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Récidivistes !

Il y a comme ça des récidivistes qui font de la récidive une manière de montrer leur force de caractère. Je ne veux pas parler de ces pauvres gens malmenés d’une agence pour l’emploi à un boulot immonde et mal payé, et qui récidivent faute de pouvoir faire autrement, je parle des récidivistes qui n’ont pas besoin de récidiver et qui récidivent quand même.
Ceux dont la « carrière » est tellement riche qu’il pourrait s’arrêter après seulement deux mandatures et qui poursuivent quand même leur récidive en se représentant devant les électeurs, en collant des affiches le jour des élections et en grillant cigarette sur cigarette en attendant les résultats.
C’est ainsi que descendant la rue Saint-Gilles, quelques semaines avant juin 2010, j’ai vu Didier Reynders avec une petite équipe de colleurs d’affiches, lui, le ministre des finances, en train de récidiver pour une tantième réélection. Il semblait ne voir personne, désignant à deux sympathisants plus jeunes que lui, les endroits stratégiques d’où on verrait de partout sa belle tête argentée de quinqua.
Ce n’est pas la sagesse qui pousse ainsi ceux qui vivent de la politique à se représenter après fortune faite dans le domaine public.
Encore moins l’amour du prochain, quand on entend leurs propos acides.
L’amour de la patrie, si souvent placé en tête de leurs préoccupations, ne légitimerait pas une récidive aussi obstinée, dans un pays aux contours incertains, sans un autre enjeu que celui de défendre la Wallonie et les Wallons.
Quels sont les ressorts d’un récidiviste ?

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L’âpreté au gain, sans doute. Passer d’une vingtaine de milliers d’euros par mois minimum (avec les frais et divers autres mandats accessoires, mais néanmoins lucratifs) à six mille environs du retraité (après deux mandats), si c’est encore confortable pour 90 % des citoyens qui n’en espèrent pas tant, pour eux, c’est déchoir.
Voilà, le premier calcul du récidiviste.
Le second doit être l’addiction au pouvoir. Les caporaux instructeurs savent le plaisir de diriger les hommes, d’avoir le dernier mot, de voir les subalternes acquiescer aux plans et élucubrations les plus exécrables, de parler à l’infini de choses qu’ils ne connaissent absolument pas, mais dont un bel aplomb finit par assurer la compétence, d’être invité partout et d’avoir un mot à dire sur tout et avant tout le monde. Oui, le pouvoir est une drogue et d’imaginer que c’est pour la grandeur du pays qu’ils inscrivent leurs noms sur les tablettes de l’histoire, c’est compter pour rien, ce qu’il y a de jouissif de se croire au-dessus du lot.
Quelqu’un qui s’accroche au pouvoir, est toujours suspect.
Comment résister à l’inconséquence des peuples, la frivolité des gens ? Il y a quelque chose de louche dans une récidive réussie. Elle est faite de tractations secrètes, de peaux de banane sous les pas de confrères plus jeunes, et d’un rapport indéfinissable envers ceux dont on est redevable. Un récidiviste, rompu à cet exercice, n’est pas net.
Une carrière de cinquante ans dans la députation et l’emploi ministériel toujours renouvelés a quelque chose qui relève de l’escroquerie intellectuelle.
Les philosophes se sont accordés sur la durée aux affaires d’un homme de pouvoir : les longs séjours ne sont pas bons pour la démocratie.
La présidence en France ne peut se poursuivre au-delà de deux mandats. Pourquoi n’élargirait-on pas cette exigence à tous les mandats publics ?
Sage proposition qui n’a aucune chance d’être discutée en Belgique, quand on revoit les mêmes depuis si longtemps, quand on sait que certains dépasseront l’âge légal de la pension voté pour les autres. On a compris, les lois ne sont pas faites pour eux, mais pour nous.
Franchement, pour qu’une démocratie soit viable, qu’un air frais y circule, une expulsion de nos importants tous les quatre ans serait à peine suffisante.

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