Feu de camp au PS.
Le marathon des Huit pour sortir le pays de la situation actuelle, est, dit-on, d’une urgence extrême. Des drones, ces avions sans pilote et sans responsable, lancent des tracts. Le dernier faisait dire à Barroso que l’Europe allait se fâcher de l’absence d’un gouvernement de plein exercice en Belgique. Aussitôt démentie, cette information n’a été lancée que pour mettre la pression sur l’opinion, afin qu’elle accepte n’importe quel accord, pour autant qu’en sorte un gouvernement.
Ça coinçait ce soir mardi. On stoppe, reprise demain. Comme le spectacle s’éternise depuis 15 mois, les gens s’en fichent. Le prochain tract d’un drone pourrait être une remontrance deVan Rompuy, aussitôt démentie…
Question des rigolos attablés, il faut craindre que par zèle pour sauver la Belgique, les socialistes wallons perdent toute mesure, au point de renier le socialisme lui-même.
Ils espèrent focaliser l’opinion sur le communautaire pour une paix « flamande », tandis qu’on passerait discrètement sur le volet social, la population perdrait ses acquis sociaux sans moufter, augmentation de la TVA, tour de vis pour les chômeurs, les malades, les pensionnés.
Wouter Beke entend suivre la politique de régression sociale de Bart De Wever. Il veut récupérer une partie des électeurs du CD&V passés à la NV-A.
La vieille recette du sacrifice des populations pauvres passerait inaperçue; tandis qu’apparaîtraient les heurts entre Maingain et ceux qui veulent la flamandisation de la périphérie bruxelloise, en sachant que le MR finira par capituler avec ou sans Maingain.
Si Di Rupo réussit son coup, nous assisterons à la perte de la notion même du socialisme en Belgique !
Nos spécimens de pouvoir, éduqués dans nos universités pour ne pas dénoncer l’imposture, diront à propos des accords : « C’était ça ou le chaos ! ».
Aucune conscience à vif, sauf peut-être, celle obligée, d’Anne Demelenne, dans une position inconfortable et ambigüe, celle de cotiser au PS et d’être à la tête de la FGTB.
Les autres pions d’Elio Di Rupo, en extase amoureuse de leur leader, ne piperont mot !
Qu’en est-il ailleurs ? Les socialistes belges sont-ils les seuls à lâcher le guidon au mauvais moment ?
Devant ce vide de ce qui fut un grand parti de gauche contestataire et qui est devenu le principal pilier de la monarchie et du capitalisme financier, existe-t-il encore en Europe un parti socialiste qui ne soit pas indigne ?
Par exemple celui du PS français de Martine Aubry ?
Le PS y est tenu à l’oeil sur sa gauche par des militants sincères : Mélenchon, Nathalie Artaud de Lutte Ouvrière, Besancenot, sans oublier les Verts avec Eva Joly, très en pointe. Arnaud Montebourg sauve l’honneur du PS, par un discours différent des autres candidats à l’élection interne. Son interrogation sur la mondialisation vaut la peine qu’on s’y intéresse.
Pour Montebourg : « le quotidien de la mondialisation c'est la désindustrialisation, la précarité, l'appauvrissement et le déclassement, l'explosion des inégalités, la destruction des services publics, la montée de la dette, les délocalisations... Pour lutter contre ces fléaux, une seule solution : la dé-mondialisation, véritable remise à l'endroit d'un système devenu fou. La dé-mondialisation nous concerne. Car c'est la protection des travailleurs du Nord et du Sud, la préférence pour les salaires et la protection sociale plutôt que les dividendes boursiers.
C'est la conversion écologique du système productif et la révolution industrielle verte, le retour des usines en Europe et la reprise en main de notre destinée… ».
Voilà ce qu’on put lire les lecteurs de « Votez pour la dé-mondialisation » (La République plus forte que la mondialisation), d’Arnaud Montebourg, avec une préface d’Emmanuel Todd.
Ce n’est pas demain que le PS belge sous la houlette du commerçant de Mons trouvera un Arnaud Montebourg pour donner à lire un petit fascicule d’espoir aux militants.
Ce qui ne veut pas dire que la dé-mondialisation soit la recette idéale. Certaines voix de gauche s’élèvent bien qu’elles se soient mélangées à celles peu recommandables d’économistes de droite qui flirtent avec les thèses du Front National, pour dénoncer un nouvel apartheid laissant de côté les pauvres de la planète.
Dans son blog, l’économiste belge Paul Jorion a écrit sur la divergence désormais avérée des grandes puissances économiques dans leur quête désespérée d'une illusoire reprise. Il y craint une affirmation d’une politique du chacun pour soi, qui ne ferait qu’accentuer la crise.
Qu’importe. C’est un vrai débat de gauche que nos boutiquiers par vocation, et socialistes par intérêt, n’auront pas, au niveau de leur état-major central, ni à la table des Huit, même si certaines fédérations socialistes y seraient plutôt favorables.
Ce soir les scouts de la « Royale Unité » sont inquiets. Le camp se prolonge, mais ils ne sont plus certains que le jamboree aura bien lieu en octobre avec leur nouveau Baden Powell.