Thomas Woodrow et le petit Nicolas.
Il faut remonter au président américain TW Wilson (1) pour trouver une analogie entre sa psychose et celle d’un autre président, Français celui-là, Nicolas Sarkozy.
Adolescent, Wilson s’était identifié au Christ. L’individu qui s’identifie au Christ, ne l’est pas, évidemment et il en a conscience. Cependant le névrosé qui s’est identifié au Christ, quand il se voit harcelé dans son quotidien de par sa fonction, se persuade qu’il a atteint le but sans lutter, rien que parce qu’il s’est soumis au Père. Même en cas de défaite totale, sa soumission l’encourage à penser l’inverse.
Sarkozy, lui ne s’identifie pas au Père, il est le Père.
Tout dans son discours faussement modeste, sa dialectique tenant à prouver que son raisonnement est juste, a priori, tout argument contraire est donc faux ; la manière dont il écoute les gens pour finalement n’en pas tenir compte, dénote en lui une croyance forte : il incarne la puissance divine...
Dès son intronisation, il l’a suffisamment annoncé. Il n’y a et il n’y aura désormais qu’un seul responsable.
La blague qu’on se répète dans les rangs de l’UMP est significative : « Une voiture vide s’arrête devant le perron de l’Elysée. Le premier ministre Fillon en sort ».
L’hôte de l’Elysée a fait mieux que ressusciter Lazare. Il a créé un homme qu’il a sorti du néant et pour montrer sa puissance à tous, quand l’entretien est terminé et que Fillon rentre dans sa voiture, celle-ci quand elle passe le porche de l’Elysée est de nouveau vide.
Alors, au Père, il fallait le Fils.
Le fils qu’on martyrise, qu’on insulte, à qui on reproche son jeune âge.
Le Père semble lui dire « Ta souffrance, mon Fils, rachètera les Français ».
Contre l’avis d’une partie de son parti, sans doute après en avoir arrêté la stratégie à l’Elysée avec ses conseillers, Nicolas a oint Jean Sarkozy. Avant de prendre le quartier de la Défense à bras le corps, Jean n’aura à craindre que les fracas de l’opposition, qui seront autant de vagues qui viendront mourir contre la superbe du pouvoir.
Pendant huit ans, les Etats-Unis ont été dirigés par un malade mental. Le président Wilson s’est senti en communication avec Dieu. Il l’a déclaré plusieurs fois, être guidé par une puissance rayonnante qui se trouvait en-dehors de lui. Le Traité de Versailles qu’il a signé en 1919 avec les Alliés, c’est lui qui l’a voulu de telle manière qu’il est en grande partie responsable de l’avènement d’Adolphe Hitler au pouvoir dès 1933, à l’origine, une vision qu’il aurait eue de la Sarre, région industrielle d’une importance capitale pour l’hégémonie future du Reich et que les Français voulaient annexer ! Il en a fait un land occupé puis abandonné à la déconfiture de la République de Weimar.
L’infaillibilité présidentielle est partagée entre Wilson et Sarkozy.
Le soutien de ce dernier en 1995 à Edouard Balladur qui se voyait détrôner Jacques Chirac, est une première erreur. Si l’on regarde de près son parcours, « son infaillibilité » annoncée est jalonnée ainsi de bourdes. Non seulement, il s’était trompé, mais encore cette erreur fut lourde pour lui de conséquence. Il perdit la confiance de Chirac. Il lui fallut plus d’une fois manger son chapeau et rabaisser de sa superbe. La haine pour Villepin date de cette époque, un Villepin triomphant issu du cabinet de Chirac, remplaçant Raffarin usé par le pouvoir et forgeant avec le président Chirac le traquenard de Clearstream dans lequel Villepin finit par tomber avec quelques comparses.
Sarkozy, s’accrochant, maître de l’UMP, successeur légitime de Chirac qui avait jeté le gant abandonnant Villepin au milieu du gué, la cène de la dernière version du nouveau testament, il la vécut au Fouquet’s.
Certes, il fallut beaucoup de talent à Sarkozy afin de traverser ces années de disgrâce sans trop s’éloigner du pouvoir, mais c’est le propre du Père de n’avoir de la mémoire que pour la trajectoire ascensionnelle, celle qui le hisse au-dessus des hommes.
L’Histoire nous apprend que les réussites exceptionnelles en politique finissent souvent dans le caniveau. A force de vouloir être partout, on finit par n’être plus accepté nulle part. Champion des promesses non tenues, héros malheureux d’une crise économique qu’il n’avait pas prévue sur le temps qu’il tenait sa promesse du Fouquet’s de plafonner les appétits de l’Etat sur les fortunes de ses amis réunis ce soir-là, le Président ressemblerait plus à un dieu païen que des monothéistes contestent, que le Dieu unique et souverain régnant sur la France, qu’il se croit être.
A quelqu’un qui demanderait comment cela pourra-t-il finir ? On répondrait : mal.
On a raison depuis Pétain et même avant, de se méfier des hommes providentiels, surtout ceux qui nous annoncent qu’ils font le sacrifice de leur vie en la donnant à la France.
Nicolas, n’en est pas encore là.
Comme le Président Wilson, de lui, on peut s’attendre à tout.
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1. S. Freud, W. Bullit, le Président Wilson, in Petite Bibliothèque Payot, 1990, préface de Gérard Miller.