Putain d’époque !
-Tel que tu me vois, depuis l’affaire avec Tonton, j’ai décroché…
-T’as fait combien ?…
-Trois, même pas.
-T’es toujours avec la grande Josée ?
-C’est une vaillante. Elle m’a attendu… Je l’ai fait décrocher aussi… On vit peinard dans un pavillon sur les hauteurs. De temps en temps, elle fait une turlute au Turc qui ristourne sur les légumes… pour pas perdre la main, quoi…
-La gagneuse que c’était !
-Elle le serait toujours, si j’y avais pas dit d’arrêter, rapport au milieu qu’a changé, puis à 63 piges, elle prenait une heure tous les matins pour en paraître vingt de moins à midi sur le boulevard. Ça se voyait dans la comptée. Sa spécialité, la brouette tonkinoise, elle pouvait plus à cause des rhumatismes… Deux, trois clilles, d’anciens amateurs, c’était un max… elle les travaillait au souvenir… Josée aurait pu remonter aux cachetons chez Léon, la danse des poids clipsés au bord des lèvres. Y a des mordus. Dix euros les 50 grammes, enfin tu sais… J’ai pas voulu. Jenny-la-cuite a fini au kilo 5, pleine déchéance !
-Elle se serait fait arracher le cul pour toi… C’est le cas de le dire.
-Tu te rappelles le record de Bè-Kwèr ?
-Si je me souviens ! Dix-sept l’après-midi à éponger, trente-deux après la pose !
- M’en parle pas. Les bonnes affaires, c’est fini. Les Beurs, les Rastas et les Roumains nous laissent plus rien. La semaine dernière, Suzy est revenue avec un coquard. J’y ai dit « qui t’a fait ça ? » Tu vois l’homme que je suis ? Je mettais déjà mes bagues dans le tiroir… je cherchais mon coup-de-poing américain…
-Et alors ?
-Tu m’connais, j’ai toujours respecté le travail des autres ; faut pas endommager les travailleuses. J’suis un sanguin, parole. Elle a craché le morceau. C’est un certain Rostoff ou Roskoff qui lui a mis une beigne, on le connaît pas bien. il est en assoce avec Ali-le-flingueur. J’étais en chemin pour lui mettre une bastos, puis j’ai réfléchi, plonger à mon âge…
-J’ai fait préau avec Ali, l’année dernière. C’est un méchant.
-C’est une génération qu’a le goût de l’horrible. Rien ne les arrête…
-Les cons, ça n’a peur de rien… C’est même à ça qu’on les reconnaît…
-Puis, ils font pas du blé comme tout le monde. Ils pratiquent la politique en mosquée intégriste… ils veulent pas de business avec les gens au pouvoir.
- Dans un sens, ça évite des morts célèbres. Mais, ils perdent du blé. Avec les politiques on est cool. Ils font leurs petites affaires. On fait les nôtres. C’est deux mondes parallèles, personne se touche, tout le monde se voit !... C’est nous qui prenons les risques, eux jamais !...
-En tôle, Ali pouvait pas être trop cruel avec les autres sans se faire épingler par les matons qui le suivaient sur sa réputation. Alors, Ali-le-flingueur s’est passé un anneau dans le nez. Il s’était fait le trou avec une fourchette !... Il projetait un piercing sur la langue, quand on n’en a plus voulu.
-Et Rostoff, t’as connu ?
-Boris ? Ton Russe est Serbe. Il a fait la guerre, là-bas, un peu dans tous les camps… On raconte qu’il a le goût du défendu, de l’exploit, du génocide…. Tu sais, nous autres les hommes, on a des principes, un code, enfin on a su ce que valait Boris-le-fondu, c’est ton Rostoff ou Roskoff. Y a pas mieux que cette pourriture pour saloper les bons coups… Revanchard sur les principes. C’est un émotif actif, un peu tantouze, un peu sniffeur, pédophile, ancien snipeur par goût, c’est le révolutionnaire du crime. Les flics en ont peur, c’est eux qui changent de trottoir !
-Je vais calmer Suzy qui veut remonter au turf, sans rien lâcher en commission à Boris ! Moi, j’en suis plus si sûr. C’est une nature à l’ancienne, Suzy, : tout à son homme… Je vais pas pourtant caner ! Où qu’elle serait ma réputation ?
-Donne lui quinze jours de bon. C’est une vaillante.
-Je crois que je vais décrocher aussi.
-Avant l’afflux des grossiers et des vils, on a pris du bon temps.
-On gagnait bien aux campagnes électorales. Aux vacances, on visitait les riches…
-On était apprécié à la belote…
-Faut dire qu’on avait une autre gueule que celle qu’on a maintenant.
-J’avais été jusqu’à payer une Jaguar type E à Dolorès, ma première... Elle en jetait terrible quand elle sortait de la rue du Champion où elle avait fait ses dix sacs, et moi qui l’attendais avec son Yorkshire en laisse, mes souliers vernis, ma gourmette qui sortait de la manche de mon blaser. On aurait dit un président du Rotary !...
-T’as plus eu de ses nouvelles ?
-Elle valait son prix. Elle a épousé un marchand de vin qui est devenu député ou sénateur… J’y ai pas perdu. Encore aujourd’hui, j’ai qu’à téléphoner, son mari arrive tout de suite… Il mangerait dans ma main, ce type…
-Qu’est-ce que les jeunes vont devenir, si le métier fout le camp ?
-Les jeunes qu’ont perdu le code ! Les jeunes qui te troueraient pour dix euros ! Mais qu’ils aillent se faire foutre.
-Tout fout le camp, quand y a plus de morale… Mais quand même, l’artisanat est sans bras… plus personne pour transmettre… Les brutaux n’ont pas de cervelle.
-Y a plus que la religion pour sauver le monde. Tu te rappelles, quand tout le claque, Madame et Monsieur en tête, puis les filles bien propres et en chapeau qui suivaient derrière, direct aux chaises réservées à l’église Saint-Nicolas pour la grand’messe ! Merde, c’est vrai tu te rappelles pas. T’étais trop jeune… Même que les affaires se traitaient avec les gris de la Wehrmacht, dans les travées, tout ça correct, à voix basse, au respect…
-Mon père m’a dit. Nos plus belles années ont été les années de guerre…
-Avec l’Europe, la fête, ça risque plus…
-Y a plus qu’à chialer sur les deux Luger du Vieux qui restent en souvenir…
Commentaires
salut sa va j 'eme les femme est les prainsaisse qand mes bezer
Postée le: ahmed ahdidouch | décembre 30, 2009 01:08 AM