Solange a l’emploi !
-Mon con t’as la cote qui baisse. Je fais ta pub comme je peux. Mais t’es comme Bayrou, tu vois tes troupes qui se barrent. Tu pourrais pas nous sortir une bonne histoire de fesses pour remonter ton sondage en berne ? Je te dis ça rapport à la photo d’hier. J’ai reconnu le derrière de Solange ! Pour dire les choses, elle a de quoi s’asseoir… L’époque est à la légèreté, à la superficialité, merde !... T’en as pas marre de tenir les grandes orgues aux Te deum des malheurs, des accidents, des inondations, des guerres, avec le cul qu’elle a ? On attendait autre chose ! T’es bon qu’en photo, là t’es le meilleur… Au lieu de quoi, on a eu droit au couplet philosophique, à la petite note de plus qui fait déborder la litote, qui débordait pourtant déjà ailleurs, et là, on était tout à fait pour…. Et puis, après que tu nous aies fâcheusement pris la tête, le soir, avec Solange t’es au festival du maillot de corps, t’es le Brando du Tango… tandis que nous on s’allonge dans les angoisses à se mordre le chinois… tu t’en fous bien de la trouille qui nous prend aux missiles que tu fais pleuvoir sur les lecteurs, aux folies nucléaires, au gaz moutarde ! Mais qu’est-ce qu’on t’a fait pour que tu nous files la scoumoune ? T’en veux à tout le monde, parole ? D’accord, parfois c’est drôle de se foutre de la gueule des gens, surtout ceux qui sont pas du même bord, les beaufs, les supporters, mais les autres… ceux qui t’ont rien fait ? Tu leur dilates le berlingot par les soupirs qu’ils ont du bas à tes pamphlets, tes diableries ! Tu flingues tout le monde. T’aime personne !...
-T’as fini ?
-Non ! Tu penses si je t’ai percé sous tes dehors moralisateurs. Le peuple, hein ! crapule… tu t’en branles ! Je pense même pire. Il te débecte. Il te fait chier et t’oses pas le dire !...
-Dis-moi salaud, à quoi t’as reconnu Solange, qu’était de dos sur le passage protégé ?
-C’est pas difficile. C’est justement de dos qu’on la reconnaît le mieux. Qu’est-ce qu’elle foutait en banlieue ?
-T’as pas lu dans le phylactère ? …était partie chez Poildur pour un engagement.
-Une esthéticienne, dans une fabrique de poêles en fonte ?
-Je vois pas le rapport ?
-Tu vois pas le rapport ! Tu vois plus rien depuis que tu joues à l’économiste, au bon docteur, au je-sais-tout ! T’es Alceste qui s’envoie Philinte… bon dieu de merde ! c’est pourtant pas à Solange que tu causes de maître Eckart ?
-Tu manques de mots. Depuis que je te connais, tu manques de mots pour dire les choses. Et quand tu les dis, t’es vulgaire. C’est plus fort que toi. C’est pas le poids des mots qui te travaille, c’est le poids de tes couilles.
-Ah ! comment tu les dirais, toi, les choses ?
-C’est innommable, comme dieu qu’on peut pas écrire le nom, que c’est interdit ; le zyeuter, comme le mikado jadis… t’es mort !
-Des fois qu’il se curerait le nez ?
-Vas-y… tu peux pas t’empêcher. Le sexe, c’est vrai, s’il a des centaines de noms, on ne sait comment l’appeler. Surtout quand c’est celui de Solange qui te travaille le potelet… Ah ! que tu voudrais bien savoir… comment il est le loukoum à fifille !... On peut fouiller dans les anciens manuscrits, les livres sacrés, jamais on voit celui qui mettrait tout le monde d’accord, le buisson ardent de ma savoyarde. Faut pas s’étonner que les peintres pendant longtemps ont refusé de le montrer sous leur pinceau.
-A se demander comment les vierges faisaient pour pisser ?
-Sacrilège ! les vierges pissaient pas, tous les papes te le diront. Les esthètes ont suggéré des euphémismes la bouche en cœur, et les arsouilles de ton espèce ont multiplié les grossièretés. Le dictionnaire de Guiraud, érotique évidemment, dénombre plus de 550 appellations du sexe féminin. T’aurais pu te fendre d’une autre métaphore à propos du fessier de Solange. C’est ainsi que tu fais partie de ceux qui parlent de fesses, de cul, sans arrêt, sans jamais pouvoir bien le dire… ta jactance n’est qu’un jet de tuyau crevé, si tu vois ce que je veux dire ?
-Tout objet qui a la forme d’une pirogue ne remonte pas forcément l’Orénoque. Nourri dans le sérail, t’en connais les détours… Richard de mes deux et pas trois.com !
-Là, c’est mieux, poétique, même... On peut ouvrir le bottin à n’importe quelle page, lire le Code pénal ou s’envoyer la grotte de Platon, tout peut devenir, d’une certaine manière et en prenant le ton, des sous-entendus du cul. Ce sont les anciens qui ont commencé avec leur braquemart, l’épée qu’ils remettaient dans un fourreau qu’on appelait vagina, ça remonte aux Romains. Alors, sous quel soleil a-t-on commis les premières comparaisons ?
-C’est accablant. On te demande une belle histoire et voilà que tu retombes dans tes travers, même là ! Merde ! Foutre ! Professeur de mes deux ! T’es accablant… c’est tout ce que je peux dire…
-Voilà une heure que tu m’emmerdes, José. Je trouve même que c’est déplacé ta suggestion de diversion des sujets sérieux, parce que t’as vu Solange traverser la rue. Mais, tu ne penses qu’à ça ?
-Et alors, t’es quand même gonflé ! On dirait que c’est pas toi qui te la tapes ! C’est trop facile à la fin. C’est moi le salopard, le vicieux, le pauvre type, alors que moi je ne fais que mater… souffrir… puis mater encore…
-Dis tout de suite que ça te fait chier de courser derrière Richard ?
-Alors, au moins qu’elle s’habille autrement. Qu’elle fasse pas mousser le pauvre monde dans son froc.
-Parole, tu parles comme ma mère ! Mais, elle s’habille comme elle veut. On peut pas disposer des gens comme ça. Bouffe du camphre….
-Elle a retrouvé du boulot ?
-Oui, Poildur l’a engagée tout de suite. Pourtant, elles étaient vingt-cinq à répondre à l’annonce, rapport à Milquet qui les tient à l’oeil. Sans même demander ce qu’elle avait fait comme études… « C’est toi que j’veux, a dit Poildur !»
-…m’étonne pas !... M’sieu Antoine va être content.