’ils ouvrent la bouche pour proférer des cantiques et des actions de grâce.
Tout est affaire de croyance et la croyance est dans tout.
Le 17 février 1600, Giordano Bruno fut brûlé vif à Rome, Galilée, plus hypocrite, eut la vie sauve grâce à quelques reniements qui ont fait sa renommée, au lieu de faire sa honte.
Les consuméristes se rassurent : il n’y a plus d’hérétique ; puisqu’il ne coûte rien de croire, consommons de la croyance.
L’incongruité n’est plus dans la religion, c’est de s’en prendre à elle.
On a assassiné la liberté d’expression, au nom de la liberté du culte.
La démocratie de velours tapisse ses commissariats des têtes d’infidèles, laissant aller aux plus reculées momeries la foule menaçante des croyants.
Dans le terreau de la gigantesque consommation, pousse un champignon des plus chétifs. Le moindre souffle peu le courber. Mais, ce n’est qu’une illusion, son mycélium est partout. Cette plante qui n’en est pas une, surgit en amanite phalloïde tantôt à Lourdes, tantôt à La Mecque.
Son engrais est l’argent, son jardinier le riche, sa méthode, c’est selon ce qu’il trouve formé à sa loi, pour asservir le monde aux caprices du Dieu dont il use à sa guise.
La dévotion est essentielle à la bonne tenue du Centre.
La pensée dévote y est à l’aise dans sa prépondérance obscène.
Encore quelques lois et elle aura gagné la partie en étouffant le dernier anarchiste. Qu’est devenu le temps où Jean-Baptiste Colbert, contrôleur général des finances, pouvait écrire « Je voudrais voir pendre le dernier des rois avec le boyau du dernier des prêtres » ?
« Les sots font de leur morale une masse compacte et indivisible, pour qu’elle se mêle le moins possible avec leurs actions et les laisse libre dans tous les détails », cette réflexion de Benjamin Constant détermine en quelque sorte ce que l’avenir laissera comme espace à la liberté.
Dieu est le bénéficiaire de cette turgescence extasiée par le biais de ses tuteurs. Puisqu’il est sourd, muet et aveugle, la foule de ses interprètes n’a jamais été aussi inspirée !
Ainsi par commodité, on lui fait tout dire. Il est devenu ce que ses adorateurs ont voulu qu’il devînt. Dans leurs enluminures, ils l’ont fait descendre sur la terre. Il est resté. C’est pratique, en cas de coup dur, c’est Lui qui portera le chapeau.
Et voilà que l’imagination prend les hommes à son piège pour enflammer le reste du monde.
On serait déjà depuis longtemps sur Mars à chercher les traces d’une vie qui fut, peut-être, identique à la nôtre si les trois quarts des savants, depuis Galilée, n’avaient eu à lutter contre l’obscurantisme chrétien. Cette année, il y a deux cents ans, naissait Darwin. Pal mal d’églises pensent en toute humilité chrétienne, qu’il n’aurait jamais dû naître …
La religion, facteur de régression, oui, puisqu’elle universalise le mensonge, qui, même sous couvert d’une morale particulière, n’en reste pas moins un mensonge.
Darwin qui avait compris que les rapports avec autrui doivent être le résultat d’une diplomatie de savoir-vivre s’était déclaré agnostique dans l’Angleterre victorienne. Mais c’était pour ne pas avoir à démontrer la non existence de dieu.
Nietzsche et Darwin, Bruno et Galilée, tous bien morts ! Les peuples sont désormais eunuques.
Commentaires
Bravo pour l'analyse et d'accord avec toi. Mais pour ta conclusion, faudrait pas croire qu'il n'y a plus que toi qui en aie...T'es pas tout seul Marcel...
Postée le: Tounet | février 10, 2009 11:58 PM