Les abrégés d’agrégés !
Nos « élites » n’en peuvent plus ! Elles ne supportent plus de vivre de façon étriquée dans les deux langues nationales.
Il faut qu’elles en sortent, qu’elles innovent, puisque nos malheurs viennent des incompatibilités de langage entre Belges ! C’est simple, parlons anglais !
L’anglais, la langue du biseness par excellence, a tous leurs suffrages. Les écorcheurs de la langue flamande et les écorcheurs de la langue française, même combat : tous à l’anglais !
Les petits génies de notre nomenklatura, tant révérés par les cons, veulent que les universités, dont ils sont issus, conduisent au rapprochement entre Wallons et Flamands grâce à une langue « supranationale », pour longtemps encore supérieure au chinois.
Du côté flamand, c’est Pascal Smet qui met la puce à l’oreille de nos têtes bien pleines, ce que refusera Peeters, ministre président, dans un sursaut nationaliste.
D’autres anglophiles emboîtent le pas, Dedecker (LDD) n’est pas le dernier, les députés flamands Lode Vereeck et Boudewijn Bouckaert, trouvent l’idée de Smet excellente.
On ouvre une gazette flamande et on lit par exemple ce qui suit : “ ce n’est plus la Belgique, mais le monde qui est désormais le cadre de référence en ce qui concerne les opportunités d’emploi des jeunes ”. L’importance accordée au français ne constitue dès lors qu’un “ reliquat du cadre belge dépassé ”.
En Wallonie, nos illustres, par détestation d’une partie de la population d’apprendre le flamand, pensent que l’anglais est déjà la deuxième langue parlée. Des futurologues précisent :
"L'anglais sera devenu la première langue du pays, le néerlandais la deuxième et le français passera 3ème".
Nathalie Maleux reprend son Bordas French English, au cas où il y aurait un JT made in England.
On y aurait perdu jusqu’à son latin, si ce n’était la confusion. Ce n’est pas le français que l’on parle en Wallonie, à RTL et à la RTBF, jusqu’à l’université de Liège, et surtout que l’on écrit, mais une sorte de sabir fait de borborygmes et d’acronymes entretenu par l’usage des courriels, des textos et des « post ».
L’exemple vient des hautes autorités. Les mémoires des étudiants regorgent de fautes d’orthographe, de belgicismes (ce qui serait moins grave) et d’expressions anglaises souvent inappropriées mais qui font « class », sans oublier les abrégés d’agrégés.
Des « contributions » du corps professoral dont on sent l’influence de l’anglais dans une phrase sur deux, n’ont plus rien à voir, ni avec le français classique, ni même avec le français moderne. C’est une sorte de condensé coupé d’expressions anglaises, que ces élites disent intraduisibles (1).
Le mal est général et s’il commence par ceux dont c’était la mission de bien écrire et de bien dire, il se poursuit par la lecture des journaux qui, depuis qu’ils ont supprimé les correcteurs d’imprimerie et qu’ils ont laissé la main libre des journalistes courir sur le clavier d’ordinateur, on assiste à une sorte de débandade de l’orthographe.
Je sais qu’en écrivant cela, des rédacteurs piqués au vif vont s’amuser à décortiquer ce texte pour en extraire les amphigourismes, l’atticisme, les mauvaises correspondances de temps et les fautes d’orthographe. Sauf, que je m’applique et que j’essaie de m’améliorer et qu’il est fort possible qu’ils dénonceront ce qui est correct, en oubliant ce qui ne l’est pas, prouvant ainsi par l’absurde, la véracité de mes affirmations.
En France, c’est le même constat. Les universités pataugent dans une langue qu’elles ne maîtrisent plus. Au point que les étudiants les moins doués, à la suite d’une petite dictée d’entrée de jeu, devront réviser leur Grevisse avant de prétendre pontifier aux amphis.
La langue n’est pas réservée à un quelconque mandarinat. Elle doit être parlée et écrite par tous. Elle devrait surtout être à nouveau soutenue par un corps professoral dont le premier devoir serait de se remettre à la lecture des grands textes et à faire partager cet amour de la lecture aux élèves. L’époque ne s’y prête guère. Elle est ouverte à la vulgarité, au fric, au consumérisme. C’est dommage.
A Liège, l’échevinat de l’instruction publique est particulièrement rétif à la réappropriation de la langue par les élèves. Il semble que les mathématiques et l’apprentissage de l’anglais soient leur priorité. Evidemment si l’Haut lieu est lui-même inculte…
Quand quelqu’un ne sait pas mettre des mots sur ce qu’il veut exprimer, il le dit en général avec ses poings et c’est toute la société qui monte d’un cran dans la violence gratuite et imbécile.
A force d’apports étrangers, d’apocopes et d’aphérèses sur l’ordi, vous verrez qu’il ne restera plus grand-chose bientôt, de la seule vraie richesse que nos parents nous ont léguée : la langue française.
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1. Ils veulent nous prouver ainsi qu’ils possèdent parfaitement la langue de Shakespeare et qu’il leur est impossible de proposer l’expression juste aux unilingues du vulgaire, alors qu’ils ont perdu l’essentiel du vocabulaire de leur langue maternelle.
Commentaires
Très beau texte, j'aimerais pouvoir écrire comme vous, mais étant un autodidacte, je n'ai pas été à l"école très longtemps, mais j'aime ma langue maternelle et j'essaye toujours de rédiger mes textes correctements pour moi-même mais aussi pour ceux qui me liront....Bravo cher Duc.
Postée le: Anonymous | octobre 14, 2010 08:58 AM