Retour du Florentin.
Elio Di Rupo n’a pas que des acouphènes. Il doit avoir quelque part des relâchements aussi de la mémoire, qu’en termes délicats de médecine on pourrait appeler acousmatagnosies. Cette surdité mentale s’est encore vérifiée cette semaine.
Bart De Wever qui était jusqu’au 13 juin l’homme à abattre, dont on ne disait jamais assez son républicanisme flamingant, est devenu soudain l’homme fréquentable, celui qui convient à la Belgique du futur. A tel point que l’Aigle de Mons en veut pour au moins vingt ans !
Ça tombe bien, c’est à peu près le temps qu’il faudra à Bart pour mettre sur pied sa République de Flandre.
…Et le restant des caïds du PS de suivre avec abondance de superlatifs, les évolutions sémantiques du Prince, tel que Machiavel le voyait jadis à Florence !
Elio est la réincarnation de Laurent le Magnifique, point d’orgue et fin du quattrocento.
Il a fallu attendre l’ère De Wever pour voir le retour du Florentin !
Bart a véritablement ensorcelé Elio. Il a suffi que le Flamand laisse tomber qu’il ne briguerait pas la place de premier ministre !
Ainsi, ce sera un premier ministre francophone qui aura l’honneur d’ouvrir le pouvoir à ceux qui n’attendent que l’occasion de le détruire.
Dans le fond, ce que j’en dis… c’est dommage que la pioche soit dans d’aussi mauvaises mains.
Les gens simples, ceux qu’on ne consulte qu’une fois de temps en temps, n’ont pas cette absence de mémoire. Ils croient ce qu’on leur dit à condition de ne pas changer de version tous les 36 du mois.
A force de se contredire, nos hardis pionniers de la Belgique nouvelle sont devenus inintelligibles. Résultat, le public ne croit plus à rien. Et à une époque où croire est de plus en plus indispensable à la crédibilité des partis, on va droit dans le mur.
L’homme aux acouphènes aurait intérêt à suivre les conseils de Robert Hossein qui, depuis qu’il est équipé, repasse en boucle « Caroline chérie », qu’il n’avait pu ouïr depuis trente ans !
C’est sans importance. Le PS est redevenu le « gros » parti de Wallonie. Il restera toujours bien assez de gogos pour applaudir, dès septembre, l’accomplissement du rêve d’Elio.
Cette évolution rapide des personnels suprêmes est passée par-dessus les origines de la NV-A, bourgeon gémellé avec le Vlaams Belang de la Volksunie, oublié l’homme à abattre, l’infréquentable De Wever, ami des anciens activistes de la deuxième guerre mondiale. C’est dire comme on a tort de prendre tout au pied de la lettre, quand on nous le dit d’en haut.
Le président de la NV-A est passé de la catégorie « banni de l’histoire » à celle des « personnes à recommander ». C’est comme si on apprenait que Michel Daerden entretiendrait une liaison amoureuse secrète avec le fils Mathot et que, d’un commun accord, ils diraient tout à la presse people !
Le bon Bart a établi son staff de consultants à la Chambre, c’est commode pour recevoir les hommages de ses nouveaux amis. Armand De Decker, Charles Picqué, Rudy Demotte ne jurent plus que par lui. Olivier Maingain a bien raison de raser les murs, même que le bel Armand s’est étonné au MR que ce « punais » existât encore.
C’est qu’au MR, comme on n’est pas sûr d’en être, on reste moins exubérants, d’autant que le cas Reynders est à l’étude. Gérard Deprez revit en cette période de fronde. Il fait remarquer à qui veut l’entendre que madame Thyssen du CD&V a tiré logiquement les conclusions qui s’imposaient, en présentant sa démission au sein de son parti.
Di Rupo s’est surpassé dans son interview à Sud-Presse. Son tempérament italien lui est revenu en « toute humilité », on aurait cru entendre Mazarin à la cour de Marguerite d’Autriche ! A propos de Bart : "Il a vraiment la volonté de travailler sérieusement, c’est une volonté que je partage avec lui. Je n’ai rien vu qui me fasse douter de sa confiance. [ ] Jusqu’à présent, j’ai l’impression que le dialogue est ouvert, franc. Je n’ai pas de signaux que sa volonté soit de créer des problèmes. Au contraire, j’ai l’impression qu’il veut jouer un grand rôle, non seulement en Flandre mais aussi pour tout le pays."… "Rien de ce qu’il dit ou fait n’éveille ma méfiance." Oui, mais ce Bart De Wever n’a-t-il pas mené campagne contre le PS, contre Elio Di Rupo ? "Le passé, c’est le passé. La page est tournée, le plus important est d’arriver à un accord avec la N-VA et les autres partis."
Comme on voit, le socialisme à la Belge qui n’allait déjà pas bien avec le libéralisme mondialisant à la Reynders et les banquiers voyous, s’est acoquiné depuis avec la droite fasciste flamingante sans vraiment aucune honte.
Comme dirait Malaparte « Chassez le Badoglio, il revient au galop », d’ici à ce que Di Rupo rewrite l’affaire des Fourons pour « de Standaard »…