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La gueule du client.

Emberlificotés dans nos sacs d’embrouilles, nous avons relâché notre attention sur ce qui se passait autour de l’Europe. C’est un tort, parce que de l’autre côté de la Méditerranée, dans les pays du Maghreb, les dictatures d’Algérie et de Tunisie sont en délicatesse avec leurs populations, et par le principe des vases communicants, le Maroc pourrait ne pas en sortir indemne, non plus.
Il n’est pas négligeable de penser qu’avec la forte immigration des ressortissants de ces pays en Belgique, nous soyons indirectement entraînés dans un nouvel imbroglio diplomatique.
Le pays en miette dans lequel nous vivons, s’est toujours mêlé de dire la morale aux autres, mais de façon sélective. Les derniers en date ont été les Congolais de Kinshasa, avec notre ministre pointu des Affaires étrangères. Avant cette leçon magistrale suivie d’effets désastreux, ce furent les admonestations aux Serbes de l’ancienne Yougoslavie et nos condamnations en Belgique d’individus ayant participé au génocide rwandais.
Nous aimons faire des effets en brandissant les Droits de l’Homme et du Citoyen. Notre Constitution nous permet de poursuivre toute personne qui de par le monde se permettrait de les fouler aux pieds.
Il serait bon d’arrêter de jouer les Don Quichotte à géométrie variable.
Ainsi nous sommes devenus les champions du monde de l’hypocrisie, car nous oublions dans notre donquichottisme inconscient les pays à dictature caractérisée, comme la Tunisie avec son dictateur à vie, Ben Ali, et l’Algérie, avec ses élections truquées d’un parti unique représenté par les anciennes gloires et leurs successeurs issus du conflit avec la France dans la guerre dite d’Indépendance. Et enfin, le Maroc, pays dans lequel il n’est pas bon de s’opposer au roi.
Je m’arrête à ces trois pays qui semblent entrer en effervescence ; mais, on pourrait citer quelques autres du Golfe persique et d’ailleurs, pays avec lesquels nous sommes en bons termes, le dernier en date dit des Emirats va assurer dans quelques années la coupe du monde de football, achetée par un gigantesque marketing et quelques pots de vin, l’Arabie saoudite, mécène des intégristes musulmans, etc.
Puisque notre puritanisme est à la gueule du client, relevons seulement les turpitudes maghrébines vis-à-vis desquelles nous restons insensibles.
Le Maroc est une monarchie dotée d'une Constitution qui fait du souverain le pilier du régime. Le roi, commandeur des croyants, choisit le premier ministre comme bon lui semble. La justice est rendue en son nom. Et il est le chef des armées. La dictature royale n’a pas encore souffert par contagion du bouillonnement du voisinage, on ne saurait pour le moment en écarter l’hypothèse.

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Le peuple Tunisien est à bout de patience. Ben Ali et sa clientèle ont essoré tout ce qui était possible de ce pays qui ne vit pratiquement que du tourisme. Les émeutes se poursuivent en Tunisie, la population manque de tout et subit les contrecoups de la crise économique mondiale de 2008, en n’ayant rien engrangé avant. Et qu’est-ce que dit notre démocratie, elle qui aime tant fourrer son nez dans les affaires des gens ?... Rien ! Au contraire, le modèle économique du président Ben Ali est vanté par le directeur du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Di Rupo côtoie le parti unique du dictateur aux réunions de l'Internationale socialiste.
Son voisin l’Algérie reçoit le soutien de nos démocraties, à cause des réserves de pétrole et de gaz. Pourtant, que font les dirigeants des richesses de son sous-sol ? La population meurt de faim, les jeunes gens même diplômés ne trouvent pas de travail ; tandis que l’apparatchik vit l’existence d’un nabab oriental.
Les affrontements entre jeunes manifestants et forces de l'ordre ont eu lieu tout au long de la semaine à Alger et Oran. Une dizaine de départements sur les quinze du pays sont touchés. Un Conseil interministériel est prévu samedi pour examiner les moyens de juguler la flambée des prix des produits de base. Que voulez-vous qu’il sorte comme mesure appropriée ? Alors que les membres ont intérêt à ce que l’exploitation des masses se poursuive ?
Si l’Europe est en mesure de se poser des questions sur sa dette et de la manière dont sont ciblés des pays comme la Grèce, le Portugal et l’Espagne et peut-être demain, la Belgique, il serait stupide de ne pas voir autour de nous les dégâts qu’a fait le système économique et qui n’a pas l’air de pouvoir être réformé par les démocraties qui le soutiennent.
Au nom des droits de l’Homme, nous ferions bien de mener de front deux combats, le premier contre la mondialisation d’un capitalisme qui prend une méchante tournure et le second de remettre en question nos accords de coopération et d’amitié avec toutes les dictatures, celles du Maghreb principalement et même celle de l’Egypte, pays bordant la Méditerranée, nos riverains d’en face.
Sinon, écrasons-nous et fermons notre gueule en dénonçant des génocides et des atrocités d’un côté, tandis que de l’autre, nous nous confondons en salamalecs et sourires tout loukoum, et faisons-nous transparents afin de ne pas attirer l’attention des agences de notation.

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