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Chute des idoles.

Il y a vingt ans, le phénomène Internet entrait dans les mœurs.
Les fans, admirateurs absolus en quête d’une vie à s’approprier, ont amplifié le phénomène de visibilité des stars.
Cherchant à tout prix d’enrayer les pertes, les magazines et les programmes télé ont embrayé sur la chose. Si bien que le divertissement par l’écrit et par l’image montre à peu près la même chose que sur le NET.
Il y a dix ans, on recensait plus de cent mille sites Internet sur Elvis Presley.
La foudroyante ascension d’Internet a eu des effets considérables sur le rapport à la célébrité.
Pour se rendre compte du phénomène, il n’y a qu’à taper le nom d’un acteur peu connu sur le clavier de l’ordi. Immédiatement des images et des renseignements sur la personne arrivent par centaines. Inutile de souligner la multiplication de ce phénomène quand on s’inscrit dans une demande d‘une star mondialement connue.
Voilà qui sonne le glas du monopole des industries culturelles, puisque ce sont des consommateurs, assez souvent, qui renseignent d’autres consommateurs.
Le succès de l’entreprise a donné des idées aux vedettes qui se répandent de manière très intime dans des blogs créés à cette intention. Les politiques, beaucoup moins célèbres que le moindre cabot de Hollywood, s’y sont engouffrés pour des raisons de reconnaissance électorale.
Ces temps derniers la lèche de l’électeur est particulièrement intense du côté du MR qui doit se refaire de la perte du FDF et qui compte sur l’exposition du PS derrière Di Rupo pour compenser cette perte sur le dos des socialistes, et cela loin des gazettes, sur les blogs, d’où les sourires aimables, les tronches retouchées dans l’art de se vendre, le tout sur un fond de décor bleu azur.
Deux milliards de spectateurs connectés ont assisté à la cérémonie du prince William épousant Kate Middletown.
En 1996, Jennifer Ringley installa une caméra dans sa chambre. La Webcam était lancée.
Et c’est l’enchaînement. En 2000, des Girls Cam sont programmés avec forum, webmagazine et une sorte de Who’s Who spécialisé.
Cette dernière invention fait rétrograder étrangement la visibilité des stars vingt années auparavant, n’importe qui peut faire la même chose, rétablissant ainsi une identique reconnaissance entre regardés et regardeurs.
Voyeurs et exhibitionnistes s’éclatent.
Le caractère relationnel identique de Myspace et Facebook fait perdre à l’image diffusée toute capacité distinctive puisqu’elle est permise à chacun. Aujourd’hui, il n’y a pas que les miss qui montrent leur cul, d’abord, pour ensuite attirer l’attention sur leur tronche glamour. Pascal serait saisi d’apprendre que ses Provinciales, en 2012 feraient les folles devant leur caméra d’ordinateur.
Cette nouvelle forme de narcissisme étend au publique la présentation de soi-même. Elle s’ajoute et se dilue dans la représentation des célébrités. L’intimité se partage.
Plus rien n’empêche les fans de se faire dorénavant passer pour leurs idoles. On compte sur Facebook des dizaines de lady Gaga, autant que des Carla Bruni, des François Hollande à la pelle, mais moins encore que des Nicolas Sarkozy.
Pour se défendre du « vulgaire » les stars, voyant le danger de se faire aspirer par les fans, ont rejoint un réseau VIP « asmallworld.net » dans lequel on ne peut entrer sans montrer patte blanche.
Les Portables terminent la boucle. On y peut tout en plus de communiquer par la voix, ce qui était le premier rôle du téléphone. Ainsi sont nés les « snaparazzis » ces gens de la rue qui prennent des photos d’actualité, certains dans l’espoir d’en retirer de l’argent par leur vente dans les journaux (de cent à cent mille euros !).
Un magazine a lancé un concours « traquez les stars sur Internet » !
Ces « progrès » ont multiplié les fans de façon inimaginable.

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Si bien que la célébrité n’est plus ce qu’elle était. Par les moyens actuels n’importe quel péquenaud peut y atteindre. C’est la star qui se déprécie.
Laissons au sociologue le soin d’apprécier le rôle des innovations techniques de ces vingt dernières années dans le cadre d’une étude plus sérieuse qu’une chronique de R III.
Mon propos est de réfléchir sur la place du people et du vedettariat dans l’organisation politique de la société. Car, évidemment les « progrès » sont valables pour tous, y compris pour nos « élites » qui ne s’en privent pas.
Ce que nos idoles ne pourront éviter, nos stars de la politique ne le pourront pas non plus, c’est l’avalanche des images qui tue l’image. Leur multiplication fait apparaître des millions de Narcisse qui rendront invisibles ceux qui en ont fait leur business. Mais aussi l’extrême vulgarité parfois des « élites ». Le peuple s’aperçoit de l’égalité physique entre les riches et les pauvres. Le dominateur n’a plus rien d’exceptionnel.
Bientôt, les magazines devront mettre une sourdine aux moqueries des stars par les lecteurs branchés. Les ricanements se font entendre autour des superlatifs utilisés dans le show-biz.
Les gens célèbres qui s’autocélébrent, eux et leurs progénitures, encourront demain, le ridicule.
Les techniques ont joué un tour à la vision de l’homme dans la société.
Si John Lennon n’avait pas été abattu sur un trottoir de NY par un fou qui voulait devenir célèbre, il est possible que dans les années qui viennent, sa désacralisation aurait suffi à ce qu’aucun cinglé ne veuille encore sa peau.
Le public pourrait reprendre ses droits des mains des professionnels incultes. Il suffit de fouiller les déchets pour trouver le joyau. Les prétextes à la vulgarisation ne seront plus les excuses de la vulgarité. Il suffira de se méfier des pédants, des sots et des envieux.

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