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Anastasie, magyarok star !

Suspectée de flirter avec le pouvoir, la presse n’est pas toute entière à la botte de celui-ci, fort heureusement. Des journalistes courageux tentent de survivre dans un climat peu propice à la liberté d’expression. Etranglés par les coûts exorbitants de l’exploitation d’un journal, ceux qui ne se sont pas abandonnés au culte de l’argent et au renoncement de toute critique du système capitaliste ont toutes les peines du monde à vivre de leur plume. Mais ils résistent et diversifient sur d’autres supports des critiques pertinentes et finalement attendues de lecteurs fidèles.
D’excellents journaux, de bonnes émissions radio d’informations et enfin des télévisions comme Arte poursuivent vaille que vaille un métier exigeant et parfois périlleux. Je pense à cette journaliste russe, Anna Politkovskaïa, abattue en sortant de son domicile et combien d’autres reporters, journalistes, photographes et auxiliaires, molestés ou détenus en otages partout dans le monde et de toutes les nationalités.
Aussi, lorsque le président hongrois Pal Schmitt a promulgué jeudi, en dépit du tollé suscité à l'étranger, une loi très controversée sur les médias, je me suis inquiété, en ma qualité d’Européen. Ce pays assume la présidence pour six mois de l'Union européenne, après celle exemplaire, dit-on, de la Belgique.
Une sorte de politburo dont le premier ministre Viktor Orban fait partie, a dorénavant le droit de contrôler le contenu de tous les médias, radiotélévision, presse écrite ou sites internet.
La Hongrie ce n’est pas la Chine, elle est au cœur de l’Europe, et pourtant !
Cette nouveauté à caractère stalinien (même si c’est la droite qui dirige la Hongrie en 2011) aura le pouvoir d'infliger des amendes élevées aux organes de presse dont les productions "ne sont pas équilibrées politiquement" ou "entravent la dignité humaine".
On sait comme les Régimes dits « démocratiques » d’Europe et d’ailleurs s’arrangent pour tuer la presse d’opposition par le biais de procès en diffamation.
La nouvelle Anastasie hongroise aura le droit d'inspecter les documents ou le matériel des médias et de contraindre les journalistes à révéler leurs sources sur les questions relevant de la sécurité nationale.

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On sait que le nouveau dada de la droite européenne est de maintenir la population dans la crainte d’une possibilité d’attentat terroriste, cette pression permet de justifier la création d’une police « spéciale ». Elle est gardée en réserve pour servir, le cas échéant, de police politique. On a vu en 2009, qu’elle était sa capacité de nuisance lors d’une accusation bidon à propos des sabotages de lignes de chemins de fer en France. Julien Coupat et ses amis, coupables de préférer vivre autrement et donc suspects, on fait quelques semaines de préventive ! Le dossier d’accusation était vide !
C’est le péché mignon des autorités de trouver prétexte à justifier l’utilisation des polices « spéciales » par des mises-en-scène de parodie de justice.
L'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) a averti toute de même la Hongrie que cette nouvelle législation, "si elle était mal utilisée, pourrait empêcher tout débat démocratique.
Amnesty International a évoqué "Les possibilités d'interprétations arbitraires de cette loi dans tel ou tel sens sont trop grandes et permettent une ingérence politique dans le concept éditorial des médias".
Les premiers effets de la loi ne se sont pas fait attendre : Attila Mong, présentateur de la matinale de la radio publique Kossuth, a été mis à l’écart par ses employeurs pour avoir observé une minute de silence avec l'un des rédacteurs de l'émission, en signe de protestation contre la nouvelle loi sur les médias.
A part l’Allemagne qui a protesté, les pays de l’Union européenne n’ont pas spécialement fait entendre leurs voix.
C’est l’Europe qui est une fois de plus en-dessous de tout, et qui déçoit dans cette affaire comme dans bien d’autres. On a encore en mémoire la protestation « molle » des Commissaires européens auprès du gouvernement flamand, pour les discriminations dont sont victimes les minorités francophones dans la périphérie bruxelloise.
A force de décevoir, l’Europe ne bénéficie plus du capital de sympathie auprès des populations du continent. Elle est, en quelque sorte, victime du syndrome touchant les Belges, depuis l’avènement du nouveau Kaiser Bart De Wever, en Flandre : les gens n’y croient plus.
C’est bien la première fois que la publicité, les déclarations de foi des autorités, la pédagogie de propagande en faveur de l’Europe dans les petites classes des écoles n’auront servi à rien. Comme quoi, l’Europe des affaires et de l’économie de marché, l’Europe de droite, l’Europe aveugle et dépourvue de sens social est une Europe invendable à l’opinion.
Nos représentants feraient bien de s’en apercevoir.

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