327 jours d’affaires courantes !
Les historiens et les curieux des événements de la guerre de 40-45 ont en mémoire les appels depuis Londres du général De Gaulle, dans une émission « les Français parlent aux Français ». Le générique est sans doute resté le plus célèbre dans la mémoire collective française et belge : ce sont les premières notes stylisées de la Ve Symphonie de Beethoven qui correspondent en morse - trois brèves une longue - à la lettre V comme Victoire. Suivait ensuite le nombre de jours de lutte du peuple français pour sa libération, proclamé par un speaker inspiré.
On voit bien les bonimenteurs des deux télés nationales débuter leurs infos, par « Aujourd’hui, 327me jour de la lutte du peuple belge pour sortir des affaires courantes ».
Voilà qui rendrait de l’intérêt aux gens sur l’étendue de notre désastre et pousserait peut-être nos négociateurs à accélérer les tenues de table ronde ?
Car, on a tellement pris l’habitude d’être dans la panade, qu’on va battre, si ce n’est déjà fait, un autre record, plus curieux que le précédent, par le gouvernement Leterme. Celui-ci aura géré le pays plus de temps en affaires courantes, qu’en fonction de son existence légale par la décision des électeurs !
Et ce n’est pas Wouter Beke qui va arrêter le compte à rebours !
Cependant, ce constat de record n’aurait aucun sens, s’il ne s’agissait que d’ironiser autour du 327me jour d’hébétude générale.
On devine un pacte secret, une sorte de consensus qui pousserait nos élus à jouer les gribouilles. Ils ne seraient pas si idiots qu’ils en ont l’air. Ils poursuivraient un plan afin d’éliminer Bart De Wevergaufre et la N-VA des pourparlers en cours !
Comment ? C’est le Gros qui a lui-même mit la puce à l’oreille des leaders des autres formations. « Si aucune solution n’est trouvée d’ici la fin avril, la N-VA se retirera des discussions ».
Jusqu’à présent, personne ne voulait avoir l’air d’abandonner la partie, tout en l’abandonnant de fait, comme par exemple Di Rupo, boudant à Mons pendant 3 mois, à cause de Bart qui n’avait pas pris son projet au sérieux. Idem, le CD&V collé aux basques de Wevergaufre, comme un morpion à un poil de son cul. Si, évidemment, le Gros s’en va de lui-même, il suffira aux autres de soupirer qu’il n’aurait pas dû et qu’on était à un chouïa de réussir, pour qu’ils soient soulagés de sa présence, sans avoir l’air de l’avoir cherchée !
L’opération « usure » est en place depuis que le CD&V a pris les commandes de l’usine à gaz. Déjà, Bart est en train de craquer. On l’a exclu des négociations budgétaires, arguant du fait que son parti n’est pas représenté dans les formations du gouvernement en affaires courantes. Il s’en est plaint dans l’émission « De Ochtend » à la VRT. La situation n’est pas tenable, a-t-il dit, d’un air courroucé.
C’est parfait, ont pensé les autres.
Il faut dire qu’on nage en plein délire « Constitutionnel » et qu’on n’a jamais vu ça : un gouvernement d’attente, monter un budget de législature ! Alors, N-VA ou pas, rien n’indique qu’il faille l’éviter ou l’inviter ! Mais qu’on préfère la première solution est un signe. Il faut dire aussi que la N-VA n’est d’accord sur rien, par avance et que, si c’est une tactique pour attirer l’électeur mécontent, politiquement, c’est l’impasse assurée.
Voilà qu’en plus d’être coincé dans les discussions de formation pour diriger le pays, De Wever se sent évincé des affaires courantes qui sont devenues de plein exercice.
Les partis francophones sont évidemment ravis de voir Wouter Beke moins enthousiaste de la politique de la N-VA, d’autant que le Gros, trop à l’étroit dans son rôle de négociateur éternel, a besoin d’une consécration internationale et, pour ce faire, a rendu jeudi une visite remarquée au Premier ministre britannique David Cameron, tout en prévenant ses collègues négociateurs, qu’en attendant Godot, il aura d'autres contacts internationaux dans les prochaines semaines, sans toutefois en dire davantage. S’il pouvait aller rendre visite à Kadhafi, ce serait parfait.
Bref, ça se décante !
Sans la N-VA, on pourrait avoir un gouvernement pour les vacances.
C’est ce que Di Rupo espère. Pendant les vacances, c’est plus facile d’augmenter les taxes des ploucs en congés-payés. Ça ferait partie de la stratégie du PS qu’on n’en serait pas autrement surpris !