Vive la Commune !
Des presses des Editions de la Découverte, vient de sortir une œuvre majeure oubliée, « Mes cahiers rouges », de Maxime Vuillaume.
On n’avait eu droit, jusqu’ici qu’à des extraits de cette œuvre monumentale, ostracisée sous la IIIme République. L’intégrale, en ajouts éclairants, dépeint par le menu et au quotidien ce que fut la Commune de Paris de 1871. La narration est simple, les faits sont pris sur le vif avec un indéniable accent de sincérité. La manière de raconter rappelle un peu celle de Restif de la Bretonne, déambulant trois-quarts de siècle auparavant, au long des rues...
Que ceux qui ont été trompés par l’Histoires officielle le sachent, la Commune n’était pas le repaire de voyous et d’assassins dont on a farci la tête des enfants des générations suivantes.
C’était le peuple de Paris, d’intellectuels, d’artistes, de bons artisans, d’anciens compagnons du tour de France, d’ouvriers éclairés (ceux des imprimeries, comme Restif le fut, n’étaient pas des moindres)… La ganache était en face, les Versaillais ramassis de bleus des campagnes, gradés scrogneugneu de l’Empire, déserteurs du maréchal Bazaine, gendarmes royalistes et dénonciateurs haineux.
La république des propriétaires recrutait de la canaille et la mêlait aux braves gens qui ne distinguaient la crapule de leurs rangs, que parce qu’ils la croyaient en face.
L’ère industrielle avait débuté une vingtaine d’années avant. La Commune de Paris et sa fin dite de « La semaine sanglante » (20.000 ouvriers fusillés, 30.000 déportés) s'y confrontait déjà aux " temps modernes". Le prélude au système capitaliste productiviste réclamait du sang.
En écrivant ses « Cahiers Rouges », Vuillaume a offert à ses contemporains et aux générations futures « L’histoire de ceux qui n’ont pas d’histoire », selon la belle formule de Jules Michelet au Collège de France.
Fernand Braudel avec beaucoup de philosophes, historiens, économistes sont d’accord sur un point : « Il n'y a jamais entre passé, même lointain et présent de discontinuité absolue, ou si l'on préfère de non contamination. Les expériences du passé ne cessent de se prolonger dans la vie présente ».
Ceux qui débutèrent le système capitaliste, ceux qui le perfectionnèrent et ceux qui le prônent aujourd’hui sont identiques.
Tous les personnages qui gravitent autour du système sont responsables, qu’ils soient politiques ou banquiers.
De la gauche à la droite, tout Etat confondu et indistinctement des emplois, de Napoléon III à Thiers, de Fallières à Lebrun, de François Hollande à Di Rupo, en passant par Reynders, François Fillon ou Wouter Beke, ils aiment ça, les salauds, un Etat fondé sur les égoïsmes et la puissance de l’argent. Le cas échéant, ils le feraient défendre les armes à la main. Comme c’est le cas en Grèce, au bord de la guerre civile, sous un gouvernement socialiste !
L’histoire de la Commune peut se répéter dans un futur qu’on ne pouvait qu’imaginer lointain avant 2008, mais qui en 2011, s’est drôlement rapproché de nous.
Qu’étaient-ils, ces insurgés parisiens à la chute de Napoléon III ? Des patriotes devant les troupes prussiennes, des travailleurs trahis et condamnés par l’autorité, d’abord de l’Empire, ensuite de la république d’Adolphe Thiers.
Dans le fond, tous les dirigeants du monde, sous tous les régimes, n’ont jamais aimé le peuple dont ils tirent leurs revenus !
On quitte le livre de Vuillaume comme si les événements étaient d’hier. Et on se dit que la
Semaine sanglante, du 22 au 28 mai 1871, épisode final de la Commune de Paris, où celle-ci est écrasée et ses membres exécutés, pourrait se répéter.
Tout dans la période que nous traversons y conduit. Le système est détraqué, les appétits des possédants restent intacts, la démocratie manipulée par l’argent ne veut quasiment plus rien dire. Les avides ont avec eux les forces de « l’ordre », qui le cas échéant, tireraient sans hésiter sur la foule.
Le ramassis de canailles d’aujourd’hui n’est-il pas un condensé de ce qu’on appelle « les forces vives » ?
Et ce n’est pas du pipo (1) !
Humainement parlant, l’insurrection contre la faim et l’injustice n’est que le sursaut de l’honnête homme. Elle est rarement suivie d’une amélioration des conditions d’existence. Tôt ou tard, la raison bourgeoise, la fameuse justification du « bon sens » finit par se moquer du « temps des cerises ».
Mais au moins, quand ça pète, c’est le plaisir de les voir chier dans leur froc, de se repaître du spectacle des larbins de la politique, à l’abri de leurs hommes de main, ordonner des massacres, au nom d’une autorité immorale…
Merde ! c’est beau un homme qui recouvre sa dignité, qu’on respecte l’espace d’un rassemblement… d’une émeute, avant qu’ils aillent chercher l’autopompe.
Et le citoyen trop naïf et apeuré, tandis qu’il applaudit les partis de « la raison »… se demande s’il n’a pas tort !
Vive la Commune, nom de dieu !...
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1. La jeune fille des Indignés qui reçut la semaine dernière des coups d’un inspecteur de police alors qu’elle était à terre et n’était pas hostile, dénote un certain état d’esprit. Les énergumènes sont légion dans la police. Il suffit que les chefs libèrent les instincts, et c’est parti… Déjà que cet individu dangereux n’a reçu qu’un blâme et que personne n’a cru bon de lui retirer son flingue, on voit comme ça peut aller vite…