La fin de l’Europe ?
Tout ancien écolier se souvient de la propagande des pouvoirs publics en faveur de la construction européenne qui, de la pleine montée d’enthousiasme des années 80, s’est peu à peu ralentie, pour disparaître quasiment des programmes scolaires en 2010.
Des hypothèses sont émises, toutes ayant un fond de vérité : la petite Europe des débuts a vu trop grand. A 27 pays membres avec des modes d'organisation institutionnelle variés, un espace de plus de 500 millions d'habitants et d'environ 4 280 000 km², le citoyen se sent perdu dans une telle géographie.
Herman Van Rompuy a bien vu que l’Europe va dans le mur, son petit couplet sur l’ambition nécessaire vient assez tardivement. D’autant que Sarkozy à propos de l’expulsion des Roms s’est rebiffé aux remarques de Barroso, remarques justifiées et en accord avec le sentiment qu’il n’y a pas d’Européens de deuxième classe.
C’est à présent le souhait de certains d’agrandir l’Europe en dehors de l’Europe même, comme l’adhésion de la Turquie qui n’y a qu’un minuscule promontoire, d’ailleurs conquis sur l’ancien empire grec. Un lobby juif voudrait également y associer Tel-Aviv.
Les citoyens européens reprochent aussi à l’Europe de n’être que mercantile, se détournant du social comme n’étant pas de sa compétence, avec le Commissaire Lami, controversé par son attitude pro-américaine et son orthodoxie capitaliste.
Les journaux s’y entendent pour critiquer les directives européennes comme tatillonnes et parfois inutiles, passant sous silence des règlementations utiles.
Et si toute cette vague de pessimisme n’annonçait pas tout simplement le déclin d’une civilisation, celle de l’Europe ?
Oswald Spengler comparaît les civilisations à des êtres vivants passant par tous les stades de la vie : la jeunesse, l’âge adulte, la vieillesse et la mort. Ecrit en 1918 « Le Déclin de l’Occident » prédit le début de la dégénérescence finale aux alentours de l’an 2000. Ce n’est pas encore la fin, mais « l’épuisement de la création » dernière étape avant la fin des haricots, nous le sentons tous de la manière dont nous vivons la crise.
Et il est vrai que toutes les civilisations anciennes ont fini dans le ruisseau.
Plus près de nous, Arnold Toynbee a écrit douze volumes de 36 à 1961 pour nous dire la même chose. Il analyse trois conditions pour annoncer que les pommes sont cuites.
1. Juste avant la fin, la civilisation moribonde tente de construire un Etat Universel, comme l’étoile s’embrase et paraît grandir en super novae ; l’administration enfle aussi et devient ingérable ;
2. Une élite, issue du peuple, mais devenue en deux ou trois générations formée essentiellement d’héritiers, tente de maintenir sa domination en manipulant à son profit « l’idéal démocratique » dénaturé ;
3. En-dehors des frontières de la civilisation moribonde se forme des regroupements d’exclus, appelés barbares ou postulants.
C’est ainsi que se sont effondrés tour à tour les Perses, les Grecs, les Egyptiens et les Romains ; alors, pourquoi pas nous, demain ?
Tous les facteurs du déclin son réunis.
L’UE ne représente que 7,3 % de la population mondiale avec 500 M d’habitants. Si l’UE englobait le reste de l’Europe (sans la Turquie et Israël), elle atteindrait à peine 200 M de plus. L’UE a le taux de croissance démographique le plus bas et vieillit plus vite que tous les autres continents. Avec 0,2 % de croissance économique moyenne chez les 27 et un endettement lourd, 17 % de la population européenne vit sous le seuil de pauvreté.
Ce qui est le plus inquiétant encore, c’est que nous ne voyons l’Europe qu’à travers les statistiques. Nous ne la voyons pas d’une manière qui consisterait à prendre en compte ses citoyens qui ont le plus d’espérance de vie, que partout ailleurs. Le marasme et la culture font deux et nous n’avons d’yeux que pour le premier. Nous donnons raison aux détracteurs de l’Europe venus d’autres civilisations. Nous ne voyons plus qu’infamie dans une religion chrétienne imposée, alors que nous accueillons un Islam qui s’annonce plus intransigeant et exclusif. Nous ne considérons plus dans l’essaimage de notre mode de vie qu’une sordide affaire de profit. Nous nous sommes convaincus qu’il fallait avoir le profil bas du repentir dans nos anciennes colonies, comme si la génération nouvelle en pouvait ! Si bien que les efforts que nous faisons, par exemple pour l’Afrique, paraissent être dus.
Sommes-nous à quelques années près au moment ou le barbare Odoacre déposa Romulus Augustulus (1), dernier empereur de Rome ?
Poser la question pour l’Europe quand Jules et Jim tentent le contraire pour la seule Belgique… il est vrai que les 27 n’ont pas de plan B non plus !
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1. Romulus Augustule, ou en latin Flavius Romulus Augustus (vers 460 - 511), parfois appelé Romulus Augustulus, est le dernier empereur romain d'Occident. Il ne régna que 10 mois, réduit selon les sources à n'être qu'une "marionnette" manipulée par son père... comme pour certains, Barroso n’est qu’une marionnette aussi, la comparaison est moins hasardeuse qu’il n’y paraît.