Un procureur coincé…
Le procureur de Nanterre Philippe Courroye a été convoqué en vue d'une mise en examen par la juge d'instruction parisienne, Sylvia Zimmermann, en charge de l'enquête sur la violation des sources de trois journalistes du Monde dans l'affaire Bettencourt. On la dit très déterminée.
La magistrate, en charge d'une information judiciaire pour "atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique", tente de déterminer si Philippe Courroye a illégalement tenté de découvrir qui informait en 2010 deux journalistes du Monde travaillant sur l'affaire Bettencourt.
Un policier explique que la surveillance téléphonique des journalistes avait été menée par son service en 2010 à l'instigation du cabinet de Philippe Courroye qui "demandait très précisément les fadettes des deux journalistes" du quotidien, Raphaëlle Bacqué et Jacques Follorou.
La juge devrait également entendre comme témoin assisté Marie-Christine Daubigney, bras droit de Philippe Courroye au parquet de Nanterre.
C’est toute la question de l’indépendance des magistrats et de la justice en général qui est en cause, en France. Le procureur Courroye ayant été nommé par le garde des sceaux est considéré comme un homme de Sarkozy. On s’est assez esclaffé en parlant de « l’œil de Moscou » du temps du stalinisme, on pourrait faire de même pour « l’oreille de la sarkozye » à propos du procureur Courroye.
Les magistrats du parquet ne bénéficient pas de la garantie d'inamovibilité. Leur indépendance est limitée par le fait qu'ils sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l'autorité du Garde des Sceaux, ministre de la justice.
Et en Belgique ?
Le pouvoir politique se gargarise de la séparation des pouvoirs et insiste sur la fameuse indépendance des juges.
Qu’en est-il exactement ?
Bien des affaires, dont la fameuse affaire « Cools » et ses annexes, et plus récemment les démêlés de certains juges à la suite des délits d’initiés lors de la crise de 2009, avec une première démission du premier ministre Leterme, entourent d’un certain brouillard l’indépendance des juges. Cela commence d’abord par la manière dont ils sont nommés. En effet, de cette nomination et de ses suites pourraient dépendre, par l’effet d’une certaine pression « amicale », la complaisance de certains juges dans des affaires impliquant des personnages de l’Etat.
La Loi précise qu’il existe un Conseil supérieur de la Justice pour l'ensemble de la Belgique.
Il compte 44 membres, 22 membres par collège francophone et néerlandophone.
Chaque collège compte 11 magistrats et 11 non-magistrats.
Les magistrats sont élus, par scrutin direct et secret, parmi les magistrats de carrière en activité de service, par collège.
C’est ici qu’on dresse l’oreille : les non-magistrats sont nommés par le Sénat à la majorité des deux tiers des voix émises.
C’est là le vif du sujet. Le Conseil supérieur est donc composé pour moitié d’élus par des organisations politiques, forcément majoritaires au Sénat.
Dans les instances de cet étrange conseil « indépendant » tout va par paire. C’est ainsi que Le bureau comprend 2 magistrats (francophone et néerlandophone) et 2 non-magistrats (francophone et néerlandophone) et ainsi de suite.
Les présidents de la commission de nomination et de la commission d'avis et d'enquête assurent, alternativement, pour un délai de deux ans, la présidence de chacun des collèges.
Non seulement le Conseil est compétent pour les nominations, mais encore rédige un rapport annuel basé sur une analyse et une évaluation des informations disponibles concernant le fonctionnement général de l'ordre judiciaire.
Un ministère bis de la justice en quelque sorte.
Nous ne sommes pas sécurisés par ce système contre un magistrat instrumentalisé du type de Philippe Courroye.
Heureusement que nous avons, comme en France des juges intègres, nommés par notre système qu’on pourrait qualifier d’équivoque. Et qu’à des perversions du système permettant à des Philippe Courroye de donner une mauvaise image de la justice, nous avons aussi des émules de la juge française Prévost-Desprez, qui s’est fait une haute idée de son métier.
Mais enfin, les hommes sont ce qu’ils sont… La justice pourrait être comparée à une toile d’araignée, les grosses mouches passent au travers. Il n’y a que les petites qui se font prendre.
On a parfois plus de raison d’en conclure que c’est en grande partie une justice de classe, que de trouver qu’elle est égale pour tous.
Ah ! les relations mondaines bafouant les Droits de l’Homme ! Ce n'est tout de même pas #cestjoëlle ?