On liquide… mais on reste !
En janvier 2009, Reynders tout ému, soutenu par Yves Leterme et la Laurette d’Elio, jura qu’il sauvait les banques fofolles seulement pour les personnels que les faillites jetteraient à la rue.
Que cet homme était donc altruiste ! En même temps, toutes les républiques filiales de Wall Street en faisaient autant avec le même prétexte. « Il faut sauver le soldat Ryan » déguisé en employé de banque.
Du coup on n’avait jamais tant parlé du petit personnel !
Pour un peu, Reynders nous faisait le coup de l’indignation. Comment diable pouvait-on suspecter sa parole ! Quelques « mauvais esprits de gauche » pensaient le contraire, sauf au PS où Di Rupo joignait le chœur des pleureuses de droite, suivi de toute sa cour.
Enfin, argument suprême, les mauvais gestionnaires rembourseraient les sommes avancées. Promis, juré ! On voyait déjà les banquiers sur la paille remboursant sou par sou, comme le Birotteau de Balzac.
L’intérêt pour les petits employés de banque fut de courte durée. Quand il n’est pas un moyen de pression pour un chantage, le travailleur « malheureux » devient gênant et son avatar, le chômeur, l’est davantage. Comment voulez-vous retirer de sang-froid, ne serait-ce qu’un euro, à des gens qui sont déjà dans le besoin ? Donc, pour le faire, il faut que le salarié, le chômeur, le malade et le petits vieux restent des abstractions, qu’ils n’existent que sur le papier et qu’on puisse les rayer d’un trait de plume sans état d’âme. Ce que Chastel, Reynders et Michel font très bien.
Depuis, les restructurations ont permis aux banques de s’alléger globalement de nombreux salariés et de doter leurs stars de revenus astronomiques.
Ah ! qu’alliez-vous croire ?
Ces purges ne sont pas les résultantes directes de 2008-2009, mais sont dues à la crise de l’euro, le toboggan de la Bourse, ainsi qu’une décision du G20 d’accroître le capital de réserve, nous disent les banquiers l’air navré. Comme si 2011 n’était pas la suite non-stop de décembre 2008 et que les licenciements actuels n’y étaient pas liés par une suite logique d’une folie spéculative des mêmes !
La défiance des banques américaines fait le reste par rapport à l’euro.
Cette rigueur qu’on ne trouve pas dans les salles des traders, la banque entend l’appliquer au rayon en-dessous. Les guichetiers vont trinquer. Des millions ont été investi dans la banque dorénavant vide de personnel, mais toujours aussi active parce que robotisée à l’extrême. La salle d’accueil n’est plus qu’une série de logettes. Le client y fait son petit marché lui-même. Il paie des factures, retire de l’argent. S’il n’y a plus aucun guichetier, par contre, les frais de gestion de son compte se sont accrus, alors qu’il fait le guichetier lui-même. Allez comprendre ?
On nous dit que dans un but d’économie, on remplace les hommes par des machines. Oui, mais cet investissement coûte plus cher que l’ancien personnel licencié.
Les petites banques qui ont fait des efforts pour se hisser dans l’électronique à la hauteur des grandes, devraient pouvoir amortir le matériel sur plusieurs années, sauf si demain des progrès sensibles mettent de nouvelles machines plus performantes sur le marché. Elles suivraient le mouvement des grandes, sous peine de perdre leur compétitivité.
Reste que l’argument du gouvernement pour soutenir les banques en 2009 ne tient plus. Je ne suis pas compétent pour chiffrer le nombre de départs à la suite des faillites si elles avaient été prononcées. Il serait intéressant de faire le bilan fin 2011, afin de savoir si ce chiffre est inférieur ou supérieur aux pertes actuelles d’emplois des banques en activité.
Etre ministre concerné par l’économie en dents de scie est un exercice au jour le jour. Il ne sait pas de quoi demain sera fait, ce qui est pourtant son métier. Les experts cafouillent. Les médias piquent ce qui plaît le mieux à leurs patrons financiers dans le fatras de nouvelles contradictoires. Tout le monde ment et le public le sent.
Il serait temps que le public reprenne le dessus sur le privé et que ce ne soit plus les banques qui font la pluie et le beau temps dans les démocraties, mais les citoyens.
Au congrès du MR de Marche-en-Famenne, le problème n’est pas perçu de la même manière. Charles Michel est clair là-dessus. Où il l’est moins, et même pas du tout, c’est quand il explique la manière du MR de le percevoir.
Quant à la solution convenable, Charles Michel l’a répété, il n’y en n’a pas !
La mondialisation est en marche et ce n’est pas le MR qui l’arrêtera. Au contraire, son élite pense grimper dans le bon wagon.
Tandis que le jeune Michel Pérorait sur les chances du capitalisme moderne, Reynders tassé sur son siège, pensait sans doute à la gare que Jean Gol lui avait donnée pour premier jouet dans la cour des grands. Il se voyait en chef de gare qui fait partir ses trains à l’heure, sans avoir de montre, rien que par son sens du devoir ! Il était presque heureux, malgré le pauvre sourire de circonstance qu’il affichait aux photographes de presse. Il est vrai qu’on ne le photographiait pas beaucoup !
Reynders ne pensait certainement pas aux pauvres types qu’il avait soi-disant sauvés en 2008 et licenciés en 2011 avec l’argent qu’il avait avancé aux banques.
C’est ça être un bon libéral, éviter de réfléchir !...