Rouge comme l’espérance…
Il n’y a pas si longtemps, les spécialistes s’inquiétaient seuls de l’endettement. Les ministres se contentaient de se disputer au sein du gouvernement sur la part « du gâteau » qui leur revenait afin de poursuivre leur politique.
Cela fut ainsi lors des Trente glorieuses. Puis, il fallut emprunter de plus en plus. Ce fut le début des Trente piteuses. Va-t-on vers les Trente calamiteuses ?
Rien ne permet encore de l’affirmer. Seul élément nouveau, les citoyens se sont sensibilisés depuis la crise des supprimes de 2008. Les politiques qui s’étaient habitués à puiser dans les fonds empruntés, afin de poursuivre la politique à court terme qui consiste à se faire réélire tous les quatre ans, ne le peuvent plus sous la contrainte de l’opinion et la publicité faite autour des Agences de notation.
La mondialisation qui a mis en contact les hauts salaires des ouvriers avec les bas salaires de leurs confrères de misère, par l’effet des vases communicants, produit des effets dévastateurs dans les zones développées. Cela aurait pu avoir un effet bénéfique si la politique avait consisté de défendre les niveaux de vie les plus élevés en permettant aux bas salaires de lorgner vers le haut.
On sait que l’industrie et les banques n’ont cure de ce capitalisme là et que les pays de développement anciens plongent, pour un très faible ajustement des salaires asiatiques.
L’Espagne prend le chemin de la Grèce. La Belgique doit trouver trois milliards supplémentaires pour 2013. La France est à 86 % du PIB de la dette.
Tout porte à croire que la crise est loin d’être terminée. L’aggravation des mesures d’austérité ne sert qu’à augmenter le chômage et ralentir l’économie, les efforts consentis ne servent pratiquement à rien.
Les prêteurs s’inquiètent de ne pouvoir être remboursés. Ils se réveillent et menace les Etats de faillite.
Comme on n’en est plus à l’Etat souverain du temps de Philippe le Bel qui fit main basse sur l’argent des Templiers sans autre forme de procès, l’Etat courbe l’échine et fait la file devant les guichets des organismes financiers.
Quand dans une démocratie, les responsables ne reçoivent plus d’ordres des citoyens sans qu’ils ne passent par l’aval des prêteurs, les fils d’Harpagon acceptent n’importe quel argent à des taux d’intérêt usuraires.
La dette, on ne le voit que trop, joue un sale tour aux candidats à la présidence de la France qui voient leur programme disparaître sous son poids.
Di Rupo en est réduit à favoriser les thèses du ministre de la Défense pour des économies dans l’armée, de sabrer dans tous les budgets et de dissimuler des augmentations de taxes sous des propositions qui « équilibreraient équitablement le partage des efforts », sans pouvoir aucun sur les fortunes et les hauts salaires, puisque justement ce sont des gens de la catégorie de nos prêteurs…
Les rapports sociaux sont devenus exécrables. Le pouvoir politique montre son impuissance devant la montée des intérêts à rembourser. Le peuple se voit dépossédé d’une part croissante des avancées sociales que les luttes passées avaient conquises sur l’accumulation capitaliste. L’avenir paraît bouché.
La relation comptable entre créancier et débiteur amplifie, par effet parallèle, les mécanismes d’exploitation et de domination du système capitalisme. Quand les Etats tentent d’honorer, au moins les intérêts de leur dette, le mécanisme que cela enclenche ne fait pas la distinction entre les travailleurs et les chômeurs, les actifs et les inactifs, parmi lesquels les retraités et les allocataires sociaux. Ce sont évidemment ceux qui sont les moins couverts par des biens ou des assurances qui trinquent le plus. C’est-à-dire les petits revenus, les victimes de la crise, qui à la longue, le sont doublement, par les mécanismes de la TVA et de l’indexation.
Par exemple un haut revenu qui bénéficie d’une tranche d’index comme le bas revenu, voit l’écart entre les deux grandir.
L’un des enjeux politiques du néolibéralisme est celui de la propriété : le rapport entre créancier-débiteur met le locataire en état de faiblesse.
Avec l’automaticité de l’accumulation des intérêts, le montant total de la dette des pays en développement (PED) est passé de 70 milliards de dollars en 1970 à 3 545 milliards en 2009. Entre-temps, les PED avaient cependant remboursé l’équivalent de cent dix fois ce qu’ils devaient initialement.
Bref, la Belgique, comme le reste de l’Europe, est dans de sales draps. Les recettes socialisantes ne servent à rien, comme les recettes libérales, à peu près semblables. Nous ne sortirons pas de la crise de cette manière. La social-démocratie a vécu. Elle se termine dans la honte et la confusion.
La seule bonne nouvelle, c’est de voir des centaines de milliers de Français tourner le dos à Sarkozy et à Hollande, pour s’intéresser à la vraie gauche, celle de Mélanchon, qui renoue heureusement avec les travailleurs que le parti socialiste a abandonné trop vite.
Cette bonne nouvelle est porteuse d’espérance et c’est ce dont nous avons le plus besoin.