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Le libéralisme est plus qu’avancé…

…il est faisandé !

Après la justice de classe : lourde pour les petits délinquants, inexistante ou presque pour les gros fraudeurs, les politiciens ripoux et les banquiers malhonnêtes, voici le décervelage et la misère des travailleurs d’en-dessous au regard des fortunes encaissées par les patrons d’au-dessus.
Sauf que cette fois on n’est plus au temps de germinal. On ne sent plus la camaraderie des corons et le syndicalisme militant donner de l’espoir et réchauffer les cœurs.
Le néocapitalisme a perçu un meilleur rendement dans l’individualisme. Aujourd’hui, en 2009, l’homme au travail est seul dans son entreprise.
Le socialisme ayant retourné sa veste, les syndicats faisant office de mont-de-piété des plaintes, il reste le suicide…
Le geste est définitif, mais il laisse un goût amer de gâchis humain.
Le suicide au travail n’est pas un phénomène nouveau. Les médecins du travail, exécutants passifs des demandes patronales, ont quand même signalé ce phénomène depuis vingt ans.
Aujourd’hui que la presse en parle – même dans Voilà – on s’en inquiète.
Peugeot, puis EDF ont fait tant de pression sur les personnels que les phénomènes de stress s’y sont accumulés. On a fini par s’en apercevoir jusque dans les chaumières. On jase. C’est (1) pas bon pour les friqués, pour le système, pour les libéraux. Ça fait mauvais genre.
Le plus dramatique, c’est que le décervelage et la pression exercée sur les travailleurs est un phénomène incontrôlable qui ne peut pas s’arrêter en raison de la mondialisation de l’économie, sauf si on casse la belle machine productiviste, ce qui serait un grand malheur pour des types de la chiourme de l’espèce de Louis Michel, qui ont besoin de galériens pendant qu’ils se grattent les couilles.
La raison pour laquelle aujourd’hui on considère - passé un certain seuil de tolérance - que la vie ne vaut plus rien, n’est pas difficile à comprendre. Elle commence par la perte de l’estime de soi à partir de l’évaluation de son travail comparé aux autres salariés.
C’est l’aboutissement de cinquante années des systèmes Taylor & Parker and C°, joint aux années de « découvertes » et aux possibilités de l’ergonomie et de la médecine sportive d’endurance.
L’idéologie du mesurage reste la chose la plus abjecte que je connaisse. Elle consiste à entreprendre la comparaison du plus faible sur le plus fort, afin de globaliser l’ensemble, sans tenir compte qu’il s’agit ici d’êtres humains et non pas de chevaux de débardage.
Bien entendu, la surveillance de l’application de ces théories constate de plus en plus souvent la perte de motivation. Les petits chefs sont alors contraints de mixer les services, de déplacer les personnels, de chercher à rendre de la motivation par des menaces, des baisses de rémunération sous forme de suppression de primes à la production. Peine perdue, c’est un fiasco. Pour activer le rendement, le fouet n’a jamais eu qu’un temps limité.
Alors on saque dans les « vieilles » couches de l’usine que l’on remplace par des jeunes, espérant par là chasser « le mauvais esprit ».
Avant, le syndicaliste militant était considéré comme le meneur. Comme il n’y en a plus guère, le vieil ouvrier ou le vieil employé en fait office.

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L’ordinateur, dernière conquête des productivistes en a ajouté sur le petit chef. L’écran qu’on pose sur chaque poste de travail, y compris sur une chaîne de montage, a eu un résultat imprévu. l’ordinateur fait dorénavant office de flic. Résultat, le posté se contrôle lui-même !
L’exigence de la qualité totale, c’est comme le bonus malus des assureurs, on tente d’y échapper par la fraude. On triche avec les règles du métier, et on y consent. Les salariés ont des comportements qu’ils réprouvent moralement. Ces méthodes de management conduisent à ce que chacun devienne l’adversaire de l’autre. Le tissu social se désagrège. On finit par se dégoûter soi-même. On perd son honneur, sa dignité, on perd tout… même un doigt dans les fraiseuses !
L’usine devient une prison bourrée de flics, de délateurs, d’envieux, de malades, de caméras.
Ils croient encore aux vertus de leur travail, quand on leur balance qu’ils ne valent rien et qu’ils coûtent trop à l’entreprise et qu’on les menace d’être dans la fournée suivante de licenciés, alors certains pètent les plombs.
Un suicide au travail est avant tout un geste symbolique, une manière d’être allé tout seul jusqu’au bout et d’en assumer la responsabilité par un acte fort sur sa propre personne.
La vie, à un moment, ne vaut plus la peine qu’elle se continue. On y met fin, en offrant son cadavre à son patron et à ses collègues.
Evidemment il existe des gens assez solides pour résister à ce dérapage.
De nos jours, cela devient malsain de trop s’engager dans son travail. On en ressort plus souvent meurtri que satisfait.
Ne se suicident pas les gens qui ne prennent pas au sérieux ce qu’on leur dit sur le travail. Les quidams de bons conseils, moralistes et politiciens en tête, perturbent tous les jours par leurs discours insensés d’abord les écoliers, ensuite les jeunes apprentis dont les impressions à leur première place font qu’ils croient être tombés dans un trou d’où ils ne verront plus jamais la lumière.
Ils acquièrent très vite le sentiment qu’on les a trompés. Ils en sortent corrompus à jamais ou insurgés.
Raconter leur souffrance, c’est leur parole contre la parole de tous ces enflés qui nous mentent pour leur propre intérêt et qui conduisent les foules en enfer afin qu’ils puissent mieux jouir du paradis que nous leur construisons.
La situation est très particulière dans les entreprises en 2009. Celles-ci demandent une adhésion complète, elles vous font des promesses et puis elles vous virent, non sans avoir entre-temps pris tout ce qu’elles croyaient leur être utile à ceux qui ont mordu dans leurs salades.
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1. Je sais je devrais écrire « ce n’est pas difficile » etc., mais je m’en fous, je laisse ce soin une fois pour toutes aux avocats et aux impuissants de la grammaire.

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