Frémissement de gauche ce 18 mars.
Grâce soit rendue à Jean-Luc Mélenchon dont le mérite est de s’être souvenu de la journée du 18 mars 1871, pour organiser un grand cortège de la Nation à la Bastille. C’est à cette date que commence l’histoire de la Commune de Paris qui dura un peu plus de deux mois, pour s'achever dans ce que les historiens ont appelé la « Semaine sanglante » du 21 au 28 mai 1871qui fit tant de morts parmi la population parisienne.
L’insurrection contre un gouvernement « de collaboration avec l’ennemi » comme le fut celui de Vichy en 40, fut une réaction à la défaite française de 1870.
Alliant 1789 à 1871, Jean-Luc Mélenchon savait qu’il allait toucher au cœur les Communards encore nombreux en France et en Belgique, ainsi que les républicains avec la date symbole de la prise de la Bastille.
Ce fut dit-on une belle journée pour la gauche et Mélenchon qui finit par un discours sur les marches de l’Opéra-Bastille, à l’emplacement de la prison des rois.
Rendant de l’éclat à la couleur rouge que le PS de Hollande à la pêche aux voix centristes semble avoir abandonné, Mélenchon est à la hausse dans les sondages, depuis plus de trois semaines.
L’INS-Sofres le crédite de la meilleure dynamique de campagne. Sarkozy voit d’un œil amusé ce qui pourrait faire perdre des voix au premier tour à Hollande. Comme cette percée Mélenchon n’empêchera pas le candidat du Ps à figurer au second tour, Sarkozy a tort de croire qu’ainsi il pourrait avoir Marine Le Pen, pendant sa semaine sanglante à lui, celle entre les deux tours.
Mélenchon, soutenu par le Parti communiste, est le seul, après Georges Marchais, à dépasser les 10 % d’intentions de vote, à 30 jours du scrutin.
Personnellement, je trouve Mélenchon sympa et convainquant, héritier des tribuns de la 1re République, mais pour les amis de Di Rupo, il les agace prodigieusement, tant par la hardiesse de ses propositions, que de la manière dont il les exprime, rompant avec la langue de bois de nos avocats reconvertis en politique, les couilles molles du boulevard de l’Empereur.
Dans la bataille d’énarques d’une campagne de deux candidats écrasant tous les autres, il est celui qui sort du lot comme de la langue de bois, tandis que sa rhétorique affiche une belle santé en usant de l’arme la plus ancienne qui soit et qu’on n’apprend pas à l’école : l’éloquence !
Au décompte pingre des flics, ils étaient 30.000, place de la Bastille à écouter Mélenchon. 5000 ballons rouges, 10.000 affiches, 500.000 autocollants "Vite la VIe République", 200.000 autocollants "Prenez le pouvoir!", 200 cars et 8 trains affrétés, 900 bénévoles pour assurer le service d'ordre, c’est tout de même un meeting monstre bien moins coûteux que celui de Villepinte organisé par la droite.
Quand on sait que depuis trois semaines les meetings de Mélenchon se jouent à guichets fermés, il ne manquerait plus à ce rassemblement de la « vraie » gauche le ralliement de Poutou, du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) et Nathalie Arthaud, de Lutte ouvrière. Il ne faut pas rêver, ces deux petits partis n’existent que parce qu’ils s’escriment à ne s’inscrire nulle part, lors même qu’ils défendent l’idée du collectif et de l’union ; mais, c’est seulement dans leurs meetings et sous leurs programmes, ce qui se révèle être à chaque manœuvre de rapprochement une difficulté insurmontable.
C’est dommage. On sait comme les dynamiques fusionnelles attirent et agglomèrent les hésitants.
Non content de gagner des points dans l'opinion, Mélenchon a vu ses idées inspirer François Hollande, et même, Nicolas Sarkozy ! Par exemple, la proposition de François Hollande de taxer à 75% les revenus annuels supérieurs à un million d'euros. Mélenchon proposait de taxer à 100% les hauts salaires.
"On peut créer l'événement politique au soir du 22 avril", dit le co-directeur de campagne, Olivier Dartigolles (PCF). La porte-parole de Mélanchon traduit son enthousiasme par une réflexion qu’elle fait à voix haute et qui n’est pas moquée par la presse : l'objectif est désormais d'"être devant François Bayrou". Et qui sait? Devant l'ennemie Marine Le Pen.
Par la vertu des vases communicants, Mélenchon le déboucheur de la gauche en France, pourrait dégager aussi les lieux d’aisance – trop d’aisance – d’un PS belge sans concurrent.