Mondialisation et incompétence !
Depuis 1820, avec la première société John Cockerill, il existe une sidérurgie dans le bassin liégeois. Après 192 ans d’une production de brames des hauts fourneaux à Seraing, c’est fini, l’acier n’y sera plus forgé.
C’est dans un premier temps mille emplois perdus, 3.000 familles qui verront leurs ressources principales par le travail de l’acier, disparaître, les villes de Liège et de Seraing sinistrées à un bien mauvais moment.
Dans un second temps, la fermeture progressive des industries connexes de Chertal, de la phase à froid et du reste du bassin de la Basse Meuse, sera le coup final porté par une multinationale à une industrie séculaire liégeoise.
Ce drame est dû à des mesures purement spéculatives d’Arcelor-Mittal, à l’absence d’une régulation de la mondialisation, mais pas seulement…
Il est aussi – par un long cheminement – le résultat de l’incapacité de la Région Wallonne à gérer la production du bassin et à sa complète ignorance de la bonne maintenance des outils de l’industrie certifiée par les contrats de vente, abandonnés d’abord par des industriels, lointains actionnaires de la société Cockerill, confiés ensuite, comme on se débarrasse d’un colis encombrant à un entrepreneur, Jean Gandois, qui remit l’entreprise à flot, pour que la Région la revende et en tire un bénéfice qui renflouera ses caisses déjà en déficit, à un Français : Usinor.
Dès lors, cette entreprise échappera complètement à la Région et c’est sans pouvoir intervenir qu’Usinor se fera avaler par Arcelor, qui, à son tour, finira dans la poche de l’Indien Mittal.
Vente et revente chaque fois agrémentées d’accords ménageant l’outil et le travail. Chiffons de papier que les travailleurs naïfs ont acceptés comme argent comptant. On voit bien aujourd’hui, ce qu’il en est !
C’est sous la présidence de Melchior Wathelet, en 1987, que Cockerill deviendra la propriété de la Région, cette décision est prise, avec la participation active de Serge Kubla, ministre régional de l’Economie et Elio Di Rupo, inspecteur général à l'Inspection de l'Énergie du Ministère de la Région wallonne à l’époque et qui commence la carrière politique que l’on sait.
Ensembles, ils vont sceller le sort de l’entreprise bicentenaire selon les sacro saints principes du libéralisme le plus stupide, l’entreprise ne sera plus belge, mais française. Elle échappera complètement à l’autorité de la Région en 1999, quand elle aura été « rentabilisée » par Gandois. La responsabilité d’Elio Di Rupo dans cette braderie est immense. En effet, c’est lui qui préside au marché en 1999, en qualité de ministre-président de la Région Wallonne !
Les pouvoirs publics n’avaient pas la moindre intention de contrôler Cockerill. Ils étaient là pour que le capitalisme fonctionne au profit des grandes entreprises. Le but du jeu capitaliste étant d’éliminer l’adversaire et l’entreprise qui n’est plus compétitive par rapport à des salaires plus bas, ailleurs et parfois sur un autre continent, ils savaient cela en 1999.
Cette flibusterie internationale allait prendre encore plus d’ampleur avec la crise et la mondialisation accélérée en 2011.
La faute a été commise en 1999. La sidérurgie gérée et rentabilisée aurait pu garder ses hauts-fourneaux et moyennant un développement intelligent conserver son autonomie par rapport aux grandes entreprises étrangères en gardant en réserves les dizaines de millions de cash gagnés sous Gandois et qui auraient pu servir dans les années maigres. Mais la Région était impatiente de faire « des bénéfices » c’est-à-dire de combler ses déficits.
Le débat n’eut pas lieu lors de la première vente à Usinor, parce qu’il n’y avait pas une volonté des Autorités à « socialiser » l’entreprise et aussi parce que Jean Gandois ne l’a pas voulu.
Relisons Jean Gandois : « Liège tout seul ne peut pas vivre durablement parce que son activité dans les périodes de basses conjonctures sidérurgiques est trop faible pour lui permettre de générer du cash en quantité suffisante pour faire ses investissements indispensables de modernisation ».
Cela sonne faux en 2011, quand on sait que les acheteurs Arcelor, puis Mittal n’ont jamais investi dans l’outil qui devait être remplacé en 2015, rendant caducs les accords « de modernisation », sans que jamais la Région ait fait le moindre acte conservatoire de ses droits au tribunal de commerce pour non respect du contrat.
Kubla et Di Rupo négociateurs, l’affaire était entendue, aucun des deux n’étant socialiste !
On se demande avec les nouvelles compétences de la Région Wallonne, quelles seront les erreurs de gestion après le mauvais marché dont les sidérurgistes paient très chèrement les conséquences.
On en a une petite idée de la manière dont est géré le circuit de Francorchamps.
Tant d’incompétence inquiète…
Commentaires
Comme d'habitude, c'est une excellente analyse que tu nous proposes. Proficiat. Mais as-tu une ou des solutions au problème spécifique de la sidérurgie liégeoise. C'est juste une question...
Postée le: Tounet | octobre 13, 2011 12:17 PM
Les politiciens wallons n'ont rien fait pour reconvertir - au travers de formations professionnelles, de centres d'orientation vers des professions porteuses d'emploi - les enfants des familles de travailleurs de la sidérurgie vouée à disparaître il y a quelque vingt ans déjà (rapport de Jean GANDOIS )
Demain, la Région wallonne n'aura même plus l'argent pour entretenir la verrière de la gare de Liége - Guillemins - objet de la mégalomanie des dirigeants/élus du PS.
Les électeurs du PS comprendront-ils un jour ? Après 2015 ( nouvelle gare de Mons et Capitale mondiale de la culture de la ville du Doudou Elio ) peut-être ou avant ! ! !
Postée le: Henry | octobre 13, 2011 02:08 PM
Je n'aurais jamais travaillé chez cockerill. Ça pue trop, on fait les pauses et c'est trop mal payé. Comme Gaston, c'était soit syndicaliste professionnel soit la politique. Je comprends Mittal qui part. La Wallonie c'est foutu.
Postée le: Eloi Di Roublardo | octobre 14, 2011 09:57 PM