Détestation de Vande Lanotte.
Au point de dégradation de la situation politique en Belgique, certains de la bande des Sept souhaitent sans doute l’échec de Vande Lanotte, sans l’oser pouvoir dire. La N-VA bien sûr, mais aussi quelques autres.
Les graphiques de popularité nous en donnent une explication.
La personnalité de Vande Lanotte émerge. Les citoyens sont reconnaissants au conciliateur pour le travail qu’il fait et le mal qu’il se donne. L’attendrissement général est à son comble, depuis que Johann court du lit de douleur de sa mère, au bureau dans lequel travaille une noria d’experts.
Enfin, un dévoué avec un cœur « gros comme ça », disent les gens !
Du coup, les étoiles des autres pâlissent par contraste avec le nouvel astre !
Les citoyens, tributaires d’une démocratie par procuration, ne s’attendent pas à une telle perversité du système. Ils ignorent combien les gens de pouvoir sont versatiles et comme le « oui » peut dire « non ».
Autres temps, autres mœurs, nos pères étaient persuadés que leurs délégués servaient le pays, en se consacrant à tous.
Il faut vivre à l’époque de l’argent roi pour s’apercevoir que les vertus civiques n’ont peut-être jamais existé, que dans quelques âmes bien trempées. Sous le vernis et la gloire de servir, bien d’autres motivations couvent, tenant au goût du pouvoir, à la concupiscence et à la vanité. Et puis, l’argent qui corrompt, fait le reste. Aujourd’hui le voile s’est déchiré. Qui le veut, peut jeter un regard par l’échancrure et deviner le reste.
L’éthique des « serviteurs » de la Nation a beaucoup changé. La valeur morale attachée à l’économie, fluctue avec elle. On n’est plus un élu par sacerdoce, mais parce qu’on y exerce un métier à temps plein qui nourrit bien son homme et satisfait la vanité !
« Faire de la politique », c’est entrer dans un ghetto et ne plus pouvoir en sortir, sinon à n’être plus rien du jour au lendemain ; mais un ghetto de luxe qui ne distille un éventuel ennui que sur moquette et confort bourgeois.
On a pu faire de la politique et en être de sa poche. Il devait en être ainsi du temps de l’avènement de l’idée socialiste. Les premières coopératives ouvrières devaient avoir une flopée de bénévoles pour tenir le coup face aux entreprises capitalistes.
Avec le « progrès », tout est devenu à la fois plus simple et plus compliqué.
Plus simple, quand la politique est devenue un métier à part entière, devant être rémunéré.
Plus compliqué, parce que les bénévoles se sont vus supplantés par une nouvelle vague de militants plus intéressés par le salaire que par le service rendu.
Cette foule disparate, s’effrita au point de ne garder que les spécimens venus des grandes écoles pour les plus hautes fonctions, donc les plus hauts salaires. Ainsi, le « filon » fut pratiquement squatté par les avocats et les licenciés en sciences politique et économique.
Tant mieux, diront les naïfs, ainsi les affaires sont entre des mains compétentes.
A ce niveau, les salaires sont tels que cela donne des batailles entre les personnes, avant d’être des batailles aux élections devant les citoyens.
Ces spécialistes se sont coupés de la population. Tout l’appareil de décision s’est inscrit dans une classe sociale nouvelle, à mi-chemin entre la petite bourgeoisie et la grande. No man’s land périlleux, capable d’une élection à l’autre de replonger quiconque dans le parfait anonymat d’un avocat au pénal ou d’un professeur d’économie aux Facultés de Namur.
Aussi, à part les gros bras et certains qui « en ont mis de côté », c’est la lutte sans merci pour l’emploi, tout à fait comme un technicien de chez VOO ou un clarkiste de chez Carrefour.
Dans ces fonctions-là, il est inutile d’aligner quarante années de carrière pour dormir sur ses deux oreilles le restant de ses jours. Deux mandats suffisent largement.
Il faut avoir fréquenté les réunions politiques pour savoir ce que jouer des coudes signifie et comme pouvoir enfin s’asseoir sur une chaise du premier rang, ou mieux à la tribune, avec son nom inscrit devant soi, relève du parcours du combattant.
L’enjeu est important, celui d’un travail où brusquement les salaires sont multipliés par cinq, parfois dix, avec les à-côtés, petits et grands privilèges, qui ne sont pas les moindres délices.
Nous sommes évidemment responsables d’avoir toléré que notre démocratie engraisse à ce point ceux qui ne devraient s’intéresser qu’aux autres. Nous sommes coupables d’avoir permis que la représentation s’amenuise dans sa diversité au point de réserver les responsabilités aux professions libérales et universitaires.
Ainsi, sans réelles fibres populaires, sans savoir ce qu’est une journée dans une fabrique ou une usine, en ignorant la vie de tous les jours du plus clair de la population, et surtout, par leur seule présence, ils empêchent l’accès aux fonctions importantes, de ceux qui les premiers auront à subir et respecter les lois.
Pas de menuisier, pas d’infirmière (si une pour 20 avocates), pas de caissière, pas d’ouvrier d’usine, pas de secrétaire, rien du corps de la Nation, et ils voudraient nous faire croire qu’ils nous représentent ?
Bref, nous sommes victimes du syndrome de la banane. C’est l’histoire d’une guenon d’un cirque, recueillie dans un ménage bourgeois. D’abord douce, humble gentille, elle fait la conquête de tout le monde. Six mois plus tard, elle casse la gueule à la bonne, bouffe toutes les bananes qu’on lui prépare d’un coup et jette les peaux sur la tête de ses propriétaires attablés sous le lustre en cristal où elle se balance.
On est en droit de se demander, puisque cela va si mal avec nos spécialistes, si cela n’irait pas mieux avec nos ouvriers et employés, qualifiés ou non. Ils ne pourraient faire pire.
C’est toute l’histoire de nos gens de pouvoir.
Voilà pourquoi, ils doivent détester Vande Lanotte au point de vouloir sa perte !
Ceci dit, cette détestation, Vande Lanotte la comprend, puisqu’il l’a sans doute éprouvée et qu’il l’éprouvera encore, attendu qu’il est des leurs...